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![]() ![]() Contraintes aléatoires Contraintes à sélectionner soi-même Testeur d'auxiliaire Situations aléatoires (défi de Schrödinger) Textes sans commentaires Générateur de situation/synopsis ![]() Père Noël et Lapin de Pâques
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Malkym![]() Spectacles![]() ![]() ![]() Pas de fumée sans Feu(par Malkym)La Laponie est une région finlandaise très peu connue de ce côté vieux continent. La plupart des gens ne font que croire ce qu’ils entendent de gens qui, eux-mêmes, ne font que croire, entendre et prétendre. Cependant, voici ce qui se raconte la plupart du temps : la Laponie serait une région froide, relativement peu attractive et, pour ainsi dire, quasiment vide. En vérité, tout ce dont les gens sont susceptibles de se souvenir, c’est de la présence, dans ces terres inhospitalières, de l’une des personnalités les plus connues du Monde. Un homme qui, selon la légende, serait tout vêtu de rouge, aurait une moustache bien fournie et ferait travailler de petits êtres aux visages enfantins dans de grandes usines, créant des cadeaux que leur patron enverrait à tous les enfants les plus sages de la planète, et ce en une nuit. Bien qu’il soit souvent confondu avec un célèbre et ancien dictateur communiste de l’est de l’Europe, la plupart des gens s’accorde à le dire : le Père Noël est bien plus qu’un mythe ! C’est une véritable icône des fêtes de fin d’année ! Une véritable vedette qui côtoierait bien souvent d’autres célébrités du genre, comme la Fée des dents ou le Marchand de sable. Pourtant, sa célébrité, il la cacherait très loin de ses fans, bien loin de tout – même pour la Finlande – en Laponie. Certains diront que c’est à n’y rien comprendre, mais c’est quand on voit les charges patronales du pays que l’on comprend pourquoi le vieil homme vivrait si reculé du Monde – et du fisc. Il se terrerait donc dans le froid, tapis dans sa vieille maison, à l’abri de tout et de tous. Enfin… c’est ce qui se dit. La réalité, quant à elle, est toute autre ! Bien loin d’être aussi glacée que l’on pourrait le croire, la bicoque du Père Noël était ce soir envahie d’une chaleur étouffante. Au milieu de celle-ci, deux individus, et pas des moindres, se tenaient une conversation des plus… incongrues, selon toutes croyances : « Aaaah… soupira le vieux père, On est pas biens là ? — Comme tu dis ! S’exclama une étrange créature, allongée face à lui. — ‘tain… ces temps-ci je suis saoulé ! reprit-il en prenant une bouffée de fumée. — Dans quel sens du terme ? Interrogea la boule de poils qui lui faisait causette. — Tous, j’crois, fit-il avec un ricanement trahissant les poumons usés par le temps et autres. Il y a les gnomes qui me demandent un peu plus de cookies tous les jours… ma femme qui commence sérieusement à me briser les grelots… et pour couronner le tout, Rudolph m’a rapporté un mouvement syndical du troupeau. » Tous deux se turent durant un bon moment, puis la vieille peau prit une lointaine inspiration avant de s’exclamer : « J’suis dans la meeeeerde ! — Tu veux dire que… pour toi, ça sent le sapin. — T’es un vrai comique toi. S’amusa le vieux bougre d’un rire gras. — Mais, tu vois, tous tes problèmes, ça m’étonne pas, dit la bestiole avec un ton plus sec. — D’où tu me sors ça, toi ? Mon affaire elle tenait bien la route depuis des années ! J’vois pas où il est, le problème. — J’crois juste que t’as mal géré ton buisness. Déjà , dis-moi franchement, elle est passée où la thune ? — La thune ? Tu crois que j’me fais tant de thunes que ça ? Je bosse qu’un jour par an et c’est du bénévolat. Évidemment, si je me faisait payé par les mioches, j’me ferait des couilles en or. Mais c’est pas le cas, expliqua le vieil homme. — Alors, laisse moi te dire quelques petits trucs : déjà , tu fais bosser beaucoup de gars. Ça pèse sur la facture. Ensuite, l’entretient des rennes, ça doit aussi te coûter une blinde. Ça je dis pas. Mais il y a une vraie question que j’me pose. » Un vaste silence se fit alors entendre, uniquement interrompu par le crépitement des feuilles brûlant au milieu de la pièce. « Bah vas-y, t’attends quoi ? — Attends, ça va me revenir… réfléchi la boule de poils, alors qu’un silence s’empara de nouveau de la pièce. — C’est quand tu veux, reprit le vieux. — Si ! … Avec toute la communication qu’il y a autour de Noël, les images de toi, les musiques, les pubs… Tu touches le droit à l’image ! Et là tu te les fais, tes couilles en or ! Et me dis pas « Ouais, mais c’est les nabots qui... » tut-tut-tut… Tu les payes en cookies, soit quasiment rien ! DONC... » Il fit ainsi de nouveau planer le silence. Il se redressa difficilement sur son derrière et reprit une grande inspiration qu’il recracha avec calme avant de terminer : « … Elle est où, la thune ? — ‘tain… tu fais chier, rétorqua l’interrogé — Ouais, mais ‘faut bien. Il y a une part qui me revient, j’te rappelle. — Putain de contrat, remarqua le Père Noël. — Bah ouais, c’est mon chocolat, bitch. — Ok. Tu vois les feuilles, là ? Il montra alors les quelques feuilles verdâtres noircissant le parquet en brûlant. — Bah quoi ? T’en as tant que ça ? C’est pas si cher dans le coin. — Crois-moi, crois-moi pas, j’en ai un bon stock. — Un bon stock ? De beuh ? Fit la bête en levant ses longues oreilles en signe d’interrogation. — Ouais… il y a de la beuh, il y a aussi quelques caisses de shit… commença à énumérer le père. — QUELQUES CAISSES ?! Hurla le Lapin. — Mais ta gueule ! J’te rappelle que les petites merdes bossent dans la pièce d’à côté. » Comme pour prouver la véracité de ces propos, un lutin frappa à la porte et demanda, inquiet, si tout se passait bien. Par habitude, certainement, il semblait ne pas oser ouvrir la-dite porte. « OUAIS, T’INQUIÈTE ! Hurla le patron à l’employé, ON PARLAIT JUSTE DES CAISSES DE COOKIES QUI DEVRAIENT ARRIVER DANS LA NUIT ! — C’est vrai ? Interrogea le poilu. — Non, mais je m’imagine déjà les trois centaines de ces petits cons qui vont le croire. Là , par contre, ça va les faire bosser, ça. — Ouais, mais quand ils vont se rendre compte que c’est faux… ? — Quoi ? Tu crois que c’est la première fois ? J’suis pas con. Je prévois, moi. Je les augmenterai sûrement d’une miette ou deux à la fin du mois. » Puis ils se turent tous deux. Après quelques instants, on entendit un cri de satisfaction générale provenant de la pièce d’à côté. Le vieux ricana avec un sourire bête. Il reprit : « Après, j’ai quelques seringues de LSD qui doivent traîner, une plantation de champis dans un coin de la cave, quelques dizaines de kilos de coke… — T’es sérieux ? Des dizaines de kilos ? Pourquoi t’aurais besoin d’autant de coke, toi ? Tu bosses quasiment pas, interrogea le Lapin avec un certain mépris dans la voix. — Déjà , je bosse. J’dirai même que je dois plus bosser en une nuit que toi en une année ! Et, pour ta gouverne, des rennes de compét’, ça s’en-tre-tient ! Conclut-il. — Avec de la coke ? — Quoi d’autre ? Du sucre ? J’le garde pour les nains de jardin. Mais toi, tu turbines à quoi ? Interrogea la vieille peau, Parce qu’on est d’accord que tu bosses aussi qu’en une nuit ! — Ouais, mais moi j’suis pas con. Je gère bien mon affaire, répondit le Lapin avec assurance. Par exemple, j’ai des fabricants de chocolat, comme toi avec tes nains, MAIS je m’occupe pas moi-même de la distribution. — Ah non ? Bah… tu fais comment ? — Eh bien, reprit la bestiole avec une malice dans les yeux, j’emploie une compagnie de livraison express qui s’occupe de cacher tous mes Å“ufs à travers le Monde. — Tu vas pas m’dire que tu demandes à Colissimo d’expédier tes Å“ufs ? — Non, c’est bien trop fragile pour ça ! Non, je suis partenaire les Cloches de Pâques ! Un service assez discret qui m’aide bien dans mon taffe. Mais ça commence à plus être très rentable… j’me demande si je vais pas me tourner vers Amazon, à la place… — Tsss… Feignasse ! Accusa le vieil homme. — S’tu veux, ouais. N’empêche, je fais pas rien non-plus. — Et qu’est-ce que tu fous pendant que tes cloches et tes chocolatiers se cassent le cul à faire ton boulot ? — Bah je fais le miens, figure-toi : je créé les nouveaux designs des Å“ufs, des lapins, des poules, toutes ces petites merveilles-là ! — Je vois. Môssieur est un artiste ! — Tout-à -fait, Môssieur ! Imita le lapin tout en se donnant des airs de supériorité. — Et tu les trouves où tes idées ? Dans le cul des poules que tu prends pour modèles ? — Eh bah, tu vas rire... » Il s’interrompit et montra de la patte le tas de feuilles continuant inexorablement sa combustion. Le Père Noël poussa un très long « Aaaaah... » de lucidité, en constatant, d’une part les substances se consumant à ses pieds, et d’autre part les nombreuses piqûres parsemant le pelage gris de l’animal. Il semblait à l’instant comprendre d’où pouvaient provenir les motifs étranges – et si moches – qu’arboraient les divers Å“ufs que petits et grands mangeaient au printemps. Et, comme l’avait prédit le Lapin de Pâques, il se lança dans un fou rire. Le Lapin, dont la patte était toujours tendue vers les flammes se mit à son tour à rire. Et tous deux continuèrent à s’user les poumons d’amusement devant le feu, sans bouger, le visage et le museau toujours embrumés, presque anesthésiés. Une douce odeur de brûlé se mit alors à embaumer la pièce de plus belle, tandis que les feuilles vertes finirent enfin par cesser de cendrer le parquet noirci. Les rires continuèrent mais se mutèrent bientôt en cris de panique de l’un et en ricanements, plus gras et bêtes de l’autre. Une vaste lumière éclaira cette nuit-là une forêt de Laponie, sous un ciel noir, privé de Lune, et dans une chaleur… inhabituelle pour la saison. Fin.
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