La semaine dernière était ma première semaine à L'Académie Tropeur. J'y ai découvert des personnes... étonnantes. J'ai eu le temps de prendre mes repères dans ce grand bâtiment aux innombrables salles, et malgré ma timidité, j'ai rencontré quelques personnes. Je pensais que cette semaine allait bien se passer, jusqu'à ce que je tombe malade... Il se trouve que depuis lundi, je suis tout le temps faible, je suis ébloui à la simple lumière d'une lampe, et apparemment je, il y a des moments où mon attention est complètement aspirée sur une seule chose. Je ne me souviens pas de ces moments, donc je ne peux que me rapporter sur ce que les autres élèves me disent. Apparemment, madame biscuit me guidait vers ma chambre quand j'ai entendu le tic tac d'un horloge dans un couloir et je me suis assis devant, me balançant et hochant la tête au rythme des secondes. Pendant deux heures. Je ne m'en souviens pas, mais j'en ai toujours mal au cou.

Mon grand frère, Kazimir, est venu me chercher. Il a prévenu la directrice que je ne serai pas là pendant au moins quelques jours, le temps qu'on sache ce que j'ai, et que je guérisse. Kazimir sait tout de moi, il doit déjà savoir ce que j'ai. Je rassemble les affaires essentielles dans mon sac à dos avant de sortir de la chambre et de le rejoindre au bout du couloir.

— Alors p'tit champion, ça va pas très bien, Ă  ce qu'il paraĂ®t ?

Je me précipite dans ses bras.

— Grand frère ! Ça fait longtemps qu'on s'est pas vu...

— C'Ă©tait il y a une semaine, Boy. Tu ne t'en souviens plus, ça non plus ? Allez, grimpe sur mon dos.

Je monte sur ses épaules avec plaisir. Il peine à me porter mais il y arrive difficilement. Ses courts cheveux noirs sont toujours aussi doux et brillants. Il a de grands yeux de la même couleur. Comme son vieux manteau aussi. Et son pantalon... Il est un peu plus grand que moi, peut-être un mètre soixante. Son visage rond a quelques traits asiatiques, mais les traits qu'on voit le plus sont ces cernes. Il porte un bracelet magique en pierre noire, aussi.

Nous marchons jusqu'à l'entrée de l'académie. Une fois passés, Kazimir nous téléporte, à l'avant poste de Fallens Stars. Nous nous retrouvons au milieu de l'espace, sur un corps en orbite de l'île. Enfin, de la planète. Techniquement, c'est un mélange des deux. Fallens Stars est un corps artificiel créé par nos descendants. Il s'apparente à un morceau de terre volant, statique, entouré d'une bulle de cristal mauve. C'est cette barrière qui protège le village et tout l'écosystème de la surface. Nous rentrons dans le portail de cristal et arrivons de l'autre côté, directement sur la place du centre-ville, au centre de Fallens Stars. La Fontaine de Cristal, avec son diamant lévitant au-dessus, est vide. La bibliothèque et la vieille taverne sont encore là, mais ont l'air vides. Ce sont pourtant les bâtiments les plus vivants du village... Les quelques autres bâtiments , des bâtisses en pierre aux poutres apparentes, sont usées par le temps et vides. Nous suivons le chemin pavé jusqu'à la maison de mon grand frère. Là, il me dépose et nous rentrons.

— Et voilĂ , bienvenue chez toi, mon grand.

Je me prĂ©cipite Ă  l'Ă©tage, dans ma chambre, dĂ©pose mon sac Ă  dos sur mon petit bureau et plonge dans mon lit et mes couettes. Enfin ! C'est un vrai lit, pas comme Ă  L'AcadĂ©mie, juste assez moelleux et toujours chaud. Je regarde par la fenĂŞtre de ma chambre. On peut voir la plage, et une partie des montagnes noires au loin Ă  gauche, et le reste du village avec ses chemins menant vers la forĂŞt et la plaine Ă  droite jusqu'Ă  perte de vue.

Mon grand frère entre dans la chambre, avec deux mugs de thé à la main.

— Tiens, c'est pour toi, ça va te remettre d'aplomb pour un petit moment.

— Je-j'aurais pas besoin de mĂ©dicament, j'espère.

— Non. C'est normal. C'est ce qui nous arrive tous quand on grandit, un peu comme la pubertĂ© pour les humains.

— Il t'est arrivĂ© quoi, alors ?

— Hmm... Je ne m'en souviens plus, sĂ»rement de la fièvre et du somnambulisme.

Je prends ma tasse de thé.

— Tiens, je t'ai fait un bracelet comme le mien. Comme ça...

— Il tire des rayons laser, aussi !?

— Non, mais...

Il le porta à son poignet libre et le bracelet blanc, fait d'une pièce, sur lequel des patterns magiques sont gravées se mit à briller doucement.

— C'est juste une veilleuse... Dis-je, déçu.

— Pas du tout. Tu comprendras plus tard... Je te laisse, j'ai du travail Ă  faire au Laboratoire, dans la montagne.

Je ne l'écoutais plus, je m'étais concentré sur la vapeur s'échappant de ma tasse de thé.

Le reste de la journée, je ne m'en souviens plus. Je me réveille au labo, à côté d'une fenêtre avec ma tasse encore chaude. Mon frère est en train de travailler à son bureau. Il est tellement concentré qu'il a l'air immobile. Je n'ose pas le déranger. Le travail de technomancien est plus compliqué que n'importe lequel, et fondamental, ici. Tout Fallens Stars est basé sur la magie des cristaux qu'utilisent la technomancie. Les cristaux peuvent créer de la matière ou de l'énergie à l'infini, et on peut en quelque sorte les programmer, avec des gravures aux effets spéciaux. C'est incroyablement complexe, je ne saurais pas en dire plus à ce sujet. Et pour ça je considère Kazimir comme un génie.

De la fenêtre où je suis, on peut voir presque toute l'île. Sous la lumière rosâtre de la lune, elle est endormie. Au sud-ouest de l'île, pas très loin de la plage, la place de la Fontaine de Cristal, encore vide, rassemble les quelques dizaines de maisons du village. Quatre chemins en sortent, menant aux différents magnifiques espaces de l'île: les plaines verdoyantes puis le désert, la grande forêt , le ravin sans fin et la montagne. D'ici, on est assez proche de la barrière pour voir les constellations qui entourent Fallens Stars... Je m'assieds sur le rebord, et ferme les yeux pour écouter le vent et le calme présent, quelques fois interrompus par mon frère, soupirant et baillant…