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![]() Spectacles![]() ![]() ![]() Noyée d'émotions(par Holstein)Aliénor, seule, assise dans un grand lit à baldaquin. La pièce est sombre, quelques bougies aux flammes orangées laissent apercevoir les cheveux blond vénitien gorgés d'eau de la fille de bientôt dix-sept ans. Sa robe de chambre blanche s'humidifie à longueur que les larmes parcourent le long de son visage d'ange et atterrissent droit sur le tissu. Le contour noir de son maquillage ne se limite désormais plus aux frontières de ses yeux mais bien à l’entièreté de ses joues. Au travers des imposants murs de pierre grisâtres se dessinent des orages de plus en plus violents. La pluie torrentielle s'abat sur le domaine et le vent claque une lointaine fenêtre dans un dérangeant bruit régulier. Aliénor paraît bouleversée et tente a priori de dire quelque chose ; seul un charabia de mots collés les uns aux autres peut être distingué des larmes de crocodiles qu'elle produit en continu. ALIÉNOR, les cordes vocales tremblantes Maman... maman... j'ai besoin de vous parler. Sa main droite serre une amulette mauve violet qu'elle porte autour du cou. Sa main droite, quant à elle, parcours la chaîne argentée. Son extinction de voix lui donne un aspect plus masculin que ce qu'elle n'est normalement. Elle lève les yeux au plafond et essaye de contenir ses larmes en fermant les paupières. ALIÉNOR, les yeux toujours fermés Je souhaiterais tellement vous enlacer... sentir votre odeur si fleurie, toucher votre peau si douce ! Je souhaiterais que vous me preniez le bras... Elle fixe à présent le sol d'un regard livide. ALIÉNOR, très calmement À l'aide. Au secours, Mère. Je vous en prie... sauvez-moi. Entre deux maigres sanglots, Aliénor prend une bouffée d'air. Elle se lève difficilement et s'assied au bord du lit, s'aidant de la poutre du baldaquin pour ne pas chuter. ALIÉNOR, frottant ses pouces entre eux Je ne voulais pas et... et maintenant je... ! Oh, quelle plaie ! Elle se met à larmoyer dans un fin mouchoir de tissu marqué aux initiales de « A. A », celles de sa mère. Les gouttes de tristesse s'enchaînent dans un silence paradoxal tandis qu'Aliénor se force à contrôler autant qu'elle peut sa respiration. Le gros de l'émotion était dorénavant passé. La jeune fille se lève brusquement et entreprend de dessiner des cercles dans la pièce. ALIÉNOR, en s'essuyant pour la dernière fois le coin des yeux et en parlant du nez, sous un sourire forcé Laissez moi vous raconter. Il me vint l'idée de vous lire, afin de faire passer cette déprime qui me tourmente. Elle passe une main sur sa robe et nettoie les quelques saletés qui y logèrent. ALIÉNOR, se raclant la gorge pour s'éclairer la voix Je me dis que garder au plus près de moi vos manuscrits les plus intimes pourraient m'aider à surmonter le deuil. Alors, je décidai de fouiller avec acharnement le château de fond en comble ; de la dernière cagette de la plus lointaine des caves à la plus fragile poutre de la plus élevée des alcôves. La Princesse s'arrêta de produire ces cercles imaginaires et se calqua en face de son bureau. ALIÉNOR, en extirpant un cahier de l'un des tiroirs Je réquisitionnai nombre de servants et autres gardes dans ma quête et nous finîmes par retrouver ce que nous cherchions. Je retirai délicatement le couvercle de la grande boîte poussiéreuse et j'y trouvai ce que je ne pensai pas trouver. Oh, Mère ! Délicatement, la fille passe ses longs doigts sur la couverture du manuscrit et se débarrasse de l'affolante couche de poussière accumulée en seulement quelques heures. ALIÉNOR, en inspectant tous les recoins du livre Dès le premier écrit fictionnel, vous parlâtes d'une mystérieuse cachette dissimulée au-dessous d'une fresque dans laquelle votre héroïne y cache des centaines de parchemins avouant ses plus sombres secrets. Elle jette un vif regard en direction du miroir, à une vingtaine de centimètres d'elle, accroché au mur du bureau. ALIÉNOR, parcourant brièvement le cahier Ma curiosité me poussa à écouter cette petite voix, dans ma tête. La Princesse s'arrête à certaines pages, prises au hasard ou non, et lit des passages çà et là , cherchant quelque chose en vain. ALIÉNOR, d'une traite Je pensai immédiatement à la peinture que l'on fît de vous lorsque vous montâtes sur le trône. Évidemment, je savais pertinemment où elle se situait puisque je l'avais autrefois cherchée durant de longues semaines. Je n'eus d'ailleurs jamais compris pourquoi elle se retrouva à tomber en lambeaux dans cette pièce si lointaine au reste du château. La fausse joie d'Aliénor n'aura pas duré longtemps ; elle s'effondre sur sa chaise de bureau. ALIÉNOR, la voix tremblante Oh, Mère ! J'aurais tellement voulu pouvoir faire quelque chose pour vous... Contemplant le reflet de ses yeux humides dans la glace. ALIÉNOR, dubitative Lorsque je suis entrée dans cette salle, un étrange sentiment me parcourut de la pointe de mes pieds et remonta par la colonne vertébrale jusqu'au sommet de ma tête. Je jetai un Å“il à la tonne de paperasse éparpillée par terre et il ne me fallut presque rien comme temps pour tomber sur le plus terrible des papiers ! Il y avait votre lettre et... l'enveloppe cachetée. Instinctivement, Aliénor prend son amulette entre ses deux mains, comme s'il s'agissait d'un contact physique avec sa génitrice. ALIÉNOR, dans un sentiment de culpabilité Je parcourus ce fichu parchemin en un rien de temps. Le premier mot lu, mon intuition me dicta le reste. Je devinai ce qu'il était marqué sans pour autant lire ce que je ne voulais pas croire. Et mon cÅ“ur se déchira en deux. Vous expliquiez que... La chaleur parcours à nouveau le corps d'Aliénor. Sa gorge se serre, ses yeux s'arrondissent. ALIÉNOR, déglutissant En réalité, c'était une page de votre journal intime ; la dernière. Dans ce journal, vous mettiez sur papier tous vos sentiments enfouis pendant... Elle hésite une seconde, peut-être deux, à dire ce qu'elle pense. Ce qu'elle a toujours pensé. Ce qu'on lui a toujours refusé de penser. ALIÉNOR, hurlant à plein poumons Ces putains de quinze années à vivre avec ce tyran ! Elle entend sa voix résonner dans le couloir. Personne n'est là pour lui répondre. Elle aurait voulu se défouler, crier, hurler, se débattre contre quelqu'un. Mais le fait est qu'elle est seule dans cette partie du Château de Stravis, seul royaume ayant répondu favorablement à sa demande d'asile politique. Son corps transforme progressivement sa colère en tristesse. Contre son gré, elle explose de larmes. Sa voix est claire, son pouls bat à vitesse normale, elle ne tremble pas, mais des litres de larmes coulent sur sa robe de chambre. ALIÉNOR, sur un ton désolé plus que véritablement triste Oh, Mère... comment avez-vous tenu ? Sa tête légèrement inclinée, elle observait dans le miroir le reflet de son amulette. ALIÉNOR, le regard vide Vous étiez l'Héritière légitime du Royaume. Votre père et le mien – votre mari ! – vous ont utilisée tel de la chair à pâté. Vous avez servie de passerelle pour offrir la Couronne à Père sur un plateau d'argent. Il vous a peu à peu écartée du trône jusqu'à faire oublier au peuple, à VOTRE peuple, que vous étiez LEUR Reine ! Elle trouve enfin la page du livre qu'elle cherchait, et pose un marque-page au centre de la page de droite. ALIÉNOR, confiante Le dernier paragraphe de votre journal intime dit « J'ai été le premier pont qui le mena au Pouvoir, et je demeure le dernier obstacle qui une fois écarté du chemin, le mènera à sa victoire. Il sait que Nous sommes dangereuses, et il veut se débarrasser de Nous. Je suis le mur qui protège Aliénor de ses ambitions, et il est le bélier qui le fera s'écrouler. Toute ma vie, je me suis effacée de la gloire qui m'était dû pour faire barrage entre ses sinistres idées et ma fille chérie. Aujourd'hui, je sais qu'il a gagné. Il a gagné contre moi, mais il perdra contre elle. Je le sais, je le sens. L'instinct maternel, sans doute. Ce jour, j'ai compris que le mur que je suis ne suffira plus. Il a vu. Il s'est rendu compte que les briques sont solides, et qu'elles ne s'effondreront pas d'elles-mêmes. Poussé par la force des bras de Ses Hommes, le bélier a commencé à avancer. Il s'approche résolument décidé de la phase décisive de son plan ; le coup qui lui sera fatal. En faisant tomber la Reine, il pensait que le Roi bénéficierait de plus de marche de manoeuvre sur l'échiquier. Mais il n'eut pensé que le Roi n'avance que d'une case. Tandis qu'il fera parcourir le plateau de jeu d'un bout à l'autre au pion masculin, celui d'Aliénor se sera déjà transformé en Reine. Elle l'a vaincu avant même qu'il ne s'en rende compte. J'avais placé mon dernier pion aux abords de la dernière des lignes ennemies ; la case qui changera le pion en Reine. Il a toujours sous-estimé ma fille, mais il constatera également qu'il a surestimé son fils. » Rassemblant toutes ses forces pour ne pas pleurer, elle lève les yeux au ciel. ALIÉNOR, incrédule Mère, vous saviez tout ! Vous saviez qu'il vous tuerait ! Vous vous êtes laissée consciemment pousser du haut de ce balcon ! Pourquoi, Mère ? Vous le dites vous même ; vous saviez que sans vous, il pourrait changer les textes et faire de son fils l'Héritier, me sortant du jeu ! Sachant pertinemment qu'aucune réponse ne se manifesterait, elle décide de laisser ces questions en suspend. ALIÉNOR, blessée Il y avait un autre papier. Signé des mains tachées de sang de l'Assemblée, du Sénat, du Conseil et des membres de la Ligue. Une seule phrase compréhensible parmi ces lignes pseudo-juridiques chiffrées en je-ne-sais-quoi ; « La Reine n'est plus, le Roi est Tout, vive le Roi ! ». J'ai des relents rien qu'en regardant ce papier que je jure de brûler. Prenant une grande inspiration. ALIÉNOR, convaincue de ce qu'elle s'apprête à dire Je vous vengerai, Mère. Quand j'ai découvert toutes ces choses, une partie de moi s'est envolée. Je ne saurais dire quoi, mais j'avais la terrible impression que vous me léguiez un rôle. Je n'étais pas triste, mais furieuse. Je courus alors à ma chambre et ouvrit la porte du balcon. Au milieu de cette monstrueuse tempête, les genoux plantés dans le sol, je hurlai. L'orage frappait à quelques dizaines de mètres de moi, mais je continuai à crier. La pluie s'infiltrait dans ma robe, dans ma peau, dans ma chair, j'étais arrosée. Mais plus que cela, j'étais arrosée de souffrance, de tristesse et de larmes. Arrosée de chagrin, mais noyée de rage. Je n'ai aucune idée du temps passé au centre de ce fracas monumental. Mais j'y restai des heures. Elle se lève délicatement de la chaise et s'approche de la grande baie vitrée. ALIÉNOR, regardant au dehors, les mains croisées dans son dos J'ai le souvenir d'avoir pratiqué la sorcellerie comme je ne l'eus plus fait depuis des années. Je ne sais pas pourquoi, mais comme pendant les leçons de magie que je suivais, je joignis les deux mains. Alors que la foudre s'emparait littéralement de mon corps, mêlant l'eau et l'électricité, mon corps se gélifia. Brûlante de rage et glacée de désespoir, je concentrai toute ma force rassemblée durant ces heures de solitude dans le froid, et durant toutes ces années. Lorsque je rouvris les yeux, je vis apparaître devant moi un sort... En fait, il n'existe aucun mot assez lourd de sens pour en faire une description fidèle. Aliénor mime la jointure de ses deux mains et reconstitue la scène, pour sa jouissance personnelle. ALIÉNOR, les yeux fermés, se remémorant l'acte Plus puissant que ce que je n'eus jamais parvenu à faire, j'attirai tout autour de moi. Puis, j'écartai grand les bras et la boule de magie explosa en un milliard de particules de lumière dans un assourdissant bruit qui résonna partout dans le royaume, si pas sur le continent tout entier. Elle répète en gestuelle ce qu'elle vient de raconter. ALIÉNOR, se souvenant d'un coup de ce qu'il s'était passé ensuite Il ne pleuvait plus. Le temps s'était arrêté. Les gouttes de pluies statiques ne progressèrent plus dans leur avancée cieux-terre, et il en était de même pour la foudre. Manipulant mes doigts et mes mains dans de spectaculaires improvisations digne d'un ballet, je fis s'abattre tantôt toute l'eau des nuages sur le sol en disposant mes bras en croix, et tantôt je ne laissai passer seulement que quelques fines gouttes de pluie au travers de l'épaisse couche des ténébreux nuages. Quand l'eau toucha le sol, l'onde de choc fît trembler le Palais tout entier, comme une vague s'abattrait sur le littoral. Ensuite... La magie, quand – trop – bien exercée, pouvait engendrer des pertes de mémoire, de contrôle de soi ou carrément plonger des gens en sombres dépressions, voire les pousser jusque dans les tranchées de la folie. ALIÉNOR, retrouvant petit à petit les pièces du puzzle à reconstituer Je levai les mains, et la flotte remonta brusquement dans les airs. Toutes ces particules d'eau... c'était magnifique. À nouveau, je baissai les mains et le cycle recommença. Le même tremblement de terre se fît ressentir. Tellement dangereux, tellement puissant. Elle ressent une brise fraîche venir du couloir. ALIÉNOR, souriante Mais ce n'était pas tout ; le vent également était mien. Les bourrasques que je créais se succédèrent les unes après les autres pour bientôt laisser place à des tourbillons de pouvoir magique. Tout m'appartenait. La Princesse fait demi-tour sur elle-même et se couche dans son lit. ALIÉNOR, apaisée Je compris à ce moment là que vous étiez toujours dans mon cÅ“ur, et dans celui de notre nation. Je savais au plus profond de moi même que vous n'étiez pas disparue, mais que vous me guidiez de là -haut. Je sus alors ce que je devais faire. Je réalisai que vous ne vous étiez pas sacrifiée, mais tout le contraire. Il me fallut, je le ressentis, agir. Je devais passer de passive à active ; je devais le tuer. Je devais mettre fin aux jours de mon propre père. Aliénor entremêle ses mains et caresse la surface de sa peau, plus douce qu'une couverture en poils de bête. ALIÉNOR, dans une intonation presque théâtrale. Je suis là . Mouillée, trempée, souillée. Le ciel a fait tomber sur moi mers et océans, et, pourtant, c'est bien à l'intérieur que j'ai le plus mal. Mais le mal est fait. Je vous ai vengée, Mère. Je pensais que le jeu se terminerait alors, mais il y a un nouveau changement dans la partie ; le pion du Prince est devenu le Roi. Ce sera entre lui et moi. Et je ferai souffrir mon frère plus encore que nous n'ayons jamais souffert, Vous et moi, Mère. Croyez-moi sur parole ; je vous ferai vivre éternellement et je les enterrerai tous jusqu'aux entrailles de cette Terre. Elle ouvre lentement la bouche et articule quelques mots dans une langue étrangère à la sienne : ξ l δ α α r ι σ - w ι σ σ ε η ε υ ε σ - r ε ι η - τ ε rr ι σ τ ε - α l - δ ι ε η ε σ Φ r α σ τ ε η Φ σ
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