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Le Royaume merveilleux
![]() ![]() Douce Ă©closion(par Sourne)Comme chaque matin, Fohana admirait le paysage qui s'offrait Ă elle. Le doux parfum des premières fleurs s'insinuait dans ses narines, lui apportant une agrĂ©able sensation de fraĂ®cheur, dont elle ne pouvait se passer. Fohana continua Ă humer l'air un longue instant, avant de reporter son attention sur sa sĹ“ur jumelle. Devenue une vĂ©ritable habitude, Forsana s'exerçait au maniement de son... comment appelait-elle son outil ? Le mot revint rapidement Ă l'esprit de Fohana. — Une Ă©pĂ©e, chuchota t-elle, un outil destinĂ© Ă tuer. Constatant que sa jumelle n'aperçut pas de son murmure, elle continua de scruter la grande Ă©pĂ©e, que Forsana balançait dans le vide avec adresse. Sa sĹ“ur ne frappait personne, mais une certaine volontĂ© de vaincre se dĂ©gageait d'elle. Nul doute que si un drac, ou un humain, se dressait devant elle Ă ce moment prĂ©cis avec l'intention de s'en prendre au temple, elle le trancherait sans la moindre peine. — Un outil pour tuer, rĂ©pĂ©ta Fohana, prise d'un frisson qui Ă©branla son corps entier. Cette fois, Forsana entendit la phrase de sa jumelle. — Tu me parlais ? demanda la guerrière, souriante. — Je... je te contemplais, encore et toujours, admit la gardienne. Toute la force que tu dĂ©gages, ta prestance... je dois avouer que je te jalouse un peu, parfois... — Absurde. La jumelle se rapprocha d'elle, lentement. Ta foi reste bien supĂ©rieure Ă la mienne et tu demeures un atout indispensable dans notre mission. Nous devons maintenir l'Ă©quilibre entre les trois Royaumes. La guerrière rangea sa grande Ă©pĂ©e dans un fourreau de bois sombre, puis fit deux autres pas vers sa sĹ“ur. Une poignĂ©e de centimètres les sĂ©parait, une toute petite poignĂ©e. — Cette mission cruciale, nous la poursuivrons jusqu'Ă l'Ă©puisement de toutes nos forces, comme toutes les prĂ©cĂ©dentes prĂŞtresses. Et nous, par chance, nous pouvons la mener Ă deux. Sur ces derniers mots, Forsana fit le dernier pas qui la sĂ©parait de sa sĹ“ur et elle l'enlaça. Sa chaleur enveloppa tendrement Fohana, qui posa sa tĂŞte sur le creux de l'Ă©paule de sa jumelle. MalgrĂ© l'entraĂ®nement acharnĂ© qu'elle menait, la sucrĂ©e effluve de miel qu'elle utilisait pour ses longs cheveux sombres chatouillait les narines de Fohana au lieu de l'âcre relent de sueur. Et mĂŞme si la gardienne sentait la transpiration de sa jumelle, cela n'enlèverait en rien la magie de leur accolade. Pour rien au monde, Fohana n'accepterait de quitter sa sĹ“ur. Certainement pas pour mener une vie sans trouble dans le Royaume des cieux et si cela devait arriver, elle la suivrait mĂŞme dans le Royaume dĂ©sastreux quoi qu'il lui en coĂ»terait. La gardienne resserra sa prise sur sa jumelle, passant ses mains dĂ©licates sur le dos couvert d'un fin gilet rouge de la guerrière. Et Ă cet instant, Fohana remarqua quelque chose, quelque chose qui la chagrina un peu. Sa jumelle maintenait certes sa main gauche sur elle, mais sa droite maintenait fermement son fourreau. Elle qui dĂ©posa son sceptre avant leur embrassade ne comprenait pas pourquoi Forsana ne faisait pas de mĂŞme. « Un outil destinĂ© Ă tuer », se rĂ©pĂ©ta encore la gardienne. — Ah, excusez-moi de vous dĂ©ranger, s'exclama une voix, qui surprit les deux prĂŞtresses. — PaĂŻze, Tu ne nous dĂ©ranges pas, affirma Forsana, en quittant aussitĂ´t l'Ă©treinte de sa sĹ“ur. — Pas le moins du monde, ajouta Fohana, avec moins de conviction que sa jumelle. — Je tiens tout de mĂŞme Ă m'excuser de vous interrompre. L'agriculteur inclina son torse et baissa la tĂŞte. La fĂŞte de mon petit bourgeon va bientĂ´t commencer et nous ne pouvons pas nous passer de votre bĂ©nĂ©diction ! — Bien Ă©videmment, nous venons. Fohana opina du chef et elle alla ramasser son sceptre, qui rappelait un peu une hache, avec une sphère bleu ciel au bout. « Un bon outil », se dit-elle. Afin de le dĂ©poussiĂ©rer, elle balança son bâton, faisant frĂ©mir sa longue robe rouge et son chemiser blanc. — HĂ©, tu viens ? l'interpella Forsana. — Ou-oui, tout de suite ! La gardienne se dirigea vers sa sĹ“ur et le villageois, d'un pas dĂ©cidĂ©. Le gravier crissa sous ses pas, l'herbe ondoyant lentement sur la pelouse qui suivait le sentier, Forsana et PaĂŻze l'attendaient. Quand elle arriva Ă leur hauteur, ils descendirent de la montagne sur laquelle se perchait leur temple. Comme Ă chaque fois, Fohana ne pouvait pas dĂ©tacher son regard des deux colosses qui dominaient le Royaume merveilleux : le Mont CĂ©leste et le Volcan Rouge, les portes que les vivants ne pouvaient emprunter pour accĂ©der aux autres Royaumes. Puis, emportĂ©e par son regard curieux, la gardienne promena ses yeux sur la chaĂ®ne de montagnes grises qui refermait hermĂ©tiquement la vallĂ©e dans laquelle tous vivaient. Dans sa distraction, son pied glissa sur un caillou et se dĂ©roba, la prĂ©cipitant dans le vide. Les rĂ©flexes aiguisĂ©s de sa sĹ“ur la rattrapèrent de justesse, au dĂ©pend de son Ă©pĂ©e qu'ils lâchèrent. Bien que rassurĂ©es, Fohana sentait les brassards de cuir de sa jumelle lui mordre le cou et Forsana cherchait son arme du regard. — Tenez, prĂŞtresse Forsana, dit calmement PaĂŻze. La guerrière posa Ă peine sa sĹ“ur sur une marche qu'elle reprit aussitĂ´t son Ă©pĂ©e, presque en l'arrachant des mains du villageois. — Cet objet... revĂŞt une grande valeur pour le temple et il peut se rĂ©vĂ©ler dangereux entre de mauvaises mains. DĂ©solĂ©e pour ma rudesse. — Je n'en tiens pas rigueur, ne vous en faites pas prĂŞtresse Forsana. Je comprends. — Merci, dit simplement la guerrière, en opina du chef. La descente de l'escalier aux nombreuses marches se poursuivit un temps encore, durant lequel le silence rĂ©gna. Afin de ne pas dĂ©ranger davantage sa jumelle et le villageois, et instaurer un nouveau moment gĂŞnant, Fohana cessa de regarder la vallĂ©e verdoyante de forĂŞts et bleutĂ©e de lacs. — Nous arrivons enfin, lâcha le villageois. Ah, ma hâte de vous prĂ©senter mon fils et que vous lui fassiez la cĂ©rĂ©monie du bourgeon ! En guise de rĂ©ponse, les deux prĂŞtresses sourirent chaleureusement Ă PaĂŻze, qui les entraĂ®na vers la place centrale de la Ville. Une foule nombreuse les attendait avec impatience, puis acclama les deux jumelles. — PrĂŞtresse Fohana, prĂŞtresse Forsana ! entonnèrent en chĹ“ur les villageois en liesse. — La cĂ©rĂ©monie peut dès lors commencer ! clama haut et fort PaĂŻze. Fohana hocha la tĂŞte et elle entra dans une sorte de petite arène, recouverte d'Ă©toffes colorĂ©es. Un petit enfant demeurait au centre, il restait sage tandis que sa mère lui bandait doucement les yeux. La gardienne sursauta de surprise quand elle sentit PaĂŻze la frĂ´ler, pour s'installer Ă l'une des extrĂ©mitĂ©s de l'arène tandis que la foule s'en rapprocha. Forsana se mit au premier rang, se remĂ©morant cette coutume qu'elle vĂ©cut moult fois sans jamais y participer. Cela la tradition, une sorte de Colin-maillard s'organisait au premier printemps d'un enfant et il devait saisir l'une des trois autres personnes dans l'arène, pour dĂ©finir sa vie. S'il attrapait sa mère, il mènerait une vie emplie de tendresse et de joie. S'il attrapait son père, il vivrait dans la dignitĂ©. Et s'il attrapait la prĂŞtresse, Fohana en l’occurrence, il pourra aller une fois sa vie achevĂ©e au Royaume des cieux. — Grands Esprits, prenez-nous comme tĂ©moins de l'avenir de cet enfant, tonna la foule enthousiaste. Sur ces mots, la mère fit tourner quelques fois son fils, avant de s'Ă©carter de lui. Perdu et dĂ©boussolĂ©, le bambin chercha ses parents. Il les appela de sa voix suraiguĂ«, pleura un peu puis il marcha maladroitement sur ses deux pieds. La foule retenait son souffle et plus personne ne fit de bruit. Un pas vers son père, puis deux vers sa mère. L'enfant ne savait pas oĂą aller, il tâtonnait dans un peu toutes les directions. Des bruits d'admirations ne purent se contenir de la foule la parcourut telle une vague sur la mer. Le jeune garçon venait de faire cinq pas vers Fohana, un avenir radieux lui semblait promis ! Il arriva au niveau de la gardienne. Mais comme s'il savait prĂ©cisĂ©ment oĂą se situait la planche de bois qui dĂ©limitait l'arène, il leva le pied avec dĂ©termination et quitta l'arène, pour toucher le fourreau de bois de Forsana. La foule ne comprit guère le pourquoi du comportement du garçon, mais tout s'Ă©claircit lorsque la guerrière et l'enfant tirèrent le fourreau dans deux directions opposĂ©es. La lumière se reflĂ©ta sur l'Ă©pĂ©e de Forsana, la dĂ©voilant au grand jour. — Une si longue lame Ă double tranchant me semble Ă©trange, souligna une villageoise âgĂ©e. Il ne me paraĂ®t pas pratique de couper du bois avec, ou de tailler des vĂŞtements. Je ne vois qu'une utilitĂ© à ça... c'est une arme, un objet destinĂ© Ă tuer ! — Grands Esprits, comment nous vous offensons pour promettre mon unique fils au Royaume dĂ©sastreux ? pleura la mère. Cette histoire fait partie d'un tout plus grand !
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