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Schrödinger![]() Spectacles![]() ![]() La galère des Enfers(par Schrödinger)La scène est une vaste crique, entourée de falaises de pierre sombre, semblant se perdre dans le plafond de la caverne. Un fleuve aux eaux grises, vaguement phosphorescent, clapote sur les berges de sable noir, arrosant des bouquets de coquelicots violets qui y poussent tant bien que mal. L'écume semble prendre la forme de silhouettes torturées et gémissantes, tentant de s'accrocher de leurs griffes au ponton vermoulu qui surplombe les flots, mais incapables d'y poser un doigt sans se déliter avec un grincement béat. L'obscurité profonde qui étouffe les lieux sinistres est vaillamment combattue par une poignée de braseros, rassemblés au pied d'une porte massive, sans linteaux, d'un noir d'encre veiné de rivières de larmes rouge sang. L'angoisse imprégnant les lieux n'est atténuée que par deux choses: d'une part, les bouquets de coquelicots de toutes les couleurs qui parsèment les alentours du portail, et d'autre part le haut grenadier presque brillant qui s'élève dans un coin, près d'un rocher gigantesque, au pied duquel discutent trois silhouettes. L'une d'entre elle semble ne faire qu'un avec le décor, sa toge sombre s'accordant avec la couleur de ses cheveux et de sa barbe soigneusement taillée pour contraster sa peau d'une pâleur maladive. L'homme semble lancé dans des explications exaspérées, tentant de récupérer l'attention d'un second individu en tout point son contraire: teint bronzé, toge et sandales immaculées, barbe fournie d'un blanc tirant sur le bleu-vert, il écoute distraitement son vis-à -vis, avachi contre l'arbre, l'air de s'ennuyer profondément. Quant à la troisième silhouette, celle d'une jeune femme brune vêtue d'une toge renforcée de pièces d'armure, elle se tient droite, l'air sérieux, caressant d'une main la petite chouette posée sur son épaule. L'homme sombre conclut son exposé d'un grand geste agacé: HADES C'est bon, vous avez bien compris? POSEIDON, nonchalant Mais oui, t'en fais pas Hady! On gère la fougère, de toute façon c'est pas bien compliqué, ton job… ATHENA, mollement Tu peux compter sur moi, mon oncle. HADES, sans joie Merveilleux! (Marmonnant dans sa barbe) Finalement je sais pas si c'était l'idée du siècle… (Continuant plus fort, il fait un grand geste pour désigner un long parchemin placardé sur la porte, près de Poséidon) De toute façon, en cas de doute, tout ce que je vous ai raconté est écrit là , vous pouvez pas vous tromper! Bon, c'est pas tout ça, moi j'ai encore beaucoup de travail en aval pour préparer leur séjour, alors je vous laisse. Oh, et surtout, surtout, vous vous contentez de vérifier leur identité, vous me les envoyez pas aux Champs du châtiment parce que leur tête vous revient pas! Vu? POSEIDON, peu concerné Mais oui, t'en fais pas. ATHENA, sérieuse Bien sûr mon oncle! HADES Bon. Avec un dernier regard soupçonneux, il disparaît, comme avalé par le sol. Athéna, diligente, se dirige vers le petit guéridon de mauvais goût posé debout près de la porte et feuillette la longue, longue liste de noms inscrits sur les pages qui y sont éparpillées. Poséidon jette un regard aux alentours, vérifiant qu'il n'y a personne, absolument personne, avant d'interpeler sa nièce: POSEIDON Athéna! Psst, Athéna! ATHENA, sans se retourner Qu'est-ce qu'il y a, mon oncle? Si ça peut attendre, mettez-vous en place qu'on en finisse vite. Les premiers ne devraient pas tarder à arriver… POSEIDON Eh bien justement, avant qu'ils arrivent, il faut qu'on se mette de d'accord sur nos pseudonymes. Intriguée, la Déesse se retourne vers le Dieu des Océans, qui la rejoins d'un air conspirateur. ATHENA Mais qu'est-ce que tu viens me chanter là , encore? POSEIDON Oh, allons, ne soit pas bête! On ne peut décemment pas laisser des mortels nous voir ici, ça irait à l'encontre de notre réputation, de notre image! Il en va de notre crédibilité, nom d'Ouranos! ATHENA, sceptique Notre…crédibilité? Je ne te suis pas, qu'est-ce que ça peut faire de toute façon? Personne ne sortira d'ici, dans tous les cas. POSEIDON Personne, personne… Rappelle-toi d'Orphée! Et Psyché! Et Hercule! Non, moi je te le dis, Cerbère est une vraie passoire… Entendant son nom, le rocher auprès duquel se tenait tantôt Athéna remue et les trois têtes d'un chien titanesque se redressent, bâillant à qui mieux mieux. Encore groggy de sommeil, il pousse un gémissement curieux à l'adresse de Poséidon. POSEIDON, au molosse Ah, non, je t'appelais pas, tu peux te rendormir! (À Athéna) Enfin bon, fais comme tu veux, mais moi en tout cas, je veux pas qu'on me reconnaisse, alors, ne m'appelle surtout pas Poséidon! Appelle-moi, hmm… (Son regard erre un peu partout pendant qu'il réfléchit) Poséi-non, trop proche… Polyphè-ah, non, c'est un cyclope… Po…Phi…Pe…Pa… (Son regard tombe sur le parchemin placardé sur la porte) Pa-Paragraphe, voilà , appelle-moi Paragraphe! Il croise les bras, l'air très content de lui. Athéna lève les yeux au ciel et se détourne sans un mot. Quelques instants plus tard, une galère fend les flots du Styx et s'arrête au niveau du ponton, auquel elle s'amarre toute seule. Une silhouette solitaire se dresse à l'avant de la proue, engoncée dans une capuche. Tournant la tête, elle semble découvrir les deux Dieux qui l'attendent sur la rive, et saute d'un bond prodigieux du haut de sont perchoir. Poséidon – pardon, "Paragraphe" – s'avance vers lui, bras grand ouverts pour une embrassade, un grand sourire aux lèvres. POSEIDON/PARAGRAPHE Charon! Mon vieil ami, comme ça fait plaisir de te voir! Le nocher retire sa houppelande, dévoilant un vieillard à la peau parcheminée, encore robuste malgré son âge, vaguement transparent. Un grand sourire édenté éclaire son visage ridé et d'ordinaire grincheux, et les deux hommes s'étreignent comme deux vieux amis. CHARON Poséidon, vieille étoile de mer! Ça fait un moment que je ne t'avais pas vu, qu'est-ce que tu fais là ? POSEIDON/PARAGRAPHE, prenant un air affecté Oh, tu sais comme je suis occupé d'ordinaire… J'ai eu envie de changer d'air, voilà tout! Alors, comme tu le vois, aujourd'hui ma nièce et moi avons décidé de donner un petit coup de main à mon cher frère! La famille est là pour s'entraider, tu comprends! ATHENA, tout bas Ben voyons… POSEIDON/PARAGRAPHE, l'ignorant Mais dis-moi, c'est nouveau, cette galère! Où est passée ta barque? CHARON Ma barque? (Il s'esclaffe) Attends, quand y a plein de monde comme ça tu crois quand même pas que je vais faire 60 846 allers-retours quand même! Non, non, je sors les grands moyens quand c'est comme ça! En plus, comme ça j'ai même pas à ramer, c'est eux qui s'en chargent, enfin, ceux qui ont pas mes sous pour payer la traversée héhé… Bah, ils sont marins, ceux de cette fournée, donc ça ira, ou alors ils peuvent essayer de nager, s'ils préfèrent, ha! Et puis ça leur fera les pieds, à tous ces peigne-culs biberonnés à l'Orphée et à l'Hercule, là , histoire de leur montrer comment qu'ça s'passe en vrai et qu'ils sont pas près de sortir! N'empêche, tu sais que j'ai toujours rêvé d'avoir une trière, moi? Alors, la dernière fois que y a eu les grandes eaux, pendant la guerre de je-sais-plus-quoi, là , je me suis mis en grève, tu vois, parce que le patron il est bien gentil, mais c'est pas avec deux oboles par tête que j'vais bien pouv- POSEIDON/PARAGRAPHE, précipitamment Je comprends ton problème, vieille méduse, j'en parlerai à mon frère dès que possible, mais là … CHARON Hmm? Oh, oui, le boulot, c'est ça? Un vrai bourreau de travail, toi, alors haha! Bah, te fais pas de bile, va! La p'tite peut s'en charger toute seule pendant qu'on rattrape un peu le temps perdu toi et moi, hein? ATHENA Hein? Attends un peu, Char- CHARON Parfait, tu vois? C'est réglé! Aaaah, elle a bien grandi, la p'tite! On peut tellement compter sur elle! Comme la patronne, tu sais? Ta nièce, elle a réussi à mater Hadès, j'te dis pas comment! Par exemple, t'as remarqué comme c'était vachement moins sinistre ici depuis qu'elle a refait la déco? C'est quand même… Sans cesser de causer, il s'éloigne dans un coin de la crique, entraînant un Dieu des Mers mi-paniqué mi-soulagé à sa suite. Athéna ne peut que les regarder faire, estomaquée, sa chouette ululant joyeusement sur son épaule pour réclamer plus de caresses. La déesse n'a cependant pas le temps de se plaindre qu'une voix implorante se fait entendre. PATROCLES Athéna? Ô, Athéna, est-ce vous? ATHENA, se retournant et découvrant l'âme d'un marin, son armure de capitaine de trière portant les insignes d'Athènes Je…Euh… PATROCLES, se prosternant comme la plupart des autres âmes Ô Athéna! De grâce, aide-nous à rejoindre les Champs-Élysées, nous qui avons servi ta cité jusqu'à la mort! La déesse hésite, jette un coup d'œil vers son oncle qui lui renvoie une œillade goguenarde, toujours en pleine "conversation" avec un Charon volubile. Reprenant sa contenance, elle toussote dans sa main et se compose une allure digne. ATHENA Navrée, vous vous trompez de personne. Non, non, moi, je suis… (Elle jette un regard mauvais à Poséidon qui fait mine d'écouter Charon) je suis Strophe, préposée à l'accueil dans les Enfers. PATROCLES, se redressant et la regardant avec des yeux ronds Mais… Mais voyons! Je reconnais bien ta divine apparence, Ô Athéna! ATHENA/STROPHE, tentant de paraître crédible Je sais, on me dit souvent que je lui ressemble. Mais qu'est-ce qu'Athéna ferait aux Enfers, vraiment? PATROCLES, pas dupe Mais ce casque… ATHENA/STROPHE, l'enlevant précipitamment Je voulais voir si ça m'allait. PATROCLES Cette chouette! ATHENA/STROPHE, attrapant prestement son animal totem dans son casque et les faisant disparaître Quelle chouette? PATROCLES Mais… ATHENA/STROPHE, l'interrompant Mais rien! PATROCLES Enf- ATHENA/STROPHE Cht! PATROCLES Je- ATHENA/STROPHE Hep! PATROCLES Mais enfin… ATHENA/STROPHE, sèchement Ho! C'est le Tartare, que tu veux, c'est ça? CERBERE, soudain intéressé Mouf? ATHENA/STROPHE, à l'adresse du monstre Le lieu, pas le steak! (Pour elle-même) Mais qu'il est con, ce chien… CERBERE Grrr..!!! ATHENA/STROPHE, l'ignorant et prenant un épais registre et un stylo Nous disions donc… Nom, prénom, âge, date de naissance, cause de la mort, numéro de sécurité sociale, numéro de téléphone, personne à prévenir en cas de besoin… (Sa voix diminue à mesure qu'elle comprend ce qu'elle lit) …adresse postale… Mais il s'est gouré, avec sa liste! Ah, non, c'est juste pas la bonne époque… (Elle tourne les pages les unes après les autres) Voyons voir… 21ème siècle… 20ème… (Elle relève la tête, prise d'un doute, et interpelle son oncle, toujours aux prises avec les anecdotes à rallonge du vieux passeur) Posé-Paragraphe! Il est déjà né, Jésus, ou c'est pour plus tard? Le Dieu des Mers sursaute, jette un coup d'œil à sa nièce, à l'épaisseur infernale du carnet qu'elle tient dans ses bras, puis à la file immense d'âmes qui s'échappe de la trière, et qui n'est qu'une fraction des morts du jour, et enfin à Charon qui ne s'arrête toujours pas de radoter. POSEIDON/PARAGRAPHE, poussant un soupir Eh ben, on est pas rentrés à l'Olympe… HADES, seul devant les portes du tribunal Mais qu'est-ce qu'ils foutent? Cette histoire fait partie d'un tout plus grand !
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