L'Académie de Lu





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Mélimélo de caméos

(par Schrödinger)
(Thème : DĂ©fi d'Elinor)



L'immense château, perdu au milieu de la forêt, était apparu à mes yeux comme par magie au détour d'un bosquet. Je levai des yeux fatigués sur les hautes tours, peinant à trouver en moi une étincelle de joie à l'idée de trouver enfin un abri, ne serait-ce que pour une nuit. En pure perte. Je doutais d'y trouver bon accueil, de toute façon, mais je me devais de tenter ma chance. Serrant ma pélerine contre moi, je me hâtai de rejoindre les grandes portes, trempé comme une soupe. Il pleuvait à verse depuis la mi-journée — juste ce qu'il me fallait après avoir échappé à une foule vindicative déterminée à me lyncher avant la fin de la journée. Fort heureusement, la porte était suffisamment grande pour que je n'eus pas à me plier en deux pour pouvoir passer sous le porche, mais je sentis tout de même mes cornes gratter contre le verre. Je grimaçai: saleté de malédiction… Tant pis, si j'avais abîmé la structure, je trouverais bien moyen de payer compensation.

De ma grosse patte griffue, je saisis le plus délicatement possible le heurtoir et toquait doucement — enfin, je l'espérai. Peine perdue: j'entendis distinctement les portes craquer sous la pression de ma force monstrueuse qui ne m'attirait que des ennuis, quand bien même je n'avais pas le tempérament pour m'en servir contre d'autres êtres vivants. Restait à espérer que les occupants de ce manoir allaient réussir à le comprendre, et aller au-delà des apparences… Je fus tiré de mes pensées en entendant des pas légers se rapprocher des huis clos. Je reculai d'un pas lorsque la porte s'ouvrit pour ne pas paraître trop intimidant, et eus la surprise de voir apparaître non pas un domestique en queue-de-pie, mais une jeune femme en tenue étrange. Et lorsqu'elle leva les yeux vers mon visage, j'eus la surprise de ne pas voir la moindre trace de peur dans son expression, juste un intérêt intrigué, accentuée par un sourcil haussé alors qu'elle me dévisageait.

— Hm! Alors ça c'est original. Je m'attendais pas Ă  de la visite aujourd'hui, surtout pas celle de… vous, quoi. Mais bon, si vous ĂŞtes lĂ  c'est qu'il y a une bonne raison!

Avant même que je ne puisse lui demander asile, elle s'effaça pour me laisser entrer, me laissant figé de stupeur. Cet endroit et cet accueil étaient…étranges, pour ne pas dire suspects. J'avais trop été habitué à me faire traiter de monstre pour croire un instant que l'attitude de cette femme était normale.

— Bon, vous entrez, oui ou non? Vous n'allez pas rester dehors par un temps pareil, tout de mĂŞme?

Je sursautai et, trop poli pour refuser maintenant, j'entrai en marmonnant de vagues excuses. Elle referma la porte derrière moi et je me sentis envahi d'une bienfaisante chaleur. Malgré ma fourrure, la plus diluvienne m'avait frigorifié. Le hall d'entrée était propre, chaleureux… et présentement en train d'être nettoyé par des balais et autres plumeaux sans qu'aucune personne ne les manie. La voix de mon hôtesse me ramena à elle:

— Vous pouvez laisser vos habits trempĂ©s ici, me dit-elle en me dĂ©signant un porte-manteau qui n'Ă©tait pas lĂ  un instant plus tĂ´t.

Une fois que j'eus obtempéré, la patère galopa dans une autre pièce alors que la jeune femme m'entraînait à sa suite vers le grand escalier, passant entre une haie d'honneur de sept armures complètes, chacune juchée sur un piédestal coloré.

— On va vous trouvez une chambre pour votre sĂ©jour, peu importe combien de temps il durera. Vous en faites pas, tout le monde est le bienvenu ici.

Ma méfiance s'accrut quelque peu, mais peut-être était-ce la fatigue. Pour cacher mon trouble, j'observai les décorations qui parsemaient les pièces du manoir. Décorations aussi diverses qu'étranges, je ne pus m'empêcher de constater: sur le pallier de l'escalier était d'abord posé une flûte ouvragée, sur un piédestal de marbre blanc décoré de ce qui semblaient être des rats. À l'étage, la statue d'un loup noir, enchaîné par un filin doré, côtoyait trois petites maisonnettes — une de paille, une de bois et une de briques — à l'abri dans des cubes de verre protecteurs, alors que sur le mur d'en face était encadrée une petite cape rouge déchirée par endroits, entourée par un gros œuf doré à droite et d'un soulier transparent, fait de verre ou de cristal, à gauche.

Nous passâmes devant plusieurs chambres, mais mon hôtesse ne s'arrêta pas. Par la porte entrouverte de l'une d'elle, je vis une sorte d'autel livresque, à la gloire d'une entité inconnue — Ewilquelque chose. Mon guide le vit et me prévint de ne JAMAIS entrer à l'intérieur. Plus loin dans le couloir, une porte s'ouvrit brutalement et une tête reptilienne au bout d'un long cou en jaillit. Sans trembler, la jeune femme lui fit réintégrer sa chambre d'une petite tape sèche après lui avoir promis que non, la Tour Montparnasse n'avait pas explosé — quoi que cela puisse être. Nous passâmes encore devant quelques autres portes tout aussi étranges — une faite de biscuits qu'il ne fallait manger sous aucun prétexte, une condamnée par une invasion de ronces et dont s'élevait des ronflements sonores — avant qu'elle me laisse enfin pénétrer dans une chambre libre.

Rendu encore plus méfiant par cette visite éprouvante, j'entrai avec hésitation dans la pièce, me pliant en deux pour pouvoir passer la porte. Un tapis richement décoré se jeta sous mes pattes alors que je pénétrai dans la pièce. La chambre était peu meublée: un lit recouvert d'une montagne de couvertures, une commode, une vasque surmontée d'un énorme miroir dans un coin et un petit bureau dans un autre. Je me retournai vers la jeune femme, légèrement déstabilisé, et elle me sourit.

— VoilĂ ! Vous pouvez rester ici autant qu'il vous plaira. Le dĂ©jeuner est servi Ă  8h, le dĂ®ner Ă  13h et le souper Ă  21h. Vous pouvez vous balader partout, mais l'aile est est RIGOUREUSEMENT INTERDITE d'entrĂ©e, d'accord?

Sur ces dernière paroles qui ressemblaient fortement à des menaces, malgré le ton léger employé, la porte se referme toute seule sur moi et je me retrouvai seul, un peu décontenancé. Très fatigué cependant, je décidai que tous ces mystères pouvaient attendre le lendemain. Je fis une toilette sommaire dans la vasque. En relevant la tête, mon regard croisa celui de mon reflet, mais je crus voir un autre visage, hurlant, semblable à un masque, se dessiner un bref instant dans le miroir. Mettant cette vision sur le compte de la fatigue, je choisis de me coucher sans plus attendre. Mais malgré ma fatigue et la douceur de ce lit, je ne pus m'endormir; quelque chose me gênait. Poussant un grognement agacé, je résolus de me lever et de chercher dans les couverture ce que je sentais dans mon dos; sur le matelas, sous l'enfilade de couverture, je découvris un pois en émeraude, que je posais sur la commode sans plus me poser de questions. Un instant plus tard, je me rallongeai sur le matelas débarrassé de son trop-plein de couettes et m'endormis rapidement.

Je me réveillai tard le lendemain, ayant récupéré mes forces, du moins en partie. Trop tard pour le déjeuner, j'entrepris plutôt de réfléchir à la journée d'hier. Ce château était louche, ça j'en était désormais persuadé. Cependant….cependant, il était également magique à n'en point douter, vu tout le mobilier vivant. Avec un peu de chance, il y avait ici la clé pour me débarrasser de cette malédiction… Je résolus de rester quelques jours ici, pour vérifier cette théorie. Pour commencer, je décidai de noter ce que j'avais remarqué déjà — et, quelle chance, j'avaisjustement ce qu'il me fallait pour ça: un carnet et une plume étaient disposés sur le petit bureau. Lorsque je voulus prendre la plume, elle s'envola; peu étonné par ce nouveau prodige, je dictai, c'était plus sûr.

J'en eus pour le reste de la matinée, après quoi, la faim me tenaillant, je me rendis au repas. Sur la grande table de banquet, il y avait 10 couverts: un pour la jeune femme, un pour moi, un pour un chevalier qui — de ce que j'avais compris — avait été banni pour avoir tenté de renverser son suzerain, et huit pour autant de personnes de petite taille. Sept semblaient de la même famille, vu leur ressemblance. Le dernier, qui était également mon voisin de table, fut le seul à s'intéresser à moi. Nous discutâmes en engloutissant les trois cochons grassouillets accompagnés d'une biche et de pommes, et notre conversation se poursuivit en privé durant une partie de l'après-midi. Il était là depuis plus longtemps que moi, et se proposait de m'aider à trouver ce que je cherchai, à condition que je l'aide en retour à percer le mystère de l'aile est. Ayant déjà été trompé une fois, il me fit jurer par magie de me pas rompre le contrat, puis nous nous séparâmes après avoir convenu de nous retrouver de nuit devant la porte de l'aile est.

Au souper, je ne vis pas mon nouveau complice, mais ne m'en inquiétais pas outre mesure, et tentai plutôt d'éviter d'attirer l'attention de la maîtresse de maison alors que nous faisions un sort à une famille de canards accompagnés d'un cygne bien gras et d'une chèvre toute blanche. Après le repas, je fis mine de retourner me coucher, attendis l'heure convenue, et me rendis à la porte de l'aile ouest, où je patientai nerveusement en attendant mon complice. J'attendis longtemps, trop longtemps. J'étais de moins en moins tranquille, craignant de me faire surprendre. Le nain m'attendait peut-être déjà à l'intérieur? Prudemment, je poussai la porte, qui s'ouvrit sans résistance. Poussé par la curiosité, j'entrai. Pas de trace du nain, mais je ne pouvais plus faire demi-tour. Plus maintenant.

J'entrai sur la pointe des pattes dans l'aile sombre. Voyant parfaitement dans le noir, je suivis le corridor jusqu'à déboucher sur une vaste pièce, encombrée d'objets. Mais cette fois, ce n'était plus de la décoration.

— Eh bien, Ă  peine un jour parmi nous et vous ĂŞtes dĂ©jĂ  lĂ ? C'est un record!

Sursautant sous la voix claironnante, je me retournai d'un bon, le cœur au bord des lèvres. Devant moi, bloquant la sortie, se trouvait la maîtresse des lieux, un candélabre à la main et un sourire aux lèvres. Elle ne semblait pas furieuse de mon intrusion, juste amusée.

— Faites pas cette tĂŞte-lĂ ! Puisque vous ĂŞtes lĂ , autant vous faire visiter!

Elle claqua des doigts, et les torches aux murs s'allumèrent brusquement, éclairant la pièce.

— C'est la salle de collection de la petite. Pour son entraĂ®nement, vous voyez?

Elle passa devant moi et commença à me désigner certains objets.

— Voyons voir, qu'est-ce qu'on a…

La pièce était un véritable musée des horreurs: elle commença par me parler de la quantité d'animaux empaillés aux quatre coins de la pièce: une tête de cerf trônait au-dessus de deux loups — des raretés, me dit-elle, le gros ne se nourrit que de grand-mères et d'enfants, le petit aspire tout ou presque —, une loutre — en fait, c'est un sorcier, mais il s'est fait avoir par une boulangère, le nul —, un renne —mort comme un con à cause de son propriétaire, n'oubliez pas que les rennes ne volent pas sauf s'ils ont le nez rouge—, et quantité d'autres bestioles. Près d'un trio d'ours habillés comme des humains — un couple et leur fils —, sous un papillon aux ailes cuivrées, accroché au mur par une épingle, se trouvait un guéridon, sur lequel était posé une boîte fermée et un très petit bonhomme réduit, enfermé sous une cloche en verre. Lorsque, en état de choc, je demandais ce qui était dans cette boîte, elle me répondit qu'il s'agissait d'un chat.

— Un chat… vivant?

— Oui! Enfin, non. Mais oui. C'est compliquĂ©, en fait.

Je décidai sagement de ne plus poser de questions. Je n'ouvris pas la bouche en voyant deux ailes qui bougeaient encore, accrochées à un cadre — Cette fois, elle n'a pas pu venir les récupérer —, pas plus qu'en voyant un cygne avec un bras humain — Accident de magie, ça arrive — ou une sirène momifiée enfermée dans un bocal — Sale histoire, mieux vaut ne pas remuer trop les souvenirs. Outre ces restes, il y avait également plusieurs objets, parfois mystérieux, comme cette croix faite de longues lattes métalliques — Pales d'hélicoptère, mais ça ne vous dira rien —, ou ces paires de bottes qui ne payaient pas de mine, mais brillaient de magie.

Enfin, elle s'arrêta devant une grande vitrine au cadre richement décoré, mis en valeur par les torches qui l'encadraient. À l'intérieur, pourtant, il n'y avait qu'un biscuit, énorme, appétissant, mais un simple biscuit, préservé pour l'éternité dans un écrin de velours.

— Et voici la pièce maĂ®tresse. C'est par elle que tout a commencé…

Je restai silencieux en l'admirant, avant de poser la question importante, d'une voix calme, plus calme que je ne l'aurais cru:

— Et maintenant, que va-t-il m'arriver? Je vais finir dans cette pièce, c'est ça? Avec tout le reste…

Avant qu'elle ne puisse me répondre, un souffle d'air glacé balaya les torches, ne laissant que le candélabre de la jeune femme pour toute lumière. Nous nous retournâmes de concert, pour nous retrouver face à face avec deux êtres. La plus grande des deux silhouettes portait une robe à capuche qui dissimulait ses traits, et tenait une grande faux. Quand elle redressa la tête, je vis qu'il ne s'agissait plus que d'un squelette. L'autre, plus petite, était encore vivante, mais portait un masque en crâne sur son visage pour achever la ressemblance avec la grande. Elle aussi portait une faux et une cape, mais la sienne était violette, et tachée de sang frais. Les deux silhouettes se tournèrent vers la jeune femme, qui haussa les épaules avec nonchalance.

— Quoi? C'est pas de ma faute si vous l'avez paumĂ© et que vous avez mis autant de temps Ă  penser Ă  venir le chercher ici, non?

La plus grande silhouette eut une pause, puis me désigna d'un signe de tête à l'adresse de son apprentie, qui prépara sa faux. Elle s'approcha et je ne tentai pas de m'enfuir. C'était inutile. Je l'avais déjà compris.

C'était la fin de mon histoire.














Elinor

j'adore ton histoire puisqu'elle parle de gens morts et empayés. Tous les cameos sont très sympa et plutôt bien amené. Par contre j'ai pas trouvé le conte original. Mais voilà c'est bien écrit et bien sympa (tu m'as fait sourire)


Le 18/04/2021 à 14:12:00



Copeland

Sympa ton texte @Schrödinger , surtout avec toutes les différentes références aux autres membres d'ailleurs je pense pas avoir réussi à tous les trouver


Le 18/04/2021 à 14:21:00



Faucheuse

Très sympa le texte


Le 18/04/2021 à 14:21:00



Eskiss

bien sympa ton texte, jouer à reconnaître tous les caméos était plaisant (j'avoue j'ai triché j'ai lu les spoilers) !


Le 18/04/2021 à 15:31:00

















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