Comment ça va ?
(par JilanoAlhuin)(Thème : Mélilemots 9)
Cette phrase, vous l’avez sans doute entendue tellement de fois que vous ne les comptez plus, tout comme ses réponses. Elle est tellement hypnotique que c’est devenu un automatisme de demander « comment ça va ? » pour la plupart. Pour les chanceux, vous répondez « ça va ». Pour les autres, vous répondez que ça ne va pas, et les gens vous tendent leurs mains pour vous remonter le moral. C’est beau, n’est-ce pas ?
Pourtant, il y a les réponses silencieuses. Non, ça ne va pas, et pourtant ça va. En tout cas, vous ne pouvez pas dire que ça ne va pas, puisqu’il n’y a rien. Quand ça arrive, on dit « ça va », car il n’y a pas de raison de ne pas aller bien s’il n’y a rien, pas vrai ?
Puis, on n’a plus la force de dire ça va. Mais on ne peut pas dire que ça ne va pas. Après tout, que se passe-t-il, si ce n’est rien ? Alors on fond dans la masse, on disparait. On dit un simple bonjour, et on disparait. On observe. On espionne.
On se créé cette petite coquille, des plus résistantes. On a tellement disparu qu’on fini par se sentir vide. Simplement vide. Autour de vous, il n’y a que l’obscurité. Du moins, c’est la seule chose que l’on voit puisqu’on ne voit rien. Parfois, une petite lanterne apparait et joue devant vos yeux. Elle est aveuglante, séduisante. Vous ne voyez plus qu’elle. Juste cette petite lumière qui vous observe. Elle est magnifique. Vous ne savez rien de celle-ci, et pourtant vous l’aimez déjà. Vous êtes seul, là où il n’y a rien, et cette lueur est la seule chose qui se montre à vous, qui vous illumine, vous donne parfois la force que vous cherchez temps, vous donne la chose qui vous fait vous dire « ça va ».
Alors vous tentez d’attraper la lueur. Quand vous l’attrapez, vous croyez tout avoir. Le vide a disparu. Elle vous guide. Elle vous tire vers l’avant. Vous la suivez. Après tout, elle vous illumine le chemin, là où il n’y a rien. Vous ne réfléchissez même plus ; vous avez déjà perdu le contrôle.
Vous vous arrêtez. Devant vous, il y a un trou dont vous ne voyez pas le fond. Vous ne savez même pas si c’est un trou, ou si c’est votre imagination. Vous vous tournez vers la lumière, qui vous pousse à y aller. Parfois, elle vous pousse dedans, parfois vous vous y jetez vous-même, en pensant pouvoir lui rendre sa lumière qu’elle vous a donné.
Vous sautez, vous tombez… Vous retrouvez le vide, sans lumière. La panique vous gagne. Vous fermez les yeux. Au fond, vous ne voulez pas les rouvrir. Pourquoi le faire, quand tout dans votre être vous implore de ne pas le faire ? Alors vous restez les yeux fermés. Vous cherchez, vous cherchez à quelque chose pour vous raccrocher. Des souvenirs reviennent. Enfant insouciant, ado rebelle, le plus sage des agneaux ou plus noir des canards, personne n’a à se soucier de ces instants. Vous n’étiez qu’un enfant. La nostalgie vous gagne, et vous songez à retourner là-bas. Peut-être que vous pouvez remonter et y aller ?
Vous rouvrez les yeux. Vous chutez toujours, dans ce vide qui vous torture, vous hante, vous tue. Alors vous vous refermez. Vous préférez vous enfermer. Vos rêves d’enfants, vos souvenirs de jeunesse, vos prières d’adultes. N’importe quoi. Vous commencez à couper tout autour de vous. Vous pensez que seul dans cet endroit, vous êtes à votre place.
Et vous tombez, encore et encore, sans jamais toucher le fond.
Je tombe.