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![]() ![]() Contraintes aléatoires Contraintes à sélectionner soi-même Testeur d'auxiliaire Situations aléatoires (défi de Schrödinger) Textes sans commentaires Générateur de situation/synopsis ![]() Ă€ la manière du western
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Malkym![]() Spectacles![]() ![]() ![]() Le portrait(par Zandra-Chan)Elle poussa la porte d’entrée avec un soupir. Elle espérait que, cette fois, elle ne se ferait pas mettre dehors dès les premières minutes. Elle avait pris rendez-vous par téléphone pour cette raison. Elle s’était apprêtée au mieux – selon ce qu’elle avait appris – et priait pour que son sourire soit aussi doux qu’affable aux yeux de son futur interlocuteur. Nerveuse, elle tressauta presque quand une petite mélodie s’éleva du capteur de présence, signalant son arrivée dans la boutique. — J’arrive ! J’arrive ! fit une voix depuis le fond. C’était la même voix qu’au téléphone. La visiteuse osa un pas et discerna bien vite la porte placardée d’un panneau “entrée réservée au personnel” entrebâillée. Un jeune homme ne tarda pas à en sortir, un chiffon dans une main, un objectif dans l’autre. Il manqua de lâcher l’un et l’autre quand ses yeux se posèrent sur la personne qui l’attendait sagement de l’autre côté du comptoir. Une femme, immense, aux cheveux longs, lisses, noirs ténèbres. Son teint de cendre contrastait avec ses lèvres rouge sang. Sang… comme ses yeux, ses deux iris presque luminescents, hypnotisants. Elle ne faisait rien, ne bougeait pas, respirait tout juste – respirait-elle seulement ? – et pourtant, l’homme se sentait écrasé, étouffé par sa présence. Il tenta de regagner contenance. — Vous… vous avez rendez-vous ? souffla-t-il difficilement. — … oui. Il était encore trop sous le choc pour percevoir l’hésitation dans sa réponse. Il ne voyait pas non plus qu’elle était aussi nerveuse que lui. Elle voulait se montrer affable, mais ne devait surtout pas sourire ; avancer vers lui pour tenter de lui serrer la main allait le terroriser à coup sûr – elle en avait déjà fait l’expérience – mais rester plantée là n’allait certainement pas l’aider non plus. — Je… C’est pour une… euh… une photo d’identité, émit-elle, brisant un silence qui commençait à se faire pesant. Le pauvre bonhomme hocha la tête, déglutit et l’invita à la suivre d’un faible mouvement de bras. Il la surveillait, elle en était sûre. Il se retournait trop souvent pour que ce soit naturel. Elle ne pouvait pas lui en vouloir. C’était déjà un miracle qu’il ait accepté sa présence ; ses précédentes tentatives s’étaient toutes arrêtées sur le pas de la porte. C’était la première fois qu’elle allait si loin. Si son cœur était encore actif, il aurait battu la chamade. Il la fit asseoir sur un petit siège, au milieu de panneaux réfléchissants et de parapluies noirs. Le photographe nerveux installa l’objectif sur l’appareil d’une main qui se voulait assurée. Elle se tortillait sur le siège trop bas, une question coincée dans la gorge. Il ne remarqua rien ; il s’était volontairement perdu dans les paramètres de sa petite machine, comme pour éviter d’avoir à poser les yeux sur son futur sujet. Il ne releva la tête vers elle que quand elle parvint enfin à poser sa question. — Ça va faire mal ? Trop stupéfait par la question, il en oublia d’avoir peur. — … pardon ? — … je… C’est la première fois qu’on me… euh… “tire le portrait”, alors… je voulais savoir… Le jeune homme demeura silencieux une poignée de secondes. Si son interlocutrice n’était si grande que son crâne frôlait le plafond, son regard de braise si intimidant et sa peau aussi pâle que celle d’un mort, il aurait peut-être ri. Peut-être. — Non, une photo, c’est parfaitement sans douleur. Elle sembla soulagée de sa réponse et ses épaules, jusque-là remontées par la tension, descendirent un peu. Perplexe, il l’observa encore un peu. — … à moins que vous ne fixiez le flash… ajouta-t-il. Elle se redressa immédiatement, soudain en alerte. — Le “flash” ? Le photographe, amusé par la réaction de cette femme aux airs dangereux, pointa le boîtier de l’éclairage qui surplomblait son appareil photo. — Ceci. Ça émet une lumière vive quand la photo est prise. Ça éblouit quand on le regarde. C’est tout. Rien de dangereux. Elle se détendit à nouveau. Elle ne connaissait rien à la technologie humaine, et savoir qu’elle ne risquait rien – à priori – la rassurait. Après tout, il pouvait très bien lui mentir. Mais elle saurait se défendre. il faudrait juste qu’elle parvienne à ne pas le tuer. Trop de complications. Elle nota qu’il l’observait avec un regard différent. De peur indicible, il était passé à une curiosité craintive. Il semblait surtout vouloir dire quelque chose. Il passa l’œil derrière son objectif encore une fois avant de prendre un air embêté. — Je suis désolé madame, mais il va falloir descendre encore le siège. Mon trépied ne va pas plus haut. — Ah, oui, bien sûr. Elle se leva, toisant involontairement son interlocuteur qui ajusta le siège pour elle, voyant qu’elle ne trouvait pas le mécanisme caché sous l’assise. Il se replaça derrière son appareil photo. — Mieux, fit-il avec l’assurance retrouvée du professionnel. Je vais vous demander de pivoter un peu… oui, parfait. Levez un touuuut petit peu la tête… Excellent. Ne bougez pas. Regardez bien l’objectif… Il sourit. — … et pas le flash, hein. Cet humain serait-il en train de se moquer d’elle ? Elle n’aurait été si stressée qu’elle en aurait sans doute pris ombrage. Il pressa enfin le bouton. L’appareil émit une vive lumière. La femme manqua de se transformer sous la surprise. Elle se retint difficilement de balayer l’espace devant d’elle d’un large coup de griffes. — Ne bougez pas, je vais en faire d’autres, vous me direz laquelle vous voulez garder. Ah parce qu’il allait recommencer ? Elle serra la mâchoire, se crispant sur le siège trop bas et trop petit. — Détendez-vous, lança-t-il, clairement amusé. Je fais vite.
La confiance du photographe, acquise en voyant le côté ingénu de son étrange cliente, fondit comme neige au soleil quand elle se pencha sur lui pour observer les photos prises sur le petit écran numérique. Il se décomposa plus encore en passant de cliché en cliché. La femme scruta l’appareil avant d’émettre un soupir déçu. — … J’aurais dû m’en douter… Elle n'apparaissait sur aucune photo. |