Foutu grille-pain
(par Aragon)(Thème : DĂ©fi images 3)(dernière modification : 25/05/2022)
Aragon sortit de sa torpeur. Où était-il ? Il ouvrit les yeux mais ne vit rien autour de lui. Il ne sentait plus rien, à part une vague odeur d’huile. Il essaya de se souvenir ce qu’il s’était passé. Il était à l’usine, en train de bosser sur le nouveau grille-pain à intelligence artificielle, l’une de ses dernières idées et le produit qui allait surement se vendre mieux qu’un grille-pain normal.
Il se souvenait juste du fait que les lumières s’étaient éteintes, surement dû à l’orage qui grondait dehors. En parlant d’orage, il pouvait entendre parfaitement les grondements du tonnerre. Il entendait aussi les autres travailleurs passer dans le couloir. Il se força se concentrer sur l’environnement et commença à percevoir l’espace autour de lui : son bureau, sa chaise, quelqu’un affalé dessus, l’ordi qui ronronnait à côté de lui. Il réalisa soudainement que la personne affalée sur la chaise était lui. Il pouvait reconnaitre son corps entre milles. « Je suis mort, c’est ça ? » dit-il pour lui-même.
Pourtant, il ne sentait pas partir, il se sentait même plus vivant que jamais. Tandis que ses sens lui revenaient petit à petit, il se sentit assailli par un flot de données qui se répétait en boucle. Instinctivement, il se mit à « écouter » ce flux, même s’il ne pouvait pas mieux d’écrire ce qu’il recevait. Après quelques minutes à l’analyser, il reconnut le code de l’intelligence artificielle du grille-pain, qui effectuait son travail. Il ne savait pas ce qu’il se passait mais il savait que, d’une manière ou d’une autre, il avait atterri dans ce grille-pain.
Il sentit un autre flux de données partir en direction de l’ordinateur et le suivit. Il passa dans un câble et arriva sur le bureau qu’il connaissait par cœur, mais contrairement à un écran où tout était en 2D, il voyait en 3D ce qui l’entourait. La corbeille était une sorte de trou noir, les différents navigateurs internet étaient d’immense piliers lumineux qui menait vers un ciel rempli d’images et de textes en perpétuel mouvement, et l’accès aux documents se faisait par un ascenseur qui descendait dans les profondeurs de son ordi. Aragon se dirigea vers ces derniers, il trouverait probablement quelque chose susceptible de l’aider. Il arriva dans ce qui ressemblait à une immense bibliothèque à plusieurs étages, chacun représentant un dossier, différentes pièces pour les sous dossiers et les rayonnages pour les fichiers.
En fouillant dans ses affaires, il tomba sur le projet HEV, qui consistait à produire des robots capables de se déplacer dans la plupart des environnements, extrêmes ou non. Une idée lui vint en tête. L’usine allait bientôt fermer. Personne ne passerait dans son bureau avant le lendemain matin pour faire le ménage. Il avait donc quelques heures pour fabriquer un robot fonctionnel avant qu’on ne remarque son corps. Il se dirigea vers le serveur central et utilisa les différents capteurs présents dans l’usine pour attendre que tout le monde parte.
Il lança ensuite la fabrication de son nouveau corps, qui essaya de faire le plus possible à son image. Normalement, le robot devait être vérifié par des humains avant d’être validé, mais il passa ses étapes. Aragon regardait le temps passer, il devait se dépêcher avant la venue des femmes de ménage. Une jambe fut rapidement finie, suivi ensuite par une deuxième. Les heures passèrent, trop rapidement à son gout, mais le robot se termina dans les temps. Aragon connecta un câble dessus et se transféra dedans. Alors qu’il était en train de charger ses batteries pour pouvoir se déplacer, il entendit le bruit d’une porte qui s’ouvrait. Il se dépêcha de foncer dans son bureau.
Il enfila rapidement ses habits, se regarda dans un miroir et constata qu’il ressemblait comme deux gouttes d’eau à son corps original. Il cacha son corps dans une armoire et fit semblant de se mettre au travail pile au moment où une femme de ménage arrivait dans son bureau. Elle allait crier de peur quand Aragon lui fit signe de se taire.
« Attendez, je bosse ici, c’est normal que je sois là . J’ai travaillé toute la nuit sur ce grille-pain.
Il lui montra son badge et elle se calma.
— Pardon, j’ai cru que vous Ă©tiez un voleur. DĂ©solĂ©, je suis un peu parano.
Aragon sourit, l’air de rien
— Il ne s’est rien passĂ© cette nuit, ne vous inquiĂ©tez pas. Vous devrez retournez Ă travailler avant de vous faire attraper. »
La femme de ménage sourit, rassurée, et quitta la pièce. Aragon réussi à faire sortir son corps sans trop de problèmes. Quelques temps plus tard, il posa sa démission et quitta son job. D’après lui, personne n’avait remarqué l’utilisation des machines, mais il était prudent et préféra disparaitre de la circulation.