L'Académie de Lu





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La curiosité est-elle un si vilain défaut ?

(par Louloutre)
(Thème : DĂ©fi d'Elinor)



Je m’ennuie… D’un ennui absolu et ineffable.

J’inviterais bien des amies, mais je ne suis juste pas d’humeur. Et en y réfléchissant, il n’y a pas vraiment de personne que je qualifierais d’amie. Au mieux des connaissances. Mes vraies amies vivent loin de moi et n’ont pas le temps de venir boire un thé. En tous cas, je n’ose pas les déranger.

Et puis, je n’aime pas inviter des gens, je n’aime pas organiser la venue des autres et prĂ©voir des activitĂ©s. Surtout que lĂ , quoi ? La seule activitĂ© qui va intĂ©resser un minimum les potentiels convives, c’est la visite de la demeure. Je n’aime pas Ă©taler “mes” richesses aux yeux des autres, c’est juste gĂŞnant. Et je n’ai pas explorĂ© tout le labyrinthe qu’est ce château. Je n’ai mĂŞme pas encore fait le tour complet de ma garde robe. Du peu que j’ai vu, elle est vraiment fournie. Je ne parle mĂŞme pas des bijoux.

On peut dire que mon Ă©poux a bien organisĂ© mon amĂ©nagement, après le mariage. Quoi de plus surprenant venant de l’homme le plus fortunĂ© de la rĂ©gion ?


Mais on ne devient pas l’homme le riche des environs en restant chez soit. Il est en voyage d’affaire. Il revient dans deux jours. C’est ce qu’il m’a dit dans sa dernière lettre, mais c’est déjà la troisième du genre qu’il m’envoie. Ça va faire deux semaines qu’il devrait être rentré, mais ses partenaires commerciaux le tiennent occupé.


J’ai fouillĂ© la bibliothèque, aucun livre ne me tente. J’en suis Ă  un point oĂą c’est quasiment la première fois que je n’ai rien Ă  faire pour tromper l’ennui. Le piano de la salle de bal n’est plus une option : j’en joue mal, et en pratiquer tous les jours pendant trois semaines m’a lĂ©gèrement dĂ©goĂ»tĂ©e. MĂŞme dessiner, qui est pourtant une activitĂ© que j’adore, m’est interdit ici. Je ne devrais pas insulter celui qui me nourrit, me loge, et partage ma couche, mais il est particulièrement Ă©triquĂ© d’esprit, des fois… Pour rester polie.

“Les mains d’une femme comme il faut ne doivent pas ĂŞtre salies par l’encre d’une plume, le noir du fusain, ou l’arc-en-ciel des peintures… et ne parlons pas de la guitare ! Laissez cela aux artistes. Laissez-les s’abĂ®mer les mains pour vous et votre plaisir.”

Il m’a dit cela le jour de notre rencontre, alors que je parlais de mes passions. Sur le coup, j’avais été trop choquée pour répondre. Il avait dit ça sur un ton qui ne laisse pas de place à la discussion. Son ton habituel quand il veut une chose. Dans ces cas-là, j’ai presque peur qu’il me frappe. Et comme il est du genre à donner beaucoup d’instructions et à punir sévèrement le moindre écart, je dois faire de mon mieux pour le satisfaire.

Comme j’aurais pu m’y attendre, il m’a donnĂ© une liste de consignes avant son dĂ©part. Je les ai lues, plusieurs fois, et certaines sont vraiment absurdes. J’ai les clefs de toutes les portes, je peux aller partout, sauf Ă  un endroit très prĂ©cis. Une espèce de pièce souterraine. Que veut-il que j’y fasse ? S’il avait pu, je parie qu’il m’aurait laissĂ©e attachĂ©e sur une chaise le temps de son voyage pour m’assurer que je ne fasses pas de “bĂŞtises”.


J’en ai marre.


Peut-ĂŞtre que ces règles m’ont Ă©tĂ© dictĂ©es avec de bonnes intentions, mais j’ai bien envie de me rebeller. Je respecte les consignes qu’on me donne, parce que j’ai Ă©tĂ© Ă©levĂ©e comme cela. J’obĂ©issais pour faire plaisir Ă  mes parents ; j’obĂ©issais pour trouver un mari digne de moi, qui estimerait me mĂ©riter. Maintenant j’obĂ©is Ă  un homme qui n’est mĂŞme pas lĂ , et je ne lui obĂ©is que parce que je lui ai jurĂ© obĂ©issance et fidĂ©litĂ© face Ă  une entitĂ© incertaine, parce qu’une rencontre hasardeuse lors d’une fĂŞte a provoquĂ© une sĂ©rie d’évènements qui a mis dans la tĂŞte de mes parents -surtout ma mère- qu’il fallait me pousser dans ses bras et me faire porter la robe blanche et le voile.

Même si j’ai accepté, parce qu’il aurait été absurde de refuser, je commence à regretter certains choix. D’ailleurs… je ne dois pas être la seule à avoir des regrets. Je suis la cinquième épouse de mon mari. Personne ne sait ce qu’il est arrivé à mes quatre prédécesseures. Il ne veut pas que j’en parle, ou alors, quand j’essaye de l’amener sur le sujet, il me dit qu’il m’en parlera plus tard.

Plus tard, plus tard… Toujours plus tard. Je me demande si ce n’est pas lui qui m’ennuie, au fond.

Et cette petite clĂ© qui me fait de l’œil… OĂą Ă©tait cette pièce dont il m’a interdit l’accès, dĂ©jĂ  ?


~ ~ ~ ~ ~


L’odeur est atroce. La lumière de ma bougie était faible, alors c’est l’odeur qui m’a frappée en premier en ouvrant la porte. On la sentait déjà quand la pièce était close, mais c’était de l’ordre du supportable. Puis mes yeux se sont habitué à l’obscurité. Et maintenant, je les vois. Je sais enfin ce qu’il est advenu des quatre premières épouses de mon mari. Elles étaient là, dans une salle où jamais le jour ne dispense de lumière. Le ventre ouvert, les morceaux de corps arrachés, pendues avec des cordes, suspendues à des crochets. Des bouts de viande en vagues formes humaines. Et le sang… tellement de sang…

Complètement sous le choc, je vomis, mes jambes me lâchent, je tombe à la renverse, je pleure, je hoquète. Tout mon corps me fait savoir qu’il refuse ce spectacle. L’urgence de la situation me saisie.

Fuir.

Par je ne sais quel miracle, la bougie ne s’est pas Ă©teinte dans ma chute. Je me prĂ©cipite vers la porte. J’ai le rĂ©flexe de vouloir la fermer Ă  tout prix. Mais la clef… la clef ! OĂą est la clef ?! Je regarde au sol : elle est tombĂ©e, elle aussi. J’ai dĂ» provoquer sa chute dans la mienne, d’une manière ou d’une autre. Je dois forcer la serrure avec mes mains tremblantes pour enfermer les immondices qu’elle scellait. Mais alors que je m’apprĂŞte Ă  remonter en hâte les marches, une silhouette armĂ©e me barre la route.

Non… non, non, non ! Non !

Il… il ne devrait pas ĂŞtre lĂ  ! Il devait rentrer dans deux jours !


Je pleure, je supplie, j’implore son pardon mais je sais dĂ©jĂ  qu’il est trop tard. Il attendait ce moment. Il l’avait prĂ©parĂ©. Le coutelas Ă  la main indique il savait parfaitement oĂą me trouver et qu’il ne lui reste plus qu’à s’assurer que je garderais le secret. Il me prend par les cheveux et me force Ă  retourner dans la petite salle sombre, puisque “j’avais un si grand dĂ©sir de savoir ce qu’il y avait derrière ; il me fait l’honneur d’y rester Ă  jamais”.

La lame pénètre mon coeur sur mon ultime cri de détresse.














Malkym

Ah... rien de tel qu'un bon petit conte pour enfants ^^


Le 15/04/2021 à 20:28:00



Elinor

copine psychopathe ! Très sympa, cette version, très intéressante. J'aime particulièrement la fin^^


Le 17/04/2021 à 20:22:00

















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