Dans un grand hĂ´pital, le mĂ©decin-chef Vorlag les derniers rapports qu’il a reçus en provenance du front de l’Est. Outre les habituelles remontĂ©es de niveau de blessures et du type de blessures il remarque une information très inhabituelle : un ĂŞtre humain, apparemment accompagnĂ© par une elfe et par trois jeunes vouivres, aide Ă  la protection et au dĂ©placement des personnes blessĂ©es en direction des tentes de protections et de soins.

Cela est plutôt inhabituel car la majorité des êtres humains sont en général placés à l’arrière, dans les centres de stratégies et de production de poisons. Aucun d’entre eux n’est connu pour être soigneur ou même druide, et les quelques services de secours ayant des humains en leur sein sur les unités de déplacement (comme les brancardiers, par exemple). Ce qu’il étonne le plus est le fait de n’avoir aucun retour des soldats et des aventuriers ayant été transporté dans cet hôpital à propos de cet attelage quelque peu unique.

Alors qu’il arrivait à la fin du deuxième dossier, une infirmière entra dans le bureau et lui tendit une fiche rouge.

« Vorlag, voici le tout dernier rapport que l’on m’a chargĂ© de vous transmettre il y a Ă  peine 10 minutes de cela. Comme d’habitude, j’en ai parcouru les cinq premières pages et je peux vous dire quelque chose sur laquelle je m’avance peut-ĂŞtre beaucoup : au vu de ce qu’il y est dĂ©crit, nous avons peut-ĂŞtre enfin mis la main sur quelque chose pouvant rĂ©gler pour de bon les cas des comas dĂ©passĂ©s. Je retourne en direction de l’accueil, car une flopĂ©e de blessĂ©s nous est parvenue il y a peu, provenant visiblement des temples Bruns ».

Le Docteur la remercia chaleureusement puis, une fois qu’il sortit de la pièce, consulta le document qu’elle venait de lui donner.

En effet, au milieu de la troisième page, quelque chose Ă©tait notĂ© en gras et soulignĂ© : Aucun cas de coma, mĂŞme mineur, n’a Ă©tĂ© rĂ©pertoriĂ© depuis l’arrivĂ©e du mâle humain et de son Ă©trange Ă©quipage. Vorlag, en voyant cela, en fit tomber son stylo.

Cela ne pouvait signifier qu’une seule chose, une charge de travail bien moindre ainsi qu’une charge Ă©motionnelle pour le monde entier qui serait très fortement rĂ©duite. Cela contribuerait sans nul doute Ă  pouvoir apaiser le monde entier, car l’étrange augmentation des cas de coma en stade dĂ©passĂ© (extrĂŞmement profond) a provoquĂ© un effet saisissant dans l’entièretĂ© de la planète, quels que soient les races touchĂ©es : une augmentation significative de la tristesse et de l’inquiĂ©tude, cette dernière ayant apparemment poussĂ© certaines espèces Ă  une attitude belliqueuse ce qui a provoquĂ© en retour une multiplication des petits conflits Ă  travers la planète.

Après avoir fini de lire ce dernier rapport de la feuille rouge, il reporta son attention sur le tout dernier rapport sur lequel il n’avait pas pu encore porter ses yeux. Après une longue introduction mentionnant divers troubles assez étranges dans une population de fées et de lutins des cavernes quelque chose capta son attention, et ce très négativement.

En effet, il Ă©tait reportĂ© après ces cas un autre bien plus inquiĂ©tant : une sorte de mĂ©lange de crise de danse folle accompagnĂ©e de disparitions inexpliquĂ©es concomitantes Ă  ces dites crises.

Avant qu’il n’ait le temps de faire quoi que ce soit d’autre, il entendit son bipper sonner. Se levant de son bureau, il sortit de ce dernier et se prĂ©cipita en direction du laboratoire principal. Une fois arrivĂ© sur place, il peut y voir quelque chose d’assez surprenant : des bouts apparents de Golem des mers ainsi que trois sortes de tentacules provenant d’un poisson mystĂ©rieux, le Gloralm.

Les trois personnes prĂ©sentes sur place avant lui expliquèrent la situation ainsi que d’oĂą venait la quasi-intĂ©gralitĂ© des Ă©chantillons Ă  analyser : du groupe dit « des bourlingueurs de l’extrĂŞme » ayant dĂ©barquĂ© du navire d’exploration le Jasimar sur le port de la Nuld de l’est une semaine auparavant.

Le Docteur ainsi que les autres personnes présentes commencèrent rapidement toute une batterie d’analyse afin de déterminer les caractéristiques des Golem marins, ces derniers restant un grand mystère de la science et de la magie. L’autre but non avoué de ces analyses est de recueillir toutes les traces magiques comme énergétiques laissées par le groupe susmentionné pour pouvoir réaliser un suivi médical sur le long terme et sur de longues distances.

Il est question ici de parvenir à créer quelque chose qui n’existait pas vraiment jusqu’alors dans ce monde, un dossier médical personnel. Cette idée, quoiqu’ayant germé il y a quelques décennies de cela, a été remise très fortement au goût du jour depuis l’arrivée de l’anormal humain dans ce monde. Depuis que ce projet a été remis sur le devant de la scène, dans la plupart des hôpitaux et centres de soins du monde, un apaisement a été repéré parmi les équipes de soins et parmi les patients. En effet, ce suivi commençant à se mettre en place a pu permettre de mieux traiter certaines maladies magiques, ce qui a non seulement considérablement réduit la charge de travail et de stress des équipes soignantes mais aussi le stress des patients, pouvant dorénavant apparemment mieux assurer un suivi autonome de leurs affections et blessures.

Au bout d’une petite heure d’analyse et de prise de note, Vorlag ainsi que ses comparses font une petite pause car la quantité de données récoltées en ce court laps de temps est colossale.

« Wow, cela faisait très longtemps que je n’ai pas connu ça, ça fait du bien de se sentir jeune Ă  nouveau ! » sourit le docteur sous le regard amusĂ© de ses comparses. Deux d’entre elles lui font remarquer qu’elles ne l’ont jamais vu impliquĂ© dans les affaires d’analyse ; il leur explique alors que, il y a une petite vingtaine d’annĂ©es, il a arrĂŞtĂ© ce domaine spĂ©cifique des analyses pour se concentrer sur le soin direct aux patients au vu de l’aggravation de la santĂ© globale dans le monde. Il prĂ©cise tout de suite après qu’il a fortement recommencĂ© cette activitĂ© annexe de soins peu de temps après « l’étrange arrivĂ©e » car la quantitĂ© de donnĂ©es disponibles Ă©tait soudainement accrue et de très bonne qualitĂ©.

Après cette pause bien méritée, le groupe se remit au travail afin d’analyser les tout derniers échantillons d’une roche basaltique de couleur violette, roche ayant apparemment, d’après l’un des rapports, des possibilités d’amélioration de la magie curative ainsi que certains élixirs de corrosion.

Cette double amĂ©lioration potentielle de deux choses n’ayant aucun lien l’une envers l’autre attire fortement l’attention du groupe, car ceci est quelque chose d’inĂ©dit ; en effet, de tout ce que Vorlag sait et a pu voir de par sa très longue expĂ©rience, les roches impliquant des effets doubles voire plus que cela n’agissent en gĂ©nĂ©rale que dans des cadres prĂ©dĂ©terminĂ©s et liĂ©s entre eux.

L’exemple le plus flagrant est celui de l’amĂ©thyste brune bordant certaines montagnes volcaniques : mise Ă  proximitĂ© de certains Ă©lixirs de soins et de magie curative antipoison, cette pierre en amplifie les effets ; mais, comme une sorte de contrepoint, le docteur a remarquĂ© un autre effet quelque peu Ă©tonnant. Une fois cette pierre mise Ă  proximitĂ© de certains venins d’araignĂ©e et d’un poison aĂ©rien, les effets de ces deux groupes sont amplifiĂ©s d’un facteur cinq.

Le groupe rédigea un document résumant leurs résultats à envoyer au quartier général et au haut conclave des soigneurs dans la capitale. Après cela ils se dispersèrent car la fin de la journée approchait.

Vorlag partit en direction du parc principal de la cité, afin de s’y poser quelques instants et profiter du coucher de soleil. Après s’être installé sur un des bancs offrant la meilleure revue pour observer la nuit tombée, il sortit de sa poche un petit livre de poèmes que lui avait donnés le jeune héros lorsqu’il l’avait rencontré pour la première fois.

« Ces divers poèmes sur l’enfance et sur la vie qui passe, quoique quelque peu dans une nostalgie triste, sont véritablement apaisants à la lecture », murmura-t-il en ouvrant l’ouvrage.

Après quelques minutes passĂ©es Ă  lumière, il se sentit s’assoupir. Avant mĂŞme qu’il ne le temps de chercher Ă  se coucher convenablement sur le banc, deux mains l’attrapèrent dĂ©licatement. La personne venant de le rattraper le posa doucement Ă  ses cĂ´tĂ©s et le cala avec tendresse contre elle en lui murmurant : « Repose-toi, tu en as beaucoup fait aujourd’hui, mon chĂ©ri ».