Drichi W41, planète contrebandière.

Au fond d’une ruelle insalubre éclairée seulement d’une enseigne en fin de vie, une porte s’ouvre. Deux humanoïdes à la stature imposante sortent portant à demi un troisième personnage. Les deux colosses envoient leur fardeau dans l’entassement de poubelles en lançant :

— … Et r’met plus les pieds ici si tu veux pas qu’on t’casse la gueule !

— ‘Pourriez quand même être plus galant avec une pauvre femme qui a tout perdu…

Signala la jeune femme en se relevant de manière incertaine.

— T’as dit quoi ?

— Laisses Gluck, c’est une ivrogne.

— Je dis que vous êtes vraiment deux gros salopards qui avez aucun savoir vivre !

Elle déclarait cela en les fixant, un long sourire tracé sur le visage.

— Elle veut vraiment que j’y casse la gueule c’te conne ! Hein ?! C’est ça qu’tu veux !

— Allez vient mon gros, je t’attend.

Provoqua-t-elle en titubant d’un pied sur l’autre, les poings levés. Un coup de pied dans le ventre par le videur suffit à la mettre au sol. Elle cracha sur le bitume et commença à se relever en rajoutant.

— C’est tout ce que t’as le singe ?

— Oh putain j’vais m’la faire !

— Gluck, ça sert à rien !

— Fous moi la paix tu veux !

La jeune femme s’était relevée et remise en position entre-temps. L’armoire à glace fonce sur elle et lui flanqua un énorme coup de poing dans le ventre qui la renvoya à terre. Afin d’être sûr qu’elle ne le provoque plus, l’employé de bar commença à la rouer d’une série de coups de pieds. Elle ne résista pas. Elle se sentait doucement glisser dans l’inconscience.

Elle ne résistait pas. Elle voulait partir. Elle était fatiguée de vivre. Fatiguée de cette vie qui semblait ne pas vouloir d’elle. De cette vie qui semblait avoir une dent contre elle. Elle en avait marre de se battre. Rien n’avait plus de sens pour elle. Elle voulait mourir. Elle avait tout fait, tout, pour reprendre le contrôle, pour restaurer le nom de sa famille. Elle avait intégré la flotte de la fédération. Elle avait gravi les échelons jusqu’au plus haut grade.

Alors pourquoi ? Pourquoi était-elle entrée dans ce bureau ? Pourquoi avait-il fallu qu’elle voie ce relevé de compte ? Pourquoi avait-il fallu qu’il lui avoue tout ça ? Pourquoi n’avait-il pas nié ? Elle l’aurait cru. Elle était prête à le croire. Pourquoi lui avait-il tout raconté ? Pourquoi avoir porté tout cela à sa connaissance ?

Un lumière s’alluma en elle. Une lumière grandissante, persistante. La vie n’y était pour rien dans son malheur. C’était lui ! Lui qui avait ruiné son existence. La vie n’était pas pourrie. C’était à cause de lui qu’elle était là. Et elle allait le lui faire payer. Elle allait tout faire pour le faire tomber de son piédestal. Ce salopard méritait d’être traîné dans la boue, de pourrir dans un caniveau. Elle allait devenir son fléau, sa némésis. Il ne pourrait plus rien faire sans la retrouver sur sa route. Elle allait le discréditer aux yeux de tous ses subordonnés. Ça allait être, pour lui, le début de la désescalade.

La jeune femme, malgré les coups, parvint à se relever. Elle se dressa face au videur et lui asséna un coup de pied dans l’entre-jambe. L’humanoïde se courba sous la douleur. Elle en profita pour lui administrer un coup du tranchant de la main dans la nuque. L’être s’effondra sur le goudron sale. Son acolyte se précipita à son secours. Il reçut le même traitement. Une fois débarrassée de ces deux Hercules, l’ex militaire partie en boitillant de la ruelle. Elle savait ce qu’elle devait faire. Il lui fallait un équipage et un vaisseau. Elle se le jurait, elle n’aurait aucune clémence.

Musique ayant inspiré le texte : https://www.youtube.com/watch?v=p_fty8xyFmA