Remontrances
(par Lu' Directrice)(Thème : MĂ©lilĂ©mots 3)
Satis n’osait pas relever la tête. La douleur pulsait dans sa bouche, mais elle savait que ce n’était rien par rapport à la colère de son pharaon s’il savait ce qu’elle avait fait. Et il le savait, elle en était persuadée. Il ne l’aurait pas convoquée pour rien.
— Sais-tu, ma chère fille, ce qui peut me détourner d’une pastèque aussi fraîche qu’exquise ?
La jeune femme secoua doucement la tête. La simple évocation du melon d’eau la fit frémir. Ce que cette carie pouvait la lancer. Amon se pencha sur son trône, se rapprochant d’elle. Elle leva légèrement les yeux pour le regarder. Ainsi plié en deux sur son trône, il faisait vieux. Bien plus vieux que son âge réel. Ses doigts parcouraient machinalement les bas-reliefs gravés sur son siège, un entrelacs de lierres savamment organisés en motifs géométriques, les feuilles formant des cercles, les tiges se croisant en de parfaites diagonales.
— Apprendre que ma fille joue les pirates en ville, semant le chaos dans toute la capitale. Avec une bande de voleurs.
La pierre crissa sous ses doigts. Satis déglutit difficilement, grimaçant sous la douleur. Elle était certaine qu’il le savait, il ne pouvait pas ne pas en avoir entendu parler. Surtout lorsqu’Iséri, son général, l’avait surprise alors qu’elle fuyait le lieu de l’un de leurs crimes.
Il frappa son siège du poing, la faisant sursauter.
— Tu as quelque chose à dire pour ta défense ?
Elle secoua la tête, incapable d’ouvrir la bouche. Il était l’arbitre de ce jeu qu’elle avait entrepris, et elle avait fauté, elle s’était fait prendre, elle allait devoir sortir du terrain. Mais quel sort lui réservait-il ?
— Isis serait très déçue de ce que tu as fait.
Au nom de la déesse, Satis se laissa tomber à genoux. Elle la vénérait, l’idée qu’elle ait pu la décevoir lui était insupportable.
— Satis, je t’ordonne d’aller au temple demander son pardon. Fais-toi purifier par les prêtresses, repends-toi, montre-lui ta vénération, et lorsque tu auras fait le nécessaire, chante ses louanges jusqu’au matin.
Satis hocha lentement la tĂŞte.
— Va !
La jeune femme se releva et se retourna pour sortir. Elle attendit d’être sortie de la salle du trône avant de porter la main à sa bouche. La douleur était telle que les larmes lui montaient aux yeux. Ça lui apprendrait à voler l’un des magasins de confiserie de la ville.