Rat
(par Louloutre)(Thème : Situation imposĂ©e )
Contrainte : “Début du XXème siècle : un commissaire s’allie/conspire avec un savant fou.” En moins de 500 mots, décrire la situation sans réutiliser les mots de l’énoncé.
Dire que ce laboratoire était insalubre aurait été exagéré : tout y était ordonné et les tables de travail était propre. En revanche, tout le reste était, effectivement, poussiéreux. Et terriblement lugubre. Si la police avait à y pénétrer, ça aurait dû être pour arrêter le propriétaire des lieux.
Mais Ferfreux n’était pas là pour une arrestation. Il était seul. En costume, certes, mais rien de cette rencontre n’était officiel.
Le Docteur Voron n’avait plus de docteur que le diplôme exposé sur le mur de son laboratoire, relique du temps où ses confrères avaient encore pour lui du respect. Depuis, il fût radié, et toutes ses thèses, ses recherches, ses études, tout ce qu’il avait pu écrire fût détruit, mis à l’écart ou réapproprié par ceux qu’il n’appelait ses pairs que par complaisance.
Sans s’attendre spécialement à la venue du policier haut gradé, ne sembla pas plus étonné que ça de cette visite nocturne. Il en ricanait, même.
“Que me vaut l’honneur… que dis-je, le plaisir de cette visite privée, inspecteur ?”
Ferfreux fulminait. Il n’était pas là par plaisir. S’il n’avait pas mis de côté son sens du devoir, il aurait pu maîtriser, menotter et embarquer sans la moindre difficulté cet éclopé dans la minute.
“Je ne suis pas inspec…”
Le scientifique grimaça de plus belle fasse à cette démonstration d’agacement. Ferfreux se ressaisit, soupira et aboya de plus belle :
”Tss… Remplissez votre part du marché ! Deux de mes hommes ont rapporté une de vos productions au poste, aujourd’hui ! Rien de ce que vous fabriquez ne devait sortir de cette piaule !”
Le sourire de Voron s’atténua à peine, laissant plus de place à la jouissance sadique de celui qui sait qu’il a le pouvoir.
“Et vous leur avez dit qui est-ce qui a fabriqué cet échantillon ?”
Le policier ne répondit pas. Il baissa la tête, rageur.
“Votre silence en dit long…”
“Nous avons passé cet accord. Si vous n’êtes pas foutu de respecter votre parole, vous…”
“Vous risquez bien plus que moi si je me fais attraper. Vous devriez être bien placé pour savoir que ce sont ceux qui ont le moins à perdre qui sont le plus dangereux, depuis le temps.”
Ferfreux perdait patience. L’homme au corps chétif qui lui faisait face avait beau avoir eu la gueule brûlée par ses expériences, son cerveau était resté parfaitement fonctionnel. Mais l’homme qui a fait le service a toujours sur lui une arme redoutable : ses poings. Et comme on ne monte pas dans la hiérarchie sans jouer des coudes, les muscles aident à frayer son chemin.
“Vous avez intérêt à compléter votre formule et me livrer ce que je vous ai demandé. C’est pas parce que vous m’êtes utile vivant que je ne pourrai pas me débarrasser de vous quand vous deviendrez vraiment problématique… voire avant.”
Voron planta son regard dans le sien.
“Tu auras ce que tu voudras. Mais que je vive ou meurs, jamais tu ne seras à l’abri.”