L'Académie de Lu





Pas encore inscrit ? /


Lien d'invitation discord : https://discord.gg/5GEqPrwCEY


Tous les thèmes
Rechercher dans le texte ou le titre
Expression exacte
Rechercher par auteur
Rechercher par type de défi
Tous les textes


PseudoMot de passe

Mot de passe perdu ?

Le Marchand de RĂŞves


(par Malkym)
(Thème : MĂ©lilĂ©mots 3)



Je suis allergique à la poussière et à toutes les petites particules, en générale.

Oui, cette information semble assez peu utile, je dois l’avouer. Pourtant, c’est bien grâce à quelques grains de poussière que je pus me réveiller. Je ne le vis pas le moins du monde, mais dès lors que cette fine particule effleura mon nez, un picotement parcouru tout mon être et me lança immédiatement dans une ample inspiration, suivie d’un éternuement conséquent. Aussitôt, ma tête bascula en avant, brisant de mon front ce que je reconnus par la suite être une planche de bois. Un faisceau lumineux vint m’éblouir, ce qui eut néanmoins la faculté de me réveiller aussi sec.

Ma conscience me revenant, je cherchai Ă  savoir oĂą j’avais bien pu atterrir. Une douleur atroce me parcourut l’épaule. En tâtonnant de la main, autour de moi, je reconnus les bords de bois d’une caisse, quelque chose de vieux qui s’effrita d’ailleurs un peu Ă  mon contact. En cachant la lumière de ma main, je m’étonnai fortement de voir mon bras recouvert de bandages, comme une bonne partie de mon corps d’ailleurs. Bon sang… Mais que m’était-il arrivĂ© ? Quelques bribes de souvenirs me revinrent… Du rose, une grande explosion, du whisky, de l’acide, un taxi, un pont, et ce mal de tĂŞte, bon sang quel mal de tĂŞte ! Non, mes souvenirs ne faisaient dĂ©finitivement pas de sens. Je n’en avais pas fait mention, mais j’étais Ă©tendu sur un Ă©pais lit de paille. Et vous savez quoi ? Je suis encore plus allergique Ă  la paille. Un nouvel Ă©ternuement vint me faire basculer en arrière, me rĂ©tamant sur quelques planches de bois humides.

AffalĂ© ventre Ă  terre face Ă  un miroir poussiĂ©reux, je constatais la bosse que je venais de me crĂ©er en grimaçant. OuĂŻe… En tentant de me relever, je posai la main sur un plateau qui me revint en plein visage. AĂŻe… Enfin, en m’appuyant contre une paroi de bois, je pus me relever, non sans manquer de glisser sur le lierre la recouvrant, et ainsi constater la cale partiellement vermoulue d’un navire. Cela expliquait au moins l’humiditĂ© et la poussière. Tout restait Ă©tonnamment flou, cependant. En me regardant dans le miroir, l’explication me vint comme un plateau en plein visage : mes lunettes avaient disparu. Et autre Ă©lĂ©ment intĂ©ressant avait son importance. Je me retrouvais quasiment nu, seulement enroulĂ© de vieux bandages qui se dĂ©chiraient par endroits. Ceux recouvrant auparavant mon visage semblaient avoir partiellement chu sur mes Ă©paules. Cela m’arrangeait bien. Dans le cas contraire, je doute que la seule intervention d’un simple grain de poussière ait rĂ©ussi Ă  me rĂ©veiller.

MalgrĂ© cet accoutrement… disons lĂ©ger, je n’avais nullement froid. Ce qui relevait de l’exploit tant je suis frileux. Afin de savoir si le navire dans lequel je m’étais retrouvĂ© se trouvait au milieu des mers, je passai la tĂŞte par un sabord. Je ne vis malheureusement qu’une eau calme Ă  perte de vue. Il n’allait pas ĂŞtre aisĂ© de recouvrer la terre. Tant pis, je trouverais bien une solution. J’examinai de plus près cette cale. Elle Ă©tait emplie de caisses. L’une d’elles dĂ©bordait de boulets de canon huileux. Près d’elle, je vis une montagne de sacs contenant une poudre noire dont l’odeur me piquait les narines. Une autre caisse Ă©tait remplie d’objets d’or et de petits bijoux prĂ©cieux. J’aperçus, entre un rouleau de feuilles dorĂ©es et une petite pyramide ornĂ©e d’une chaĂ®ne et d’un Ĺ“il, un pendentif porteur d’une pierre d’ambre d’un goĂ»t exquis qui me fit de l’œil. Je m’en emparai et l’accrochai Ă  mon cou. Mon sens des prioritĂ©s est discutable, je vous l’accorde. Mais il m’a plutĂ´t bien rĂ©ussi, jusqu’ici. Et puis ce collier Ă©tait très joli, après tout !

Alors que je m’en dĂ©corais, la porte de la cale s’ouvrit d’un coup, soulevant une masse de poussière dans la pièce. AussitĂ´t, j’entendis, Ă  l’extĂ©rieur, une multitude de voix rauques chanter quelques paroles barbares d’un rĂ©cit peu catholique. Je m’accroupis immĂ©diatement derrière la caisse remplie d’or. La porte se claqua et une voix Ă©trangement familière, vint Ă  mes oreilles :

« C’est pas juste ! Pourquoi c’est toujours moi qui doit rapporter la bouffe ? Ils sont pas capables de se lever de leur table, ces pourceaux ? Non ! Bien sĂ»r que non ! Trop occupĂ©s Ă  s’occuper des petites nouvelles ! J’t’en foutrai des pirates sanguinaires, moi… Tous des bons Ă  rien accros au cul et Ă  la bouteille... »

Mille milliards de mille sabords ! Je reconnaissais bien cette voix !

« Shelly ! M’exclamai-je en me relevant. »

Prise d’effroi, elle se recroquevilla dans un coin en brandissant son plateau tel un bouclier.

« Vous ĂŞtes le fantĂ´me du Pharaon ?! C’est ça ?! Vous allez me tuer ? Ou pire encore ?! Je me laisserai pas faire, je vous prĂ©viens ! Paniqua-t-elle, sans mĂŞme attendre de rĂ©ponse.

Je songeais rapidement à la situation. Vraisemblablement, elle ne me reconnaissait pas. Je n’y avais pas pensé, mais il est vrai que me confondre avec une momie aurait été chose aisée, avec tous ses bandages. Et puis le pendentif devait bien aider à me faire passer pour

Interrompant ma rĂ©flexion, elle me jeta son plateau au visage ! Ouille…

« Je vous l’avais dit ! Je sais me battre, moi ! Alors vous ĂŞtes bien le Pharaon[, hein ?!

— … Oui ! Oui, oui ! C’est bien moi, le Pharaon… euh…

— Toutanmohkète ! Le despote sanguinaire !

— Exactement ! Toutanmohkète ! Et… euh… Et je viens purifier les ocĂ©ans de vos pitoyables existences, Ă  vous autres pirates !

— Non, mais je suis pas une pirate, moi, hein ! Je suis que leur servante ! Ils m’ont capturĂ© il y a une semaine alors que mon ancien maĂ®tre et moi parcourions le dĂ©sert de San Domino !

— On est allĂ©s Ă  San Domino, nous ? Enfin, j’veux dire… Et quel rapport il y a-t-il avec ma prĂ©sence en ces lieux ?

— Nous avions dĂ©couvert un grand temple, et y sommes entrĂ©s, parce que la chaleur Ă©tait Ă©touffante, Ă  l’extĂ©rieur. Et nous sommes tombĂ©s sur votre sarphoc… sacophra… votre boĂ®te ! On Ă©tait curieux, alors on l’a ouverte. Mais lĂ , vous nous avez attaquĂ©s, en hurlant qu’on Ă©tait maudits ! Vous vous souvenez pas ?

— Eh bien… Si ! Si, si ! Bien sĂ»r ! Mais comment par quel miracle me suis-je retrouvĂ© au fin fond de ce navire, croupissant dans une vieille caisse ?

— Je saurai pas trop vous dire. J’ai perdu connaissance durant le combat, juste après avoir accidentellement tirĂ© sur mon ami…

— Ça explique la douleur Ă  l’épaule.

— Quoi ?

— Je disais… Rien du tout ! Et… euh… Tu ferais mieux de te prĂ©parer, misĂ©rable crĂ©ature ! Tu es sur le point de goĂ»ter Ă  la magie des anciens, pour avoir osĂ© ouvrir mon tombeau ! Je vais te rĂ©duire en cendres, pauvre insecte ! »

Je dois bien avouer que je ne l’avais pas du tout préparé, celle-ci. C’était une belle improvisation. J’en étais très fier. Par contre, je n’avais pas tellement de magie sur moi. Aussi, je ramassai le plateau qu’elle m’avait envoyé et lui jeta au visage. Elle s’effondra dans l’inconscience.

« Eh bien, Abracadabra, je suppose. »

Une fois de plus, Shelly avait usĂ© de sa lĂ©gendaire maladresse pour nous fourrer elle et moi dans une situation invraisemblable ! Je n’avais plus qu’à trouver un moyen de sortir d’ici. Je pouvais peut-ĂŞtre compter sur mon apparence momifique afin de faire pression sur cette meute de bandits bedonnants !

Pour assurer un peu plus le coup, je me recouvrai de quelques tiges de lierre, qui se baladaient çà et là sur les parois de la cale. Je ressemblais enfin à un authentique revenant. Je pris mon élan ainsi que le plus d’assurance possible avant d’enfoncer la porte menant au pont.

« Tremblez, vils malandrins et autres enfants de putains ! Car voici venir l’illustre Pharaon Toutanmohkète, le terrible souverain qui mit tout San Domino Ă  genoux par la seule puissance de sa magie et de son sanguinaire esprit guerrier ! »

Aussitôt, les bardes cessèrent de jouer, les chants se turent, les danses se ralentirent jusqu’à l’arrêt, tous reposèrent leur nourriture et leurs bouteilles pour poser leurs regards sur le pharaon. Je n’arrivais pas à croire que cette pitoyable stratégie ait pu fonctionner. Un petit moustachu courut dans la cabine de son capitaine.

Quelques instants après, un type haut comme une montagne passa avec difficulté par l’encadrement de la porte. Il dut passer une épaule après l’autre pour enfin se retrouver sur le pont, derrière ses hommes et les tables. Habillé d’une longue veste rouge décorée d’épaulettes et de dorures ainsi que d’un grand chapeau de cuir noir, c’était sans conteste le capitaine de ce navire. Ses pas lourds et lents firent trembler les planches de tout le bâtiment. Ces dernières semblaient peiner pour ne pas se briser sous le poids monstrueux du colosse à la barbe… colossale. La longue cicatrice traçait une parfaite diagonale sur le visage bourru du capitaine. Il n’y avait pas à dire, c’était le design le plus basique et cliché du monde pour représenter un pirate. Sur ce coup-là, je ne m’étais pas trop foulé, ça se voyait.

Le monstre barbu se pencha en avant pour s’adresser Ă  moi, dĂ©voilant une large gamme de caries de formes variĂ©es ainsi qu’une haleine fĂ©tide, aux accents de vodka et de moule peu fraĂ®che, nĂ©anmoins agrĂ©mentĂ©s d’une subtile flagrance mentholĂ©e, mais je m’égare. Il prit un ton moqueur :

« Alors comme ça, t’as interrompu le repas de mes gars ? Et j’peux savoir Ă  qui je m’adresse, avorton ?

— N’as-tu pas entendu ce que je viens de hurler ? Je suis

le grand Pharaon Toutanmohkète, dĂ©tenteur de la magie des anciens ! Pourfendeur de… des Tribus des Sables ! Chef d’une armĂ©e de damnĂ©s sanguinaires ! Et Souverain des terres arides de San Domino !

— Mouais… et qu’est-ce que tu veux, exactement ?

— Quoi ? Vous n’êtes pas… au moins un peu… effrayĂ©s ?

— Écoute, la moitiĂ© de mes gars sont des violeurs et des tueurs avides de sang, de combats, de richesses et de mort. L’autre moitiĂ©... l’était. Et est revenue des Enfers pour me servir Ă  travers l’éternitĂ© ! Tu crois sĂ©rieusement qu’on a des tĂŞtes Ă  avoir peur ? »

Il fallait bien avouer que les types ressemblant à des squelettes, des morts-vivants et des fantômes, qui se trouvaient sur le pont, auraient dû me mettre la puce à l’oreille. Mais je dois bien avouer n’y avoir pas prêter grande attention.

« Eh bien ! Repris-je. Tu devrais pourtant te tordre d’effroi en constatant ma toute-puissance ! Pour te prouver que je suis bel et bien un pharaon sanguinaire, je… eh bien… je… Je sais ! Je te dĂ©fie ! Nous nous affronterons dans un duel Ă  mort ! Pas de quartier, pas de pitiĂ©, rien que ton trĂ©pas ! »

Un silence plana. Puis tout l’équipage fut pris d’un fou rire, plié devant ma tordante proposition. Le capitaine fut à deux doigts de se rouler au sol, tant il était amusé par la demande. Je restai devant la porte de la cale, mon lierre et mes bandages au vent, attendant la réponse, pointant le capitaine du doigt en signe de défi. Le colosse se redressa enfin et tira son pistolet de sa ceinture.

« Soit ! Toi, lĂ  ! Le petit moustachu, tu nous serviras d’arbitre.

— Pas si vite ! Il nous faut fixer les conditions, non ?

— Quoi ? Tu es sĂ©rieux ? Tu crois vraiment avoir la moindre chance de pouvoir tirer quoi que ce soit de cet affrontement. Tu vas juste mourir. T’as rien Ă  m’offrir.

— Tout le monde Ă  quelque chose Ă  offrir, croyez-moi ! Alors… si je gagne, ce navire et tout son Ă©quipage seront miens !

— Ah ouais ! Tu vises haut, avorton ! On peut dire que tu as du cran. Et si je gagne ?

— Si tu gagnes, je m’engage Ă  ne pas revenir hanter vos misĂ©rables vies, Ă  toi et chacun de tes membres d’équipage, qui avez osĂ© manquer de respect Ă  un souverain de mon rang !

— Ce n’est pas assez. Disons plutĂ´t que tu deviendras mon serviteur dans l’éternitĂ© et rejoindras mes hommes en tant que racleur des fonds de chiottes. Ça te va ?

— Non ! Je ne prĂ©fĂ©rerai pas que…

— Parfait ! Dans ce cas, prends donc ton arme.

— Vous pourriez me prĂŞter un sabre, au moins ?

— Non. Allez ! Vas-y, petit moustachu ! »

10 !

Ok… ok… RĂ©flĂ©chis, Malkym !

9 !

Il y a forcément un moyen de te sortir de cette épineuse situation. Il suffit de prendre le problème sous un autre angle.

8 !

Je pourrais simplement esquiver son coup ! Non, il ne ratera certainement pas un tir de pistolet Ă  bout portant.

7 !

Bon… Encore sept secondes pour réfléchir, c’est bien plus de temps qu’il ne m’en faut pour trouver un moyen de me sortir de cette situation de m

Sans plus attendre le capitaine tira en plein dans mon ventre, me faisant valser Ă  travers la cale. Il avait trichĂ©. Évidemment. Après tout, fallait-il vraiment en attendre plus d’un pirate ? J’entendis les rires de tout l’équipage Ă  l’extĂ©rieur. Il faut croire que je fus le seul Ă  ne pas m’y attendre. Dans les fictions, les pirates ont un code, non ? Un peu d’honneur, au moins ?

Je toussai un peu de sang qui vint se joindre Ă  celui jaillissant de mon estomac. La dĂ©tonation ne m’avait pas manquĂ©, bien loin de lĂ . J’avais Ă©tĂ© projetĂ© jusqu’au fond de la cale, contre les caisses de boulets de canon. Après toutes mes folles aventures Ă  travers la fiction, c’est ici que se terminait la formidable histoire de Malkym, le gĂ©nial Garde de Nuit, destructeur d’AcadĂ©mie, dĂ©tenteur d’un swag absolu et d’un style fou, notamment grâce Ă  ce joli collier. Celui-ci s’était d’ailleurs brisĂ© lorsque la chevrotine l’eut touchĂ©. Il m’a peut-ĂŞtre sauvĂ©, mais j’allais mourir sans aucun style ! Et sans mĂŞme mes fameuses lunettes ! Ça tenait vraiment du scandale !

Je poussai un petit cri, étouffé de sang, pour interpeller le capitaine. Il pénétra avec difficulté dans la cale et fixa mon corps meurtri du regard.

Il approcha le canon de son pistolet de mon visage, certainement pour m’achever. L’odeur de la poudre à canon de son pistolet vint me piquer les narines. Alors qu’il s’apprêtait à faire détoner son arme, il ne savait pas une chose.

Je suis allergique à la poussière, et à toutes les petites particules, en générale.

Lorsque le coup de feu fut tiré, je basculai en avant sous la force de mon éternuement. Toute la chevrotine jaillissante du pistolet pénétra dans la caisse de boulets de canon qui, copieusement graissés, s’enflammèrent. La dernière chose dont je me souviens avant de sombrer dans l’inconscience fut le souffle ainsi que l’intense lumière de l’explosion de la montagne de sacs de poudre à canon, entreposé à mes côtés, qui se refléta sur le visage déconfit et étonné du capitaine, qui prit une, étrangement familière, mine surprise, typique du « Je viens de faire une bourde ».


FIN.










Cette histoire fait partie d'un tout plus grand !











Ellumyne

Excellent ton texte ! Très drôle, bien écrit, les mots sont bien placés. Et ce final, absolument génial !


Le 07/06/2021 à 20:59:00



Elinor

Non, mes souvenirs ne faisaient définitivement pas de sens.... ne faisaient pas sens ou n'avaient pas de sens, mais pas un mix des deux. ^^ Ceci dit... J'aime beaucoup, comme à chaque fois. Un plaisir de te retrouver, toi et ta tête /tes chevilles sur dimensionnée tout comme Shelly qui a déjà fait un tour à l'académie. On arrive à entendre tes intonations à travers ton texte et je trouve ça très sympa ^^. Hate de voir quand et comment ce cher Malkym reviendra à l'Academie, parce l'académie sans tous ses élèves c'est moins bien...


Le 09/06/2021 à 09:25:00

















© 2021 • Conditions générales d'utilisationsMentions légalesHaut de page