Ils Ă©taient tous les deux dans la chambre. Assis sur le rebord du lit, un verre d’eau entre les mains, ils n’osaient rien se dire. Ils sentaient tout les deux le trouble de l’autre, aussi ce n’était pas si gĂŞnant de ne rien se dire. C’était mĂŞme plus rassurant, d’une certaine façon. Elle avait le regard fuyant malgrĂ© tout... Elle baissait souvent la tĂŞte. Ça faisait partie de son charme, mais il voulait qu’elle le regarde, au moins une fois. Il voulait la regarder le regarder. Il avait allumĂ© son ordinateur pour mettre de la musique. Rouge d’apprĂ©hension et tremblant d’hĂ©sitation, il lança un morceau. Un air de piano choisi presque au hasard, dans sa hâte de vouloir lui plaire. Il savait qu’elle aimait le piano. Mais il ne put s’empĂŞcher de jeter vers elle un regard lĂ©gèrement anxieux. Aimait-elle ? Elle sourit dès les premières notes. Elle rit, mĂŞme. Un rire sans bruit mais qui dĂ©gageait une douce mĂ©lodie. Oh ! Mon dieu, qu’il aimait le simple fait d’entendre sa respiration...

Leurs regards se croisèrent. Elle pensa qu’il avait vraiment de beaux yeux. Il se perdait dans la contemplation des siens qu’il pouvait voir de si bien et de si près pour la première fois. Elle aima comme ils étaient à la fois sombres et chaleureux, avec leur petit éclat malicieux qui débordait de sincérité tandis qu’ils la dévoraient. Il découvrit des nuances de vert dans son iris aux couleurs indéfinissables. Sans y faire attention, sans préméditation, leurs visages se rapprochèrent.Puis leurs lèvres se touchèrent. Délicatement, elles prirent le temps de se découvrir.

Les vers des poètes les plus raffinĂ©s n’auraient jamais pu dĂ©crire combien l’instant Ă©tait merveilleux. Les plus grands compositeurs n’auraient jamais pu Ă©crire de mĂ©lodie assez puissante pour exprimer l’émotion qui les submergeait. Ils ressentaient tout le prĂ©sent qui s’offrait Ă  eux, goĂ»taient l’instant. Ah ! Ils auraient tout donnĂ© pour arrĂŞter le temps et rester Ă  jamais figĂ©s dans ce moment ! Ils n’y avait qu’eux, le monde autour d’eux ne comptait plus. Il n’y avait plus que leurs cĹ“urs qui battaient Ă  tout rompre et se sentaient enfin complets et en paix.

Quand le baiser s’arrĂŞta, ils s’échangèrent un ultime regard. Le dĂ©sir qu’ils Ă©prouvaient sautait aux yeux. Dans ce regard, ils s’échangèrent tacitement une promesse : ils s’aimeraient et traverseraient ensemble des hauts et des bas. Ils resteront ensemble tout le temps qu’ils pourront, jusqu’à l’usure, et feront leur maximum pour que cela dure. Ils prendront le temps de s’aimer, et aimeront le temps passĂ© ensemble.

Ils scellèrent leur promesse en éteignant la lumière, et en s’abandonnant dans les bras l’un de l’autre pour la nuit.