Je suis complètement paumée!

C’est la première chose dont je me rend compte alors que la nuit commence à tomber.

D’habitude j’arrive à peu près à situer le nord grâce au pôle magnétique mais là… Je suis en plein milieu d’une zone métallifère qui brouille complètement mes sens.

Dire que j’ai refusé qu’ils m'accompagnent… Y en aurait bien eu un qui aurait pu se dépatouiller pour retrouver le chemin. Quelle idée j’ai eu de vouloir faire cette mission en solitaire…

J’entend un bruit derrière moi. Je ne cherche pas à savoir ce que c’est, tout ce qu’il faut, c’est que je trouve un repère. Je grimpe dans l’arbre le plus proche. Au sommet, je constate que je ne suis pas plus avancée que ça.

Merde! Elle finit bien quelque part cette forĂŞt!?

Pas très loin, je repère le sommet d’une grande pierre dressée. ça doit être la pièce centrale du cercle devant lequel je suis passée en arrivant. Bon! je sais où je suis, mais je sais aussi que j’ai fais que tourner en rond depuis ce matin. Bordel!

Je redescends et je prends la direction du cercle en tenant ma perception du fer enfoui. J’aurais dû faire ça depuis le début mais j’y suis tellement habitué que je n’y ai pas pensé.

Je suis à mis chemin quand j’entend de nouveau le bruit. Il est plus proche cette fois. Quelques secondes plus tard, un cri glaçant retentit. Une angoisse que je suis incapable de réprimer me prend à la gorge. J’accélère.

ça ne sert à rien, j’entend des pas mêlés de bruissements qui se rapprochent.

Je me mets à courir à en perdre haleine. Au bout de quelques minutes j’arrive enfin au cercle de pierre. Là, je me poste en hauteur et j’attend, prête à décocher une flèche. Il n’y a plus aucun son. Mon stress diminue peu à peu.

Pourquoi j’ai eu aussi peur? Je suis une femme jeune et en pleine forme qui s’en sort bien au tire à l’arc et qui maîtrise sans problème le métal et l’éléctricité… Même seule, j’ai aucune bile à me faire… Non?

Un déplacement d’air silencieux me fait lever les yeux au ciel juste à temps pour éviter une serre qui se referme sur le vide.

“Merde! C’est quoi ce truc?!”

C’est pas une vraie question. Je sais exactement ce que c’est. Cet être est l’un des plus majestueux au monde, une créature que tout le monde connaît, qui existe depuis la nuit des temps.

Alors que je me laisse glisser en bas, l'hippogriffe se pose en poussant un cri frustré. Je ne peux m’empêcher de l’admirer. Il a une robe blanche sur laquelle les couleurs du crépuscule se reflètent et ses yeux verts luisent dans la pénombre comme deux feux follets.

C’est pour lui que je suis là, je suis payée pour le ramener à un gars plein aux as. Il avait une bonne tête et un regard franc, j’ai pensé qu’il voulait faire un élevage.

Un carreau fuse. Par réflexe, je le dévie de sa trajectoire. Mais ce n’est pas moi qui était visée.

J’entend un juron dans les fourrés et un homme potelé en sort en rechargeant son arbalète. Je le reconnais tout de suite. C’est lui mon commanditaire.

“M’sieur Briscus?! Vous fichez quoi ici?

— ça se voit non!?” dit-il en finissant d’armer son arbalète.

“Mais… je croyais que vous le vouliez vivant.

— Naturellement, sinon je n’aurais pas eu le plaisir de l’abattre moi même.

— Vous… Pourquoi?

— Mais pour ma collection, pour quoi d’autre?! J’exposerais sa tête dans mon hall des trophés et je revendrais ses plumes à prix d’or. Il n’est bon qu’à ça l’animal.”

Puis sans dire un mot de plus, il me tire dans la jambe. Je n’ai pas le temps de dévier le projectile cette fois. Alors que je suis au sol, Briscus pose son arbalète et sort son couteau. Je fais de même mais il me donne un coup de pied dans la main. Il me prend ensuite par les cheveux et m’applique la lame sous la gorge. Il a dû lire mon incompréhension car il me dit.

“Ce n’est pas contre vous, mais je tiens à conserver ma réputation de chasseur solitaire.”

C’est alors que l'animal fabuleux intervient. Le porc à dû le sentir venir, il esquive et va récupérer son arbalète qu’il pointe sur sa proie. Au moment où il va presser la détente, il pousse un cri. Deux piques de métal pur lui traversent les pieds et montent le long de son corps pour finir par lui lier les mains.

Je lis l’incompréhension dans son regard.

“Un conseil à l’avenir. Ne sous-estimez pas vos adversaires.”