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![]() ![]() Contraintes aléatoires Contraintes à sélectionner soi-même Testeur d'auxiliaire Situations aléatoires (défi de Schrödinger) Textes sans commentaires Générateur de situation/synopsis ![]() Ă€ la manière du western
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Elinor![]() Spectacles![]() ![]() ![]() Duels(par Elinor)Je suis accoudĂ©e au comptoir, un verre dans une main, le journal dans l'autre. Je prends connaissance des dernières nouvelles de l'Ouest. Un braquage en bande organisĂ©e a Ă©tĂ© dĂ©montĂ© par le shĂ©rif de la ville voisine. Quatre frères ont attaquĂ© la banque. L'article ne donne que leurs initiales : B., G., B., et E. D.. Mais une photo de leurs avis de recherche est diffusĂ©. Je suppose que c'est par prĂ©vention. Ils n'en sont pas Ă leur coup d'essai, et ont dĂ©jĂ rĂ©ussi plusieurs Ă©vasions. Mais une chose est sĂ»re : si je les croise, je leur fais la peau. Je dĂ©teste les criminels, et je n'hĂ©site pas Ă faire justice moi-mĂŞme quand les personnes adĂ©quates en sont incapables. J'entends la porte du saloon grincer derrière moi. Un coup d’œil dans le miroir. Eh merde. Ma pire ennemie est lĂ , j'ai nommĂ© Calamity Jane. J'ai jamais pu la blairer, et elle non plus. On a grandi dans le mĂŞme village perdu au fin fond du Texas, et la concurrence a toujours Ă©tĂ© rude entre nous. Nous sommes de niveau Ă©gal, ou presque. Je la surpasse lĂ©gèrement Ă cheval, elle me surpasse lĂ©gèrement en vitesse pour dĂ©gainer. Nos dix-huit ans atteints, nous sommes parties, chacune de notre cĂ´tĂ©, Ă la dĂ©couverte du grand Ouest. Et nous nous retrouvons. Il fallait bien que ça arrive. Je sens son regard dans mon dos. Je finis cul-sec mon whisky. Je plis mon journal. Je le pose sur le comptoir. Je lance une pièce au propriĂ©taire. Et je me retourne lentement. Très lentement. D'un petit signe de menton, je lui montre l'extĂ©rieur. Une fois Ă l'air libre, je garde mes distances de sĂ©curitĂ©, prĂŞte Ă dĂ©gainer. Je n'aurai qu'une seule chance si elle essaye de m'atteindre. J'entame le dialogue, mais suis prĂŞte Ă rĂ©agir au moindre pĂ©pin. — Alors, Jane. Que me veux tu ? Elle reste silencieuse. Le soleil brĂ»le. Le sol craque. Les seuls ĂŞtres vivants que l'on entend, ce sont les corbeaux du dĂ©sert. Je la regarde. Elle me regarde. Je la regarde. Nos Ă©changes muets contribuent Ă conforter cette atmosphère pesante. Je sens qu'il va se passer quelque chose. Ma main est si près de mon six coups. Et soudain… — Stop. Stop ! STOP ! Oh non ! Pourquoi elle me sort de lĂ elle ? Tout Ă©tait parfait. J'avais rĂ©ussi Ă me transporter au lieu et Ă l'Ă©poque voulue. Mais non, il a fallu que la folle qui nous sert de metteuse en scène nous coupe. Pour la troisième fois de la rĂ©pĂ©tition. Alors que la reprĂ©sentation est demain. On est vraiment mal. — Qu'est ce qu'il y a encore ? Elle me toise, pleine de mĂ©pris. Mais elle ne peut rien me dire de trop dur, j'incarne le personnage principal, et si je m'en vais, sa pièce est foutue. Elle me jette encore un regard dĂ©daigneux, et me dit , la voix emplie de mĂ©sestime: — Tu n'es pas assez dans le personnage. Cela fait cent fois que je te le rĂ©pète, mais je vais recommencer. Tu dois t'imprĂ©gner des costumes, des dĂ©cors, de tout, pour te transporter dans le Far Ouest. Sinon, cela ne Fon-cti-on-ne-ra pas. Eh! Oh! il y a quelqu'un ? Tu m'Ă©coutes quand je te parle ? Évidemment que je l'Ă©coute. Comme si j'avais le choix. Ses trois ans de plus que moi, ainsi que son rĂ´le m'oblige Ă l'Ă©couter. Mais suivre ses conseils ? Comme si j'en avais besoin ! J'y suis dĂ©jĂ , dans l'Ouest AmĂ©ricain. Et si elle ne nous interrompait pas Ă chaque scène, elle s'en rendrait bien compte. Je ne lui rĂ©ponds pas, mais je la dĂ©fie du regard. Comme si une terminale d'un pauvre lycĂ©e anglais de province pouvait se permettre de se prendre pour une rĂ©alisatrice d'Hollywood. Nous nous affrontons sans mouvement pendant plusieurs instants. L'atmosphère dans la salle de spectacle est lourde. Moi sur la scène, elle devant. Personnen'ose dire un mot. Les autres savent qu'ils y perdraient des plumes. Soudain me vient une idĂ©e. Doucement, je rapproche ma main de mon arme en toc, et… Pan ! Je tire un coup, et elle sursaute. Si on avait vraiment Ă©tĂ© dans l'univers de sa pièce, elle serait morte. Sa tĂŞte me fait tellement rire. Honteuse d'avoir Ă©tĂ© surprise, mais toujours hautaine, pour ne pas perdre la face. Un sourire moqueur apparaĂ®t sur mon visage. Je voudrais l'enfoncer dans son ridicule, mais quelque chose m'en empĂŞche. Ou plutĂ´t quelqu'un. HĂ©loĂŻse, ma meilleure amie. Elle pousse un petit cri de douleur, faux, je m'en rends bien compte, mais assez rĂ©aliste pour qu'Ashley dĂ©tourne les yeux. Quelle crème, cette fille. Toujours lĂ pour me ramener doucement Ă la raison et au calme quand je commence Ă aller trop loin. Elle fait semblant de s'ĂŞtre fait mal Ă la cheville. La pĂ©tasse de service pousse un soupir Ă fendre l'âme, pour bien nous faire comprendre que nous l'exaspĂ©rons. Comme si on ne le savait pas. Mais, responsable de nous, elle est obligĂ©e de faire quelque chose. Alors elle me demande d'accompagner HĂ©loĂŻse au Mont Malade. Au Mont Malade, enfin... chez la CPE. On a surnommĂ© son bureau ainsi, parce que c'est la seule pièce utilisĂ©e au troisième Ă©tage, et donc le point culminant de notre Ă©cole, et aussi parce que c'est toujours lĂ bas que vont les Ă©tudiants au moindre petit mal. Je prĂ©cise qu'on est un petit lycĂ©e lĂ©gèrement pauvre, et donc qu'on a pas d'infirmière. Et quand on nous a annoncĂ© qu'on allait monter une pièce de théâtre en mode western, avec mon groupe d'amies Ă la folle imagination, on a pas pu s'empĂŞcher de renommer tous les endroits clĂ©s du lycĂ©e. La cantine est devenue le Saloon des mille immondices, le bureau de la CPE, le Mont Malade, le gymnase, l'Arène aux duels, etc. J'emmène donc la grande blessĂ©e chez la CPE. Elle n'est pas lĂ , mais ça ne fait rien. Elle ne note jamais qui va la voir, est très Ă©tourdie, et donc pourra tout Ă fait dire qu'elle nus a vu alors que pas du tout. On attend quelques instants Ă l'intĂ©rieur mĂŞme du fameux Mont, en silence. Et puis on se regarde. Et on Ă©clate de rire. Un fou rire qui dure plusieurs minutes. Quand on s'est enfin calmĂ©es, d'un commun accord, on se dĂ©cide pur retourner Ă la rĂ©pĂ©tition. Et on entend un hurlement. La diva a encore dĂ» se casser un ongle. Il va falloir affronter la bĂŞte et son humeur massacrante. Une chose est sĂ»re, elle n'aurait JAMAIS pu vivre dans un western.
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