Il fait chaud, les oiseaux piaillent en se chamaillant dehors, l'ombre des arbres projette une douce fraîcheur sur la maison en bois, la clairière est calme.

Une biche passe en courant dans la forêt et le garçon à la fenêtre lui lance des cailloux en ricanant.

Il s'ennuie, il aura bientôt 18 ans et devra partir de chez lui, devenir marchand ou tavernier... Pourtant, aucune de ses professions ne lui plaît, il veut accomplir de grandes choses, à la hauteur de lui-même.

Mais ses parents sont commerçants, un métier pitoyable. Son père lui répète à longueur de journée qu'il reprendra bientôt son travail.

Pfff, comme s' il allait s'abaisser au rang de vulgaire marchand.

— Tehis ! A table !

— J'arrive...

Il descend les marches en courant, ça l'énerve. Ils vont encore lui répéter à quel point ils sont fiers de lui et qu'il va devenir un grand marchand...

Une douce odeur règne dans la cuisine, la table et mise, son père se prélasse dans un fauteuil tandis que sa mère apporte un ragoût sur la table.

— Te voilà ! Nous avons une grande nouvelle à t'annoncer.

— Oui, oui...

Son père traîne son ventre bedonnant jusqu'à la table. Il a un visage avenant et une petite moustache. Il lui adresse un grand sourire :

— Tehis, nous allons devenir riches !

Mais, oui...

— Nous avons fait affaire avec une personne très importante !

Ben oui, un paysan.

— Un ambassadeur des elfes du ciel !

Attends, quoi ?

— Hein ??!!

— Et oui, il a besoin de marchandises de la capitale, les elfes du ciel vivent à l'écart, ils aiment beaucoup les produits exotiques.

Son père sourit jusqu'aux oreilles. Tehis le regarde toujours, sidéré.

— Quand est-ce qu'il arrive ?

— Dans 3 jours, nous devons lui déposer la marchandise devant la grange, les elfes sont très secrets.

— Qui te dit que ce n'est pas un piège ?

— Il a envoyé quelqu'un nous payer le quart de la somme, rassure toi, c'est déjà énorme. Il livrera le reste lorsqu'il aura sa commande.

— T'as envoyé qui la chercher ?

— Ben, le garçon d'écurie, il devrait revenir dans 2 jours.

Bon, il a tout prévu. Maintenant, il faut juste que Tehis arrive à voir cet elfe. Certains humains se font parfois envoyer dans certains clans, pour être ambassadeur ou autre. S' il arrive à faire ses preuves...

Le repas se termine dans le silence et Tehis finit par monter à toute vitesse dans sa chambre pour mettre au point son plan. Il ne lui reste plus qu'à attendre.

Deux jours plus tard, alors qu'il vise toujours les biches de sa fenêtre, Tehis entend une discussion animée entre ses parents.

Il se glisse en haut de l'escalier et les épie en silence.

— Ben n'est pas rentré !

— Qu'est ce qui est encore arrivé à cet idiot ?

— Tu n'aurais jamais dû le laisser partir seul !

— S'il ne revient pas demain, nous serons obligés de...

— Attention ! Tehis pourrait t'entendre !

Le garçon se retire sans bruit et s'affale sur son lit. Ces imbéciles vont encore trouver le moyen de tout gâcher !

Le soir venu, ses parents lui annoncent tristement :

— Tehis, Ben n'est pas revenu, nous allons être obligés d'annuler...

— Attendez ! C'est une très mauvaise idée ! Imaginez que son clan se trouve loin et qu'il soit déjà en route ? Il serait très énervé de devoir rebrousser chemin ! Attendez qu'il arrive et proposez lui de rester quelques jours, le temps d'envoyer une nouvelle charette !

Son père échange un regard entendu avec sa mère. Ses idiots ont mordu à l'hameçon !

— C'est une merveilleuse idée, mon fils. Tu feras un grand marchand.

Cette fois-ci, je me force à sourire.

Un jour plus tard, le moment est enfin venu ! En fin d'après-midi nous apercevons une silhouette encapuchonnée qui se dirige vers la grange.

Elle regarde de droite à gauche et finit par laisser tomber sa capuche, révélant une cascade de cheveux bleus, l'elfe semble énervé de ne pas trouver sa marchandise.

Finalement, les parents de Tehis finissent par sortir. Leur fils veut les suivre mais son père le retient.

— Laisse nous discuter, Tehis.

L'elfe ayant entendu du bruit se retourne vivement, révélant un visage fin et de longs cils, c'est un homme et il les regarde, l'air franchement agacé.

— Ce n'est pas ce que l'on avait convenu !

— Laissez nous nous expliquer, venez, nous avons préparé du thé, votre route a dû être longue...

— Je préfère rester dehors ! Où est la marchandise ?

— Nous sommes désolés, messire, mais elle n'arrivera que demain.

L'elfe se passe une main sur le visage, il semble sincèrement chagriné.

— C'est bien regrettable...

— Oui, c'est pourquoi nous vous proposons de passer la nuit chez nous.

— Je suis obligé de décliner votre offre, vous n'êtes pas dignes de confiance, j'irai intercepter la marchandise demain...

— Pardonnez nous, messire...

L'elfe, impatient, ne leur laisse pas le temps de continuer.

— Ne vous en faites pas, ce n'est pas votre faute, ce n'est pas ça qui est regrettable.

— Alors que se passe-t-il, messire ?

— Ce qui est regrettable, c'est que vous m'avez l'air d'être de bonnes personnes mais que je vais être contraint de vous tuer.

Et, sans que les marchands ne puissent bouger, l'elfe dégaine une épée de sous sa cape et leur tranche la gorge d'un seul mouvement. Puis, s'adressant à leurs cadavres :

— Voyez-vous, aucun de mes clients n'a jamais vu mon visage.

Tehis, toujours tapi derrière la porte, observe les corps de ses parents.

— Pff, ils auraient pu être plus prudents. C'est pathétique.

Puis, il sort de la maison tandis que l'elfe se retourne vers la forêt, empoigne un énorme cailloux, se glisse derrière lui et lui abat sur l'arrière du crâne. Il s'écroule, mort sur le coup.

Il contemple l'elfe avec folie. Le sentiment de puissance qu'il a ressenti est grisant. Tuer un de ces êtres légendaires... il l'a fait. Il crache sur son corps en ricanant. Plus personne ne le retient, il va pouvoir suivre sa voix. Il sait ce qu'il va faire maintenant. Il va les traquer. Tous. Démanteler pièces par pièces chacun de leurs clans les uns après les autres. Tuer ces créatures de mythes... ce sera lui qui les anéantira. Il les tuera tous par pur plaisir.

Soudain, il entend un piaillement étouffé. De sous la cape, un petit vautour noir comme la nuit s'approche de Tehis. Il le prend et le tient sur son bras. Il luit plaît.

Oui... et toi, tu vas m'aider.