C’est ici, en ces terres hostiles que je l’ai rencontrée. Ces terres de tourbes, montagnes, rocs ces terres où les lions chassent les oiseaux nageurs, ces terres où le jour et la nuit ne sont plus qu’un mythe, où à chaque instant le ciel prend les couleurs vives d’une aurore. C’est ici, qu’on s’est croisés pour la première fois. J’inspire profondément et l’odeur âcre de la pluie et de la boue emplit mes narines, alors que le froid pétrifiant de l’eau remonte sur mes mollets.

Je me souviens encore des premiers pas que j’avais faits ici. La terre sans goût coincée entre les dents, la gueule pleine de flotte, j’avais bu à grandes gorgées l’eau douce des rivières rugissantes, et désormais, ne reste de tous ces goûts qu’un seul, celui de ses lèvres sur les miennes.

Oh, si je pouvais la revoir encore une fois, au moins une fois. Mais elle est probablement dans un autre monde, maintenant, loin du chant chuchotant des pies, loin de ces rocs saillants sur lesquels elle sautillait comme un cabri fou, loin de ces crètes montagneuses qu’elle admirait toujours.

Je me souviens d’elle, de chaque moment que j’ai pu partager avec elle, et tente de les savourer encore et encore. C’est le plus important, non ?

Alors j’enfonce ma botte dans la tourbe glaciale, frémis, et reprends ma marche comme je l’ai toujours fait.