L'Académie de Lu





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Fais-moi signe

(par Elinor)
(Thème : En musique)
(dernière modification : 18/04/2022)



Salut !


Je me suis fait une réflexion… Tout à l’heure, je relisais ce que j’ai écrit entre tes premières pages, et je me suis rendu compte que je ne t’ai jamais raconté comment tout a commencé, comment tout est arrivé. Et je me suis aussi rendu compte que j’avais besoin d’en parler à quelqu’un, quelqu’un qui ne l’a pas vécu en même temps que moi… Alors, aujourd’hui, si tu es d’accord, je vais te raconter comment tout a commencé (et oui, je sais que je parle à un carnet, mais ça me fait du bien alors… Pourquoi pas?)


Tout commença un peu bêtement, si je puis dire. J’étais à un concert, avec ma classe, en début de quatrième, et un violent acouphène traversa mes oreilles, un son strident et fictif qui résonnait à l’infini dans ma tête. Je voulais me boucher les oreilles, que cela cesse. Mais malgré mes paumes pressées contre elles, le son persistait, me faisant me mettre à genoux. A un moment, ce fut si peu supportable que je tombai, inconscient.


Lorsque je me réveillai, j’étais dans une chambre complètement blanche, et ce bruit avait enfin cessé. Je croyais en être débarrassé, et puis je vis le regard de mes parents lorsqu’ils entrèrent dans ma chambre. Leur visage était sombre, et s’ils se forçaient à sourire, leur mâchoire serrée et leurs yeux inquiets les trahissaient. Je pris aussitôt peur. Que se passait-il ?


— Mon chĂ©ri… commença ma mère, l’ORL a quelque chose Ă  te dire…


Je commençai immédiatement à m’imaginer le pire. Qu’allait-il m’annoncer ?


— Alexandre… Tu as dĂ©jĂ  eu des crises comme celle que tu as faite tout Ă  l’heure ?


Je le regardai, terrifié. Je ne savais pas ce qu’il voulait me dire, mais je craignais le pire.


J’acquiesçai alors, d’un tout petit signe. Oui, ce genre d’acouphènes m’était déjà arrivé, mais jamais aussi brutalement et douloureusement.


— Et...Tu as dĂ©jĂ  eu des vertiges prolongĂ©s ? De longs moments oĂą tu perdais ton Ă©quilibre ?


Encore une fois, j’acquiesçai. Où voulait-il en venir…


— Je crains que cela n’étaye notre hypothèse...Il va falloir que nous fassions plusieurs examens ensemble, je pourrai t’en dire plus quand nous aurons les rĂ©sultats.


Il ne se rendait pas compte à quel point il était cruel… Me garder dans l’ignorance ne faisait qu’entraîner mon stress et ma panique… Cependant, je ne dis rien, je ne voulais pas paraître insupportable. Je le suivis donc, laissant mon cerveau imaginer mille et une hypothèses. Lorsque je quittai la pièce, ma mère tenta de me transmettre du courage à travers une étreinte de ma main… en vain. Je ne parvenais pas à calmer la tempête intérieure qui me chamboulait complètement.


La fin de la journée fut éprouvante. J’enchaînai examens auxquels je ne comprenais rien et longues attentes dans les différentes salles d’attente de l’hôpital. Je bénis donc l’infirmière qui vint me chercher pour ramener dans ma chambre pour la nuit. Mais malgré ma fatigue, je me tournais et me retournais dans mon lit sans trouver le sommeil. Que pouvais-je bien avoir pour que cela inquiète à ce point mes parents et le médecin ? Il devait être 3h du matin quand je trouvai enfin le sommeil, à bout de forces.


Je fus réveillé après seulement quelques heures endormi, pas du tout reposé et absolument pas prêt à affronter la journée qui m’attendait. Pourtant, il le fallait bien… Lorsque, vers 10h, mes parents arrivèrent, accompagné du médecin, j’étais toujours aussi angoissé, mais aussi soulagé de pouvoir enfin connaître la vérité.


— Alexandre… commença le mĂ©decin, tous les rĂ©sultats de tes examens confirment ce que nous craignions. Tu es atteint de la maladie de MĂ©nière, une maladie qui touche l’oreille interne, et la forme que tu as dĂ©veloppĂ© est grave… Je ne vais pas te mentir, tu risques fortement de perdre ton ouĂŻe complètement et dĂ©finitivement d’ici quelques annĂ©es, mais tu auras certainement des crises comme celles que tu as eu, mais aussi des pertes d’audition d’ici lĂ .


Quelque chose se brisa alors en moi… Perdre mon ouïe… Cela me semblait impossible. C’était impossible. Je ne pouvais pas perdre ce sens, il était si important… La musique avait toujours été mon baume quand je n’allais pas bien. A écouter ou à jouer, je ne pouvais m’en passer aujourd’hui. Comment allais-je faire ?


Les pires scénarios se mirent alors à défiler dans mon esprit. Les morceaux que je n’écouterai plus jamais. Les concerts que je ne ferai plus jamais. Tous les sons du quotidien, les rires, les pleurs, les cris de joie et bien plus encore, que je n’entendrai plus jamais. Et nombre d’autres situations… Noyé dans cette vague d’émotions profondes, je fondis en larmes. Je ne voulais pas perdre mon ouïe… Je sentis ma mère me prendre dans ses bras et me caresser en me chuchotant des paroles apaisantes à l’oreille jusqu’à ce que je me calme.


— Alexandre…


— Alex.


— Alex… Je me dois cependant de te prĂ©senter un choix que tu vas avoir Ă  faire. Si tu le souhaites nous pouvons t’opĂ©rer. Cela pourrait te rendre complètement et dĂ©finitivement l’ouĂŻe. Mais il faut que tu saches que le facteur risque est Ă©norme. Il y a aussi de grandes chances que plutĂ´t de te rendre ton sens, elle te le coupe avant que la maladie ne le fasse. Tu n’es, bien entendu, pas forcĂ© de prendre ta dĂ©cision maintenant, tu as le temps d’en discuter avec tes parents pour faire le meilleur choix possible pour toi. Mais il fallait que tu saches que ce choix Ă©tait possible. Et en attendant.. tu pourras rentrer chez toi ce soir.


J’étais complètement sonné. Je ne fus capable de d’acquiescer faiblement. Je ne pouvais rien dire, c’était impossible. Mon monde s’effondrait, et je ne pouvais rien faire pour le maintenir debout.

Les semaines suivantes furent un véritable cauchemar. Mes crises furent de plus en plus fréquentes, de moins en moins supportables. Il passait certaines fois des jours et des jours durant lesquels j’étais complètement privé d’audition. Quand je la retrouvai, il me semblait revivre, je pouvais enfin entendre tous les sons auxquels je n’avais plus eu le droit. J’essayais alors de tous les capturer, de tous les mémoriser, pour pouvoir m’en souvenir lors de la crise suivante… Ces épisodes me coupaient de tout, et de tout le monde. J’avais commencé à apprendre le langage des signes, mais si peu de gens le comprenaient et pouvaient me répondre… Mes parents et ma sœur essayaient comme ils pouvaient de m’aider, mais ils ne comprenaient pas. Ils ne pouvaient pas comprendre ce que représentait mon handicap.


Je m’enfermai de plus en plus dans mon mutisme, car je n’arrivai plus à sortir un son quand je ne pouvais plus m’entendre parler. C’était un enfer. J’espérais juste une seule et unique chose, que quelqu’un me fasse un signe, que je rencontre enfin quelqu’un qui pouvait me comprendre et me répondre… Mais rien n’arrivait.


Le délai donné par le médecin arriva enfin à son terme. Nous en avions longuement discuté avec mes parents, et j’avais réussi à les convaincre. S’il restait la moindre chance que je puisse retrouver l’ouïe et ne plus jamais la perdre, je devais essayer.


On programma alors l’opération, le plus tôt possible. Et puis les jours, les semaines passèrent, et enfin, la date arriva. J’étais mort de peur, mais je ne voulais pas le montrer. J’avais encore de l’espoir, je voulais y croire. Alors je me préparai, je pénétrai dans le bloc opératoire et je fermai les yeux, terrifié mais plein d’espoir.


Lorsque je me réveillai, il n’y avait que le silence. Rien d’autre que le silence. Je voyais les gens s’activer autour de moi, parler… Mais je n’entendais rien. Rien d’autre que le silence.

J’essayai alors de hurler… Mais je n’entendis pas le son que je produisis. Je fondis alors en larmes. C’était fini, l’opération n’avait pas fonctionné, je n’entendrais plus jamais… Je serais condamnée à cette prison aussi silencieuse que la mort pour le restant de ma vie. Je n’aurais plus le droit qu’à des images sans bande son. L’avenir me semblait si noir, à cet instant là.


Voilà, mon cher ami, comment tout a commencé. Merci de garder mes secrets comme tu le fais, et merci de m’avoir écouté, cela m’a fait tellement de bien de l’écrire. Depuis que je n’ai plus la musique, seule l’écriture me permet de m’évader de ce silence si pesant… Alors merci. Merci pour tout.





Musique ayant inspirĂ© le texte : https://www.youtube.com/watch?v=PAFsWNdYpZ4














Sourne

Comme pour le texte de Noon, j'ai d'abord écouté la musique... Et je dois me retenir de pas la commenter tellement elle m'a captivée x) 'fin bref... Là, ce n'est plus les paroles ou l'ambiance, mais juste le thème de la surdité qui est reprit. Ca fonctionne bien aussi, et ça développe le passé du personnage d'Alexandre que j'avais encore pris pour une fille au début va savoir pourquoi. L'aspect tragique de la perte de son ouïe, qui lui ôte aussi ses moyens de se maintenir mentalement, est bien retranscrite tout le long du texte, que ce soit avec l'attente du prognostique à celle de l'opération, ou encore nous décrivant la maladie de Ménière


Le 18/04/2022 à 16:12:00



JilanoAlhuin

Ton texte fonctionne très bien avec la chanson que tu apportée, et pour des raisons assez évidentes : le personnage que tu as choisis est probablement le meilleur choix que tu aurais pu faire. En effet, un personnage sourd, ou du moins qui le devient, vu qu'elle raconte ces événements, rentre à la perfection dans le décor que tu places. Tu gardes également la similarité du cahier qui l'aide à s'exprimer, comme la dernière fois que tu l'as utilisé, ce qui est bien. Le personnage est bien approfondi, et on comprend mieux sa situation. Cependant, il y a un détail qui m'a un peu arrêté : la présence des dialogues. Je ne dis pas qu'il ne fallait pas en parler, au contraire, dire ce que disait le médecin était intéressant, on comprend des choses, et c'est même normal. Cependant, elle parle à un cahier et elle raconte les événements. Mais elle ne les raconte pas comme un auteur raconte une histoire, elle les raconte comme on pourrait parler à quelqu'un d'autre. Donc je pense que tu aurais du quitter les dialogues "classiques", si je puis appeler ça comme ça, pour aller vers des dialogues plus "indirectes", du style : "Le médecin avait dit qu'il y avait une chance que mon ouïe s'en sorte. Selon lui, (...)" etc, etc.


Le 21/04/2022 à 01:00:00



Zandra-Chan

je sais, je suis trèèèès en retard mais j'ai lu ton texte "Fais-moi signe" (et bien évidemment écouté la musique choisie pour aller avec).
Déjà, merci pour cette découverte musicale. Je l'ai écoutée après ma lecture... et... whoa. C'est... étrangement puissant.
Une puissance que j'ai globalement retrouvée dans ton texte : la peur de perdre l'ouïe, le calvaire d'attendre des résultats des examens, le choix – aux conséquences irréversibles – que de se faire opérer... et le résultat de ladite opération... Ça fait mal tant c'est criant de vérité. C'est quelque chose qui m'avait déjà frappée dans d'autres de textes : on dirait du vécu. Autant te dire que je suis bluffée. Bravo.


Le 21/06/2022 à 02:11:00

















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