L'Académie de Lu





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La Guerre ne fait que commencer

(par Faucheuse)
(Thème : MĂ©lilĂ©mots 2)



Je n’ai jamais Ă©tĂ© bronzĂ©. Le soleil a tendance Ă  plus carboniser ma peau, qu’à me la colorer. Ma situation actuelle n’allait certainement pas amĂ©liorer les choses. Plus envie de sortir. Plus envie de prendre le soleil. Comment en Ă©tais-je arrivĂ© lĂ  dĂ©jĂ  ? Je regarde autour de moi. Mon bureau ressemble plus Ă  une mer de papier qu’à un vrai espace de travail. Jamais envie de le ranger non plus.

Je jette un œil furtif à l’horloge murale. 15H49. Mon cerveau se met un instant en pause.

Non, je ne t’ai rien demandĂ© : on se calme lĂ -haut. 15H49… 949 minutes… 949… 13x73… OK, c’est bon, t’as fini lĂ  ? Elle ne va pas tarder Ă  rentrer. Et ça va ĂŞtre Ă  nouveau une bonne ambiance… Bonne ? J’aurais presque envie de rire si je n’étais pas au comble du dĂ©sespoir. Notre relation s’effrite… Comme du sable. J’ai passĂ© cette histoire Ă  nager Ă  contre-courant. J’aurais dĂ» abandonner plus tĂ´t. Bien plus tĂ´t.

Bon, que pourrais-je faire pour avoir un minimum de tranquilitĂ© ? Range le bureau… Oui, fais ça, ce sera parfait. Au moins, elle gueulera pas que c’est le bordel. Je prends la première feuille… avant de la reposer aussitĂ´t lĂ  oĂą je l’ai trouvĂ©. Je rĂ©flĂ©chis un instant. J’imagine des flèches qui commencent Ă  quitter chaque feuille pour m’indiquer oĂą mettre chacune d’elles. Ça me simplifierait la vie si ces flèches ne se mĂ©langeaient pas tous les trois centimètres.

Alors, cette feuille, c’est une facture. Celle-lĂ , la liste des personnages de mon projet… mais de quel projet ? Si tu terminais un projet avant d’en commencer un autre, tu avancerais peut-ĂŞtre plus vite… au lieu de vouloir calculer des choses sans importance. Et puis mince, je rangerai demain. Et demain, je me dirais la mĂŞme chose. N’avais-je pas dis que je n’avais jamais envie de le ranger.

Je me lève et quitte la pièce. Je vais sortir plutĂ´t. Ça repoussera d’autant l’affrontement. ClĂ©s… manteau… Mince, l’ordinateur, j’ai oubliĂ© de le mettre en veille. Il ne faudrait pas qu’elle aille fouiller dedans en arrivant. Je m’exĂ©cute immĂ©diatement avant de quitter la maison. Ma voiture n’attendait que moi. Et je pars… je roule… et je roule encore. OĂą aller ? Les falaises ? Non… Ce n’est pas comme si j’allais vouloir m’y jeter. Mon assurance vie ne serait pas versĂ©e en cas de suicide…

Je dépasse le panneau de sortie de ville et je peux enfin accélérer. Me vider la tête. Rouler… Simplement rouler… Je croise une voiture. 1677 EG 81. Bon sang, pourquoi j’ai regardé cette plaque… 1677… 3x559… 3x13x43…

Inconsciemment, je finis devant l’usine oĂą je travaille. Pourquoi suis-je venu ici ? Bon, tant qu’à ĂŞtre lĂ . Autant avancer le travail du lundi. On est samedi, je croiserai personne au moins. Une heure s’est Ă©coulĂ©e lorsque je termine de remettre ma machine en route. Il est temps d’affronter le dragon.

Je reprends donc ma voiture… Et je roule à nouveau dans le sens inverse. Je ne vis pas loin de mon travail. En moins d’un quart d’heure, je suis rentré. Ma voiture est tout aussi vite rentrée dans le garage. Et j’attends un peu. Les doigts crispés sur mon volant… J’ai peur… Peur d’elle. Peur du combat à venir… Mais je ne peux pas le repousser éternellement. Il faut qu’elle sache. Il est temps de mettre un terme à ce conflit stérile.

Je remonte. Mes enfants me sautent dans les bras. Ils sont ma seule joie dans cette maison plus humide que la mer elle-même. On pourrait presque nager dedans. J’esquisse un sourire à cette idée stupide. J’approche du salon et elle me fait un grand sourire comme si rien ne s’était passé jusque là.

— Tout va bien ? me dit-elle.

Bon sang, mais qu’est-ce qui se passe ? Elle a oubliĂ© les disputes quotidiennes des semaines Ă©coulĂ©es. Elle a oubliĂ© que j’ai parlĂ© divorce plus d’une fois ?

— Tu veux que je te fasse un petit massage ? T’as l’air tout tendu…

Oui, elle a oubliĂ©. Ou croit-elle que la flamme va pouvoir renaĂ®tre de rien ? Comme si l’on pouvait stopper sa chute et remonter tout en haut de la falaise. Mais la guerre n’est pas fini, le lion de sable l’emportera sur l’ogre de gueule. Qu’elle ne croit pas l’inverse. Je suis peut-ĂŞtre piĂ©gĂ© pour l’instant, mais je trouverai une porte de sortie. Je dois la trouver… Il le faut.














Noctuelle

J'aime bien ton texte, je m'y reconnais un peu (sauf pour les maths)


Le 08/04/2021 à 22:29:00



Elbaronsaurus

j'ai lu. C'est dingue, n'ayant jamais connu ce style situation, j'ai été touché par ce moment de vérité. L'homme prisonnier d'une situation malsaine et d'une femme à la limite du pervers narcissique qui lui tient presque les couilles entre ses doigts crochus. Tu as de nombreux bons mots, je suppose que tu les inventes, mais ça prouve ta facilité à jouer avec la langue française et c'est franchement cool à lire. Bien que je me fiche dans la vie de tous les jours des histoires des gens, j'ai été touché au cœur par ton vécu grâce à la subtilité et à malgré tout, ce coup de point que tu nous sers en pleine gueule. J'ai été en total empathie et j'ai pu sentir la souffrance, j'aime pas ça, mais j'aime bien quand même car ça me bouscule. Merci de m'avoir bousculé.


Le 09/04/2021 à 09:49:00

















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