L'Académie de Lu





Pas encore inscrit ? /


Lien d'invitation discord : https://discord.gg/5GEqPrwCEY


Tous les thèmes
Rechercher dans le texte ou le titre
Expression exacte
Rechercher par auteur
Rechercher par type de défi
Tous les textes


PseudoMot de passe

Mot de passe perdu ?

Collaboration globale avec 20 personnages

Academy Universe - ancien lore


La jeune fille frissonne, encore et encore...

(par Faucheuse)
(Thème : frissons)



Anaïs se balançait sur sa chaise à bascule, regardant par la fenêtre. Ses cheveux roux étaient chiffonés, presque sale. Son regard était triste, presque éteint. Sur son corps, une grosse couverture. La jeune fille frissonnait tout le temps, comme si elle était gelée. Sur ses genoux, un journal intime disait « je veux disparaître, je veux disparaître, je veux disparaître, je veux disparaître ». Sa mère, Audrey, passa derrière elle. Elle regarda sa fille un court instant et baissa les yeux avant de quitter la pièce. Elle souffrait de voir sa fille dans cet état mais ne savait pas quoi faire pour soulager sa souffrance. À 15 ans, Anaïs ne souhaitait plus s’accrocher à la vie. Cela faisait bien longtemps que cette situation perdurait.

Christophe, le père d’Anaïs, arriva à son tour. Il s’approcha de sa fille et embrassa le haut de la tête. Elle souffrait. Il savait qu’il était partiellement responsable de la situation, mais il ne comptait pas la laisser tomber. La jeune fille se retourna vers lui, lentement. Son regard s’embua de larmes mais ce qu’elle voulait exprimer, elle ne parvint pas à le formuler. Les mots moururent avant d’avoir pris vie. Anaïs ferma les yeux et se retourna, replongeant son regard dans le lointain. Le soir venu, Christophe et Audrey dinèrent. La table était dressée pour trois personnes mais Anaïs resta sur sa chaise. Les volets avaient été fermés mais elle continuait de fixer la fenêtre, comme si elle y voyait une forme de salut.

— Elle va mal, Christophe, dit finalement Audrey.

— Je sais. Mais qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ? Qu’on la laisse partir ?

— Je… C’est pas ce que je dis, mais…

— Mais quoi ? On en a dĂ©jĂ  parlĂ©. C’est elle qui doit reprendre pied.

— C’est pas si simple. Si elle a si mal, c’est…

— Laisse tomber. Je la laisserai pas tomber, moi.

Audrey baissa les yeux et termina son repas dans un silence absolu. Lorsqu’ils eurent fini le repas, Christophe emmena son assiette à Anaïs. Il se baissa pour se placer à son niveau et la regarda dans les yeux.

— Il faut que tu manges, AnaĂŻs. Tu veux bien faire un effort ?

La jeune fille serra la couverture contre elle, frissonnant toujours. Ses yeux azur se tournèrent vers son père et elle hocha mollement de la tête. Elle prit une portion ténue du repas et reposa l’assiette sur l’accoudoir avant de fermer les yeux. Le père se releva, reprit les couverts et fit la vaisselle, abandonnant sa fille unique aux bras de Morphée. Audrey l’entendit descendre à la cave. Il y resta enfermé une heure et remonta pour se coucher dans le lit conjugal.

— Tu as recommencĂ© ?

— Je vois pas en quoi ça te…

— Regarde ? T’es sĂ©rieux ? Bien sĂ»r que ce que tu fais en bas me regarde. Ça a des consĂ©quences sur tout le monde. Regarde ta fille, bon sang. Elle veut partir, bon sang. Et tu sais très bien que ce que tu fais dans…

— Tais toi, Audrey ! l’interrompit-il. Je ne te permets pas de remettre en question mes activitĂ©s.

— MĂŞme si ça rend ta fille si triste. Tu crois pas qu’il y aurait mieux Ă  faire ?

— Genre, passer du temps avec elle ?

— Par exemple, oui.

— Ce n’est pas ça qui l’aidera et tu le sais très bien. Ce que je fais dans cette cave, c’est essentiel pour elle. Maintenant, je ne veux plus t’entendre parler de ça.

Audrey se tut, éteignit la lumière et se tourna vers le mur blanc, le fixant pendant des heures avant de parvenir à s’endormir.

Le lendemain, lorsqu’elle se réveilla, son époux n’était plus dans le lit. Elle se leva et, comme tous les matins, s’approcha d’Anaïs, osant à peine la regarder. Elle n’avait pas bougé de sa chaise, pourtant, Audrey n’était pas sûre qu’elle avait dormi. La fatigue se lisait sur ses yeux. La fatigue, ou la lassitude, sans qu’elle ne puisse en être vraiment certaine. Elle ouvrit les volets pour permettre à sa fille d’avoir au moins quelque chose à regarder et prépara le petit-déjeuner. Un petit-déjeuner que sa fille toucherait à peine.

— Maman… appela AnaĂŻs.

Audrey se précipita vers sa fille à toute vitesse, tant il était rare qu’elle émette le moindre son.

— Qu’est-ce qu’il y a ma fille ? Qu’est-ce que je peux faire pour toi ?

— Dis Ă  papa que je veux partir. Dis Ă  papa que j’en ai marre.

— Je sais, AnaĂŻs, je le sais bien, rĂ©pondit Audrey, les larmes aux yeux. Mais il ne veut pas en entendre parler. Il ne veut pas.

— Tu comprends, toi ? Tu es d’accord ?

Audrey ne répondit pas. Évidemment qu’elle ne voulait pas voir sa fille disparaître, mais elle n’en pouvait plus de la voir souffrir. Elle décida qu’il était temps qu’elle ose en fait s’opposer réellement à Christophe. Lorsqu’il rentrerait du travail, tout changerait. Elle descendit à la cave pour attendre son mari. Ce serait le premier endroit où il se rendrait, bien avant de faire quoi que ce soit d’autre.

Le soir venu, cela ne manqua pas. Christophe se rendit aussitôt à la cave une fois qu’il fut rentré. Il descendit la dizaine de marche et alluma la lumière. Audrey l’attendait.

— Qu’est-ce que tu fais lĂ , Audrey ? Je t’ai dĂ©jĂ  dis que tu ne devais pas descendre ici ! Il y a des choses très fragiles ici !

— Comme ta prĂ©cieuse poupĂ©e ?

Christophe regarda avec effroi la poupée que tenait son épouse dans la main.

— Pose ça tout de suite !

— Ou sinon quoi ?

Christophe s’approcha d’Audrey, mais elle fit mine de vouloir couper la poupée en deux.

— C’est tout ce qui…

— Oui, je sais, la coupa Audrey. Mais je n’hĂ©siterais pas. Maintenant, c’est toi qui va m’écouter. On va aller voir AnaĂŻs et tu vas m’écouter.

Le mari serra les poings, fou de rage, et se rendit avec son épouse jusqu’à la chaise à bascule.

— Regarde ta fille, Christophe ! Regarde-la ! Regarde-la vraiment ! Elle frisonne parce qu’elle est dĂ©jĂ  lĂ -bas.

Christophe regarda Anaïs, qui le regardait en retour. Cela faisait longtemps qu’il ne l’avait pas vraiment regardé. Il avait presque oublié que la moitié gauche de son visage était à moitié arrachée.

— Ça fait quinze ans, Christophe ! Quinze ans !

— Je peux pas la laisser disparaĂ®tre, hurla-t-il.

— Elle frisonne parce qu’elle y est dĂ©jĂ . L’étreinte de la mort l’a dĂ©jĂ  prise ! Tu as peut-ĂŞtre fais des choses de dingue avec tes trucs magiques. Mais ça fait quinze ans qu’elle a Ă©tĂ© Ă©crasĂ© par ce camion. Cette poupĂ©e, c’est tout ce qu’il nous reste d’elle. Accepte de la dĂ©truire… Accepte qu’elle parte. Elle souffre… depuis quinze ans Ă  cause de toi…

Christophe baissa les yeux et remua lentement la tête de bas en haut. Anaïs fit un sourire. Pour la première fois depuis quinze ans. Le couple dit au revoir à leur fille et la poupée fut brisée. La magie disparut. Anaïs aussi.




























© 2021 • Conditions générales d'utilisationsMentions légalesHaut de page