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Sourne![]() Spectacles![]() ![]() ![]() Océan de tourments(par Sourne)Les millénaires et les univers se sont succédé depuis que je suis devenu le Faiseur de mondes. Mais hélas, en dépit des bulles de vie que j'ai fait naître, je demeure esseulé dans la pénombre absolue de mes ténèbres. Les étoiles d'espoir s'évaporaient aussi vite que de nouvelles éclataient à mes yeux, sans jamais me prodiguer le moindre sentiment.
Je demeure cloisonné dans un océan plus sombre encore que le vide parfait, ma conscience est incapable de ne serait-ce qu'égratigner l'une des couches absconses qui cernent les mondes. Des mondes qui ne sont peuplés que d'ingrats humains, qui n'ont jamais cherché à savoir qui j'étais. Je leur communiquais des savoirs inimaginables, je leur prodiguais des pouvoirs incommensurables, néanmoins ils n'agissaient jamais comme je le pensais. Ma lassitude se renforce chaque siècle et chaque siècle, me rendant indifférent.
Les rares élus qui méritaient mes pouvoirs virent leur vie brisée par le temps qui les rattrapait inexorablement, et ils s'effondraient dans le néant avec le monde qui les avait vus venir. La première fois, des larmes coulèrent des yeux de mon avatar. À la millionième fois, le flot s'était tari en un silence résilient.
Lorsque je les accompagnais de leur naissance à leur disparition, ces humains se muaient en monstres, avec des mœurs sanguinaires et sadiques. Comment osaient-ils ensuite se dire être mon miroir, un reflet de mon âme corrompu ? Ces frêles êtres n'étaient pas dignes de ma grandeur, ils n'étaient que l'ombre de leur petitesse et de leur misère spirituelle ! Je suis celui que je suis, leurs répliques me rendent stoïque à présent.
Dans un parfait monde d'amour n'est qu'un mirage. Sans haine, sans hostilité, quelle place occupe un démon ? Y insuffler le désordre, le conflit, la guerre est sans le moindre résultat. Même si je suis à jamais leur créateur, ma parole est vaine. Ce parfait monde d'amour n'était qu'un mirage, qui a servi d'exutoire à la colère et la jalousie que je renferme depuis un nombre de millénaires indécent. Mais malgré mon exil dans l'ignorance et l'oubli, tu m'es parvenu. Sibila, la seule humaine à avoir parachevé mon rêve. Mes intentions sont indiscernables de la plupart de tes congénères, mais tu sembles pouvoir me comprendre alors que je n'ai pas même dit un mot. Parfois, j'aimerais n'être qu'un simple homme, et vivre en ta présence. Mais hélas, ce bonheur m'est inenvisageable et je resterais plongé dans un océan de tourments.
Si je n'étais qu'un simple homme, penses-tu que mes crimes seraient absous ? Que l'infinité de personnes que j'ai dupée ou éliminée, et la marée d'infinités d'humains que j'ai effacée par simple caprice me pardonnerait ? Cependant, j'ai conscience que leur mémoire résiderait en moi, sans éventuelle possibilité de l'oublier, et mes erreurs me frapperont indéfiniment. Dans mon ancienne incarnation, j'aurais ressenti cette effroyable douleur dans ma poitrine, celle qui marque mon impuissance, celle qui me rappelle ma solitude et l'impossibilité d'y remédier. La souffrance a longtemps été ma seule compagne, me suivant lors de chacune de mes apparitions. Elle martelait et piétinait l'existence de milliers d'humains, et il en serait de même pour l'éternité. Je veux que cet univers de douleur ne soit plus mien !
J'ai tenté à de multiples reprises de m'adoucir et d'attendrir les humains, je m'y échinais. Et l'échec m'enchaînait aussitôt de ses liens de désespoir. Au plus profond de moi, j'entendais des voix railler mes futiles tentatives, fustiger mes infructueux essais, vilipender les esquisses de meilleures versions de moi. Mais à présent, je me suis résigné à ne plus m'affliger de pénibles et inutiles changements.
Depuis ma prison de ténèbres, je ressens le temps s'écouler inéluctablement. Lorsque mon regard est attiré par la lueur d'un monde, l'obscurité le saisit aussitôt, le portant dans les abîmes de l'oubli. Et moi aussi, je suis affecté par le temps qui est source de mon pouvoir, contraint de subir ses affres et ses tourments. Mais comme un noyau de désespoir, je tente de lui résister sensiblement. Je me suis suffi de ma solitude durant une infinité, bercé par l'espoir illusoire qu'un jour un égal me viendra. La colère, la haine, la destruction qui résonnent encore et toujours en moi me fatiguent inlassablement.
Peut-être qu'un amour naissant pourrait lutter contre celui que je suis, me faire aller à l'encontre de ma nature unique. Mais je crains que si je fais le moindre effort dans ce sens, je ne disparaisse dans un univers qui m'est inconnu, et ainsi réduire en poussière mes innombrables créations, tout comme l'entièreté de ma mémoire. Serais-je encore la même personne si je suis meurtri d'un amour désespérant ?
Musique ayant inspiré le texte : https://music.youtube.com/watch?v=UiKqxLN0uRs&feature=share
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