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FaucheuseElinor![]() Spectacles![]() L'histoire des Faucheuses
![]() ![]() Histoire éternelle : Commencement(par Faucheuse et Elinor)J'ai toujours été curieuse. Passionnée de lecture, j'adore depuis toute petite découvrir de nouvelles histoires, de nouvelles personnes, de nouveaux endroits. C'est d'ailleurs pour cela que je me suis toujours sentie à l'étroit dans mon petit village. Je rêve de nouveaux horizons, mais je ne l'ai jamais quitté. Et j'ai toujours été à l'écart. La fille d'un inventeur qui lit, ce n'est pas chose courante par ici. Au mieux, je suis un peu spéciale, au pire, complètement folle. Mais aujourd'hui, rien n'est plus pareil. Mon père est tombé gravement malade, et je dois trouver un moyen de le soigner. Seulement, il n'y a aucun médecin dans le village, et la ville la plus proche est au moins à une dizaine de lieues de chez moi. Je vais devoir faire la route seule. Je pourrais bien demander de l'aide à quelqu'un, mais je n'ai aucune confiance en eux. Alors je pars seule. Je mets mon père dans notre carriole, j'ai peur de ne pas revenir à temps si je le laisse au village. Et nous commençons notre voyage. J'ai naïvement pensé que nous atteindrions la ville sans encombre. Mais rien ne se passe jamais bien. Lorsque nous quittons le village, le ciel est bleu, pur et le soleil brille. Mais tout se complique à notre entrée dans la forêt. Les nuages obscurcissement le ciel limpide, l'air s'alourdit et soudain... Un premier éclair zèbre le ciel, suivi d'un coup de tonnerre. Et la pluie surgit. Une pluie forte, drue, désagréable, mouillante. Je dois trouver un refuge. Ou mon père ne survivra pas. Son état ne peut qu'empirer s'il attrape une hypothermie. Je lance notre cheval au galop. Je dois me hâter. Mes cheveux fouettent mon visage, je suis détrempée, mais je n'en ai que faire. Je dois trouver un refuge. Et soudain, au détour d'un chemin, je distingue des lumières, derrière des arbres. L'espoir rejaillit en moi. Nous sommes sauvés. Mais au même moment, des hurlements de loup se font entendre. Ils se rapprochent. Je demande un dernier effort à l'animal épuisé. Fidèle, comme toujours, il obéit. La demeure ! Elle est en face de moi ! Enfin ! Nous allons pouvoir nous y reposer. J'espère simplement que son propriétaire sera assez humain pour nous abriter. Je dépasse le portail en trombe, je traverse un immense jardin garni de roses, et je ne m'arrête qu'au pied des escaliers. Je laisse mon fidèle destrier, la priorité est mon père. Je le sors de la charrette, et l'aide à monter les escaliers. Il est tellement faible, j'ai tellement peur pour lui. Lorsque je franchis les grandes portes de bois, je découvre une somptueuse entrée, amenant à un grand et majestueux escalier. L'atmosphère est chaude, chaleureuse.J'appelle plusieurs fois un possible propriétaire, mais je n'obtiens aucune réponse. Alors, je passe dans un couloir à ma droite, qui débouche sur une magnifique salle à manger. Un grand feu crépite dans la cheminée. La table est dressée, des mets grandioses la couvrent. J'installe mon père, et je commence à lui donner à manger. Il est très faible, il ne tient presque pas sur la chaise, il goûte à peine, mais il est vivant. Je m'apprête à commencer à manger, quand.. L'atmosphère se refroidit brusquement. Le feu diminue brusquement. Et une aura se répand dans la pièce. Comme une aura de... mort. Je hurle. Devant moi se dresse une silhouette, complètement couverte par une cape noire. Je ne peux pas distinguer son visage. Et elle tient dans l'une de ses mains squelettiques une grande faux. Un lien se fait dans mon esprit entre cette silhouette, et de nombreuses illustrations que j'ai vu dans des livres. Mais... ce n'est pas possible... C'est même invraisemblable... Et pourtant, cela ne peut être... que la Faucheuse.
Cela fait des années que je vis dans cette demeure isolée. La forêt inquiétante pousse tous les voyageurs à emprunter la route directe qui sépare les deux localités. Et pour les plus téméraires, j’ai veillé à ce qu’une meute de loups s’installe en périphérie de mon domaine… Personne n’a jamais osé s’aventurer jusqu’ici. Quelle n’est donc pas ma surprise lorsque j’entends la porte du manoir se refermer dans un claquement sourd, mais qui se répercute en écho jusqu’à moi. Un visiteur impromptu ? Soit, il ne restera pas longtemps vivant. J’ai bien trop de travail pour permettre que l’on me dérange. Je suis debout en un éclair et ma faux apparaît dans ma main. En quelques secondes, je suis au bas de l’escalier. Un instant plus tard, je suis dans l’encadrure de la porte. Et je les vois… Une jeune fille et un homme d’âge mûr… Il semble malade. Il n’est pas encore sur la liste mais… c’est quelque chose qui peut s’arranger aisément. D’une pensée, je révèle ma présence. Le feu qui une seconde plus tôt crépitait dans la cheminée s’éteint aussitôt. Et elle se tourne vers moi. Cette jeune fille a l’air terrifiée. Suis-je si hideux ? Peu importe… L’homme a osé voler mes biens… ma nourriture. Il sera châtié. Quant à elle… Aura-t-elle la bonne idée de s’enfuir pendant que j’abattrais ma faux sur son acolyte ? Je m’avance vers eux, sans un mot, brandissant haut mon arme qui brille d’un éclat surnaturel. Un éclair illumine un instant la pièce… Elle a forcément vu mon visage. Elle doit nécessairement savoir qui je suis désormais. Mes yeux flamboient d’une colère sans doute exagérée. Mais si je le laisse impuni, que se passerait-il ?
J'ai terriblement peur. Je ne sais pas comment c'est possible, mais c'est rĂ©ellement la Faucheuse qui se tient devant moi. Je ne sais pas ce qu'elle veut, mais pas des choses agrĂ©ables, j'en suis persuadĂ©e. Un rayon de lune perce les nuages, et l'Ă©claire. Son visage... Son visage est tout simplement atroce. Squelettique, creux, blanc, livide mĂŞme. Et ses yeux... dĂ©voilent clairement son envie de meurtre. Et son regard... est tournĂ© vers mon père ! C'est lui qu'il veut tuer ! Je ne peux pas laisser faire ça ! Alors qu'il s'apprĂŞte Ă abattre sa faux, je me jette devant lui, et je crie : — NOOON ! — Fillette, que fais tu ? Cet homme est un voleur, il doit payer. Si tu avais un minimum de bon sens, tu t'en irais en courant, priant pour que je ne te rattrape pas. — Je... Je vous en prie, je vous en supplie. C'est mon père, c'est la seule famille que j'ai jamais eu et que j'aurais jamais. Épargnez le, il n'a rien fait de mal. Nous... nous voulions juste Ă©chapper Ă la tempĂŞte et aux loups. S'il vous plaĂ®t, ne lui faites pas de mal... MalgrĂ© toute ma peur, j'use de ma voix la plus convaincante pour le persuader. — Et pourquoi le ferai-je ? Une vie pour une vie, tu connais ? Si j'Ă©pargne ton père,je devrais en prendre une autre. Laquelle m'offres-tu? La tienne ? — Si... Si vous l'Ă©pargnez, je vous jure, sur ma vie, que je vous servirai et vous laisserai faire ce que bon vous semble de moi. Mais je vous en supplie du plus profond de mon cĹ“ur, laissez le en paix !
J’hésite un instant. Ma main se resserre nerveusement sur le manche en chêne de mon arme. Il y a une lueur dans son regard apeuré. Elle semble sincère. Cela fait des siècles que ces lieux ne sont entretenus que par de vulgaires objets enchantés qui font un travail aussi inutile que méthodique. Les repas sont préparés, servis, puis retirés, sans que personne ne les goûte. Cela fait bien longtemps que j’ai été condamné à servir la mort. Si longtemps que je ne me souviens qu’à peine les traits de la sorcière qui m’a condamné à ce tourment. L’horloge sonne le premier de dix coups. Il est tard. Même si elle tentait de s’enfuir, cette enfant n’irait pas loin seulement éclairée de la lumière lunaire. Mon regard passe lentement du père à sa progéniture, puis à nouveau vers l’homme. Elle veut me servir… Soit… Mais cela ne se fera pas de la manière dont elle le pense. Dans ma main apparaît un parchemin que je tends vers la jeune fille. Un contrat qui repousse de plus d’une décennie la mort de son père… Mais en échange, elle s’engagera à rester dans cette demeure jusqu’à ce que j’en décide du contraire. Un rapide coup de faux parfaitement exécuté et je lui blesse le bout du doigt, lui permettant de signer de son sang. Elle a encore une chance d’éviter le sordide destin que je lui réserve. Mais elle ne le fera pas. J’en suis persuadé. J’ai fauché suffisamment de vies pour le savoir. Elle aime suffisamment cet homme pour se sacrifier pour lui.
Je suis rĂ©solue. Je ne renoncerai pas. Je sauverai mon père. Si au moins lui peut avoir une vie de bonheur, je suis prĂŞte Ă tout endurer. J'appose mon doigt sur le parchemin qu'il me tend. Une sensation Ă©trange me parcourt le corps, comme un frisson glacĂ©. Et mon père disparaĂ®t. Mais je sais, je sens qu'il est en sĂ©curitĂ©. Je n'ai plus peur. Le parchemin disparaĂ®t aussi vite qu'il est apparu. Sans un mot, mon nouveau maĂ®tre me tourne le dos, et il sort de la pièce après un signe de main adressĂ© Ă ... un chandelier. Pourquoi Ă un chandelier ? Il est dĂ©finitivement vraiment bizarre. — Bonjour mademoiselle. Je me retourne, cherchant Ă savoir d'oĂą vient la voix et... c'est le chandelier qui parle ! Je tombe Ă la renverse, je ne peux pas y croire ! — N'ayez pas peur, gente demoiselle, je vais vous conduire Ă votre chambre. Sans un mot, n'osant pas poser la moindre question, je le suis dans le dĂ©dale que forment les corridors, et il me laisse devant une somptueuse porte. Je la franchis, et je dĂ©couvre une chambre digne d'une princesse. Un magnifique lit recouvert d'un pardessus brodĂ©, une armoire ouvragĂ©e, et d'autres meubles tout aussi magnifiques. Mais, Ă©crasĂ©e de fatigue, je m'Ă©croule sur le lit, sans mĂŞme enlever mes vĂŞtements. — La pauvre... Elle a dormi tout habillĂ©e... — Peut ĂŞtre que c'est elle... Celle que nous attendions... qu'IL attendait... — Chut... Elle se rĂ©veille. Ces Ă©tranges voix me font ouvrir les yeux et... ce sont l'armoire et le service Ă thĂ© qui discutent ensemble ! DĂ©cidĂ©ment, je ne serai jamais au bout de mes surprises. — Vite, vite demoiselle, il faut vous hâter, me dit l'armoire, le maĂ®tre vous attend en bas. Mais laissez moi juste... Une multitude de rubans m'entourent, et me revĂŞtent par je ne sais quelle magie d'une tunique simple, d'un pantalon et de chaussures confortables. Je ne comprends pas pourquoi l'armoire m'a habillĂ©e comme un homme, mais je n'ose pas lui demander, par peur d'ĂŞtre en retard. Je me prĂ©cipite en bas, et il m'attend.
La nuit a Ă©tĂ© longue… Terriblement longue… La peste s’abat sur le Nouveau Monde. Chaque jour apporte son lot d’âmes Ă faucher. Mais bientĂ´t… les choses pourraient ĂŞtre plus simples. Ma faux appuyĂ©e contre la cheminĂ©e, je regarde les serviteurs maudits prĂ©parer un petit-dĂ©jeuner dĂ©mesurĂ©. L’on aurait pu croire que des dizaines d’invitĂ©s vont arriver d’un instant Ă l’autre…. Mais ma seule invitĂ©e est lĂ . HabillĂ©e de vĂŞtements simples et confortables. La journĂ©e qui l’attend ne lui permet pas de coquetterie. Si elle dĂ©sire se vĂŞtir de ces inutiles vĂŞtements de pavanage, qu’elle le fasse en dehors du temps que je lui consacrerais. Je la laisse manger ce qu’elle dĂ©sire. Mange-t-elle seulement Ă sa faim habituellement ? Les vĂŞtements laissent penser une maigreur excessive pour une enfant de son âge. Je pense Ă ma propre corpulence et laisse Ă©chapper un rire sinistre qui dĂ©contenance un instant la jeune fille. Une fois son repas avalĂ©, je lui montre ma faux du bout de l’index. Elle ne met pas longtemps Ă comprendre que je veux qu’elle s’en saisisse, alors mĂŞme que les plats, dont nombre d’entre eux n’ont pas Ă©tĂ© touchĂ©s, quittent la pièce, mus d’une volontĂ© propre. J’accompagne ma nouvelle servante Ă l’extĂ©rieur. Elle peine Ă soulever la faux qui doit ĂŞtre aussi lourde qu’elle, et j’entends la lame Ă©rafler le sol Ă chaque pas. Des serviteurs affolĂ©s nous suivent, tentant d’effacer les traces de notre passage. Ils craignent mon courroux au-delĂ de toute chose. Curieux que des ĂŞtres qui sont auprès de moi depuis si longtemps soient davantage terrorisĂ©s qu’une jeune fille qui m’a rencontrĂ© la veille. Je fais volte-face pour me retourner face Ă elle. Elle fait peine Ă voir. Elle n’y arrivera pas. Un claquement de doigt et l’arme de chĂŞne et d’acier revĂŞt une taille plus adaptĂ©e Ă sa menue silhouette. — Aujourd’hui, tu vas apprendre Ă manier cette arme, jeune fille. Mais avant, dis-moi, as-tu compris ce que j’espère de toi ?
— Je le crois... Vous voulez que j'apprenne Ă ĂŞtre... comme vous, c'est cela ? — Exact. Lorsque tu as signĂ© ce pacte de ton sang, tu t'es engagĂ©e Ă devenir mon apprentie. Tu ne pourras pas le rompre. Il te lie Ă moi, pour l'Ă©ternitĂ©. ÉternitĂ©, ce mot me fait comprendre la portĂ©e de mon serment. Si je rĂ©ussis, je suppose que je resterais avec lui pour toujours et si j'Ă©choue... je ne prĂ©fère pas y penser. Je vais rĂ©ussir. Qui sait, peut-ĂŞtre qu'avec le temps... je m'habituerais Ă tout ça. J'attrape l'arme qu'il me tend. Etonnnemment, elle est très Ă©quilibrĂ©e, et je peux la manier sans problème. Je fais quelques mouvements avec elle, ils sont fluides. On dirait une extension de mon membre, comme si elle faisait partie de mon corps. Cette existence ne sera peut ĂŞtre pas si ennuyeuse que ça finalement. Je le regarde, pleine de dĂ©termination. Il veut me former, grand bien lui fasse, mais je ne me tuerai pas Ă la tâche si facilement. Mon ventre gronde, mais je rĂ©siste. Je ne m'abaisserai pas Ă lui demander quoi que ce soit. Et je lui demande : — Alors, par oĂą commençons nous ?
Cette jeune fille est perspicace. J’esquisse un sourire. Armée comme elle le mérite, elle prend une grâce angélique. Elle ferait une faucheuse exceptionnelle, j’en suis persuadé. Les jours s’écoulent, chacun lui apprenant une règle ou une astuce. Parfois, je lui octrois une infime partie de mes pouvoirs qu’elle peut user à loisir sur les animaux sauvages qui peuplent la forêt. Oiseaux, petits mammifères, elle apprend, patiemment. J’ai même l’impression qu’elle finit par prendre plaisir à ce qu’elle fait. Les soirs elle profite du luxe de ma propriété pendant que je fais le travail qui sera un jour le sien. Mon immense bibliothèque, pleine des livres amassés durant ma longue existence, semble la captiver. De vieux grimoires subtilisés à de vieux sorciers mourant, des ouvrages arrachés de force à une victime dont j’avais décidé d’écourter la vie. Elle en avait rapidement fait son repaire. Je me délecte de cet apprentissage. Et si j’avais osé l’avouer, j’éprouve une grande joie de ne plus ressentir la solitude de cette immense demeure. J’avais mes serviteurs, évidemment, mais, me craignant, ils m’évitaient autant que faire se peut. Pourtant, un soir, alors que je rentrais de bonne heure, je la trouvais dans son refuge, assise au sol, adossée contre le mur. Elle a l’air triste. Elle ne lit pas. Et étrangement, cela me chagrine. Mon cœur, si j’en avais encore possédé un, se serait serré dans ma poitrine.
Mon père me manque. Je m'inquiète pour lui. Je ne sais rien de lui depuis que j'ai commencĂ© mon apprentissage. Ce dernier me plaĂ®t, ce n'est pas le problème. Mon maĂ®tre est de plus en plus affectueux, il s'ouvre un peu plus chaque jour. Je crois qu'il commence Ă m'apprĂ©cier, et c'est rĂ©ciproque. Mais... j'aimerais tant revoir mon père. Alors, je prends mon courage Ă deux mains, et je vais le voir. — MaĂ®tre... — Qu'y a-t-il Apprentie ? — J'aimerais revoir mon père. Il me manque terriblement. Je ne sais mĂŞme pas s'il s'est remis de sa maladie. Je vous en prie, permettez moi de lui rendre visite. — Je suppose que je n'ai pas de raison de te retenir. Va, si tu en ressens le besoin. Je sens qu'il doute encore de moi, mais je veux lui montrer qu'il peut avoir confiance. Je lui fais le serment silencieux de revenir. Et je quitte la demeure, en sachant que je reviendrai. Je ne romps jamais mes promesses. De retour au village, je trouve une foule hostile sur la grande place. Je ne comprends pas ce qu'il se passe. Et je vois mon père. Au milieu de cette foule dĂ©chaĂ®nĂ©e. Qui hurle son nom. Et qui hurlent "A l'asile !". Je ne comprends pas. Pourquoi voudraient-ils envoyer mon père Ă l'asile ? Un des hauts-fonctionnaires du village prend la parole : — Vous avez affirmĂ© avoir vu la Faucheuse, cette crĂ©ature mythologique et imaginaire, dans un manoir d'apparence abandonnĂ©. Cela n'est Ă©videmment pas possible. Si vous ne dĂ©mentez pas votre histoire, nous serons obligĂ©s, Ă notre grand regret, de vous dĂ©clarer fou. — Je ne mens pas, je l'ai vue, et elle a gardĂ© ma fille ! — Très bien, vous ne nous laissez pas le choix... Je ne peux pas regarder cela sans rien faire. Je hurle. Mais cela ne sert Ă rien. Personne ne m'entend. Je me dĂ©bats, et j'arrive tant bien que mal Ă accĂ©der Ă mon père. Je me dresse entre lui et ses assaillants, mais ils ne reculent pas. Si seulement j'Ă©tais plus puissante... Il ne me reste qu'une solution. Je prends ma respiration, et je hurle Ă pleins poumons : — MAĂŽTRE, J'AI BESOIN DE VOTRE AIDE !!!
Lorsque la jeune fille quitte ma demeure, je sens une désagréable sensation. Par la fenêtre, je la regarde. Son cheval a été nourri un temps. Un temps… Mais il le rejoint comme s’il connaissait ses intentions. Ce n’est plus vraiment le même cheval… la mort l’a prise depuis plusieurs semaines déjà … Mais je lui ai refusé le repos éternel. Un petit cadeau offert à ma protégée en attendant qu’elle dispose de ses propres capacités de déplacement. Elle enfourche l’animal et je le vois fendre mon domaine à une vitesse dépassant l’entendement. Je me retourne vers la cheminée éteinte… un claquement de doigt et le feu prend vie. Ironique… La chaleur ne m’étreint pas. Elle m’épouvante. Mais certains sortilèges nécessitent un prix. Une âme apparaît dans ma main squelettique. Je l’ai sagement gardée, sachant que ce jour viendrait. Je la projette dans le feu, qui se teinte aussitôt de violet. Un vieux miroir poussiéreux apparaît alors au-dessus du foyer. Il ne reflète pas mon image. À la place, je peux voir ma protégée. Je la vois arriver jusqu’à son village… Je la vois en danger. Elle supplie une foule ignorante d’épargner son géniteur. Face à son échec, elle tourne ses yeux dans ma direction, comme si elle savait que je la surveillait. Et elle m’appelle à l’aide. Un sourire se dessine sur mon visage. Il est temps. Je claque des doigts et j’apparais au-dessus de la foule, flottant dans les airs. Un vent glacial accompagne ma venue, faisant battre ma cape dans une inquiétante symphonie de tissu accompagné de cris d’horreurs lorsque les yeux suivent le regard de la belle. Tous s’écartent à mesure que je descend à leur niveau et je touche enfin le sol. Hébétés ou tétanisés, ils ne réagissent pas lorsque la faux s’abat sur le premier d’entre eux. Je lui arrache un silence, tandis que sa gorge tranchée lui interdit tout cri. Le sang est aussitôt absorbée par la faux… qui frappe un deuxième, puis un troisième rustre. Les deux regardent la blessure de l’autre, horrifiés de voir les intestins de leur voisin se répandre sur le sol. Le soleil couchant teint le ciel d’un rouge écarlate alors que j’abats ma faux, encore et encore. Certains survivent miraculeusement aux coups que je donne… Cela ne signifie pas pour autant qu’ils seront épargnés. J’ai d’autres projets. Je regarde rapidement mes victimes sans leur accorder plus d’importance. Le sang des uns macule le visage des autres. Des entrailles semblent tracer des chemins entre les corps. Le haut-fonctionnaire est le dernier debout. Appuyé contre un mur, il me regarde d’un air mi-suppliant, mi-résigné. Mais je ne le tuerais pas. Ce n’est pas à moi de le faire. Je le saisis à la gorge et le traîne jusqu’à mon apprentie. Elle me regarde un très court instant. Elle sait ce que j’attends d’elle. Sa propre faux se matérialise dans sa main. C’est la première fois qu’elle parvient à la faire apparaître sans mon assistance. Je suis fier de sa progression. Elle lui plante son arme dans le cœur et lui arrache son âme par la même occasion. Encore une fois, je suis surpris de sa facilité à accomplir cette action pour sa toute première fois. Surpris, et fasciné. La regardant avec une satisfaction morbide, je la vois achever les rares rescapés. Et lorsqu’elle se retourne vers moi, elle a un sourire au visage. Pendant un court instant, la lueur lunaire semble dessiner les contours de son crâne à travers sa peau. Je tend ma main vers elle et elle s’approche de moi. Elle sait où est sa place. Un lieu où son père n’a pas droit de résidence. J’achèverai sa formation. Cela prendra des années, mais elle saura me remplacer et devenir à mes côtés, la grande voleuse. Elle me surpassera probablement. Son destin n’est pas encore tracé. Mais je nourris déjà de grands espoirs en elle. Ma cape s’enroule autour d’elle et nous disparaissons de cet endroit désormais sans vie, laissant seul son unique famille.
Je sais enfin où est ma place. Aujourd'hui marque le commencement d'une histoire. D'une histoire éternelle. De mon histoire. Cette histoire fait partie d'un tout plus grand !
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