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![]() ![]() Chambre noire(par Salander)La porte de la chambre noire claqua sur elle, et Jeanne-Marie inspira puis expira profondément. Son coeur battait dans ses tempes, et le sang noir qui coulait dans ses veines bouillait de rage. Elle ravala sa salive acide et sa révolte au fond d’elle même, et se dirigea vers le révélateur pour en retirer la pellicule. Cela faisait maintenant un mois qu’elle travaillait avec Monsieur Armand, et le photographe était déterminé à la laisser enfermée dans la cave pour que jamais personne n’apprenne qu’il avait embauchée une femme. Trop heureux de se débarrasser d’elle son père avait grassement payé l’homme pour qu’il accepte, mais la vie de photographe était bien loin de celle qu’elle rêvait. S’affairant entre les bacs, la jeune femme ruminait sa haine en exécutant avec précision ces gestes qu’elle avait mille et une fois déjà fait. Remarquant que le fixateur était presque vide, elle termina la série de photo qu’elle développait et se dirigea vers la réserve pour en ramener une bouteille. Qu’est ce qui lui avait prit en même temps ?! D’imaginer qu’elle serait vraiment la bienvenue dans ce monde exclusivement composé d’hommes. À présent elle n’attendait plus que son contrat se termine, pour acheter son premier appareil photo et s’en aller loin de Paris. Elle pourrait parcourir le monde avec son appareil photo, devenir reporter et ou écrivaine, et gagner sa vie à la sauvette en laissant entre elle et le monde la lentille froide de l’appareil. Jeanne-Marie n’avait jamais été bavarde, quand elle avait découvert la photographie, elle avait cru découvrir sa voix… La réserve était presque vide. Elle avait eu beau prévenir Monsieur Armand de ce fait au fil des semaines il repoussait toujours le moment de commander, et quand il n’y aurait plus aucun produit pour développer elle savait qu’il rejetterait la faute sur elle. Pestant dans sa barbe, la jeune femme fouilla à tâtons dans le noir, parmi les toiles d’araignées et les rats, pour trouver ce qu’elle cherchait. Il faudrait que quelqu’un fasse le ménage ici un jour, mais elle n’était pas payé pour. Il faudrait que quelqu’un rajoute une ampoule ici un jour, mais Jeanne-Marie aimait le noir et le froid des caves. Quand elle était sûre que Monsieur Armand n’était pas dans les parages, elle se laissait aller à fredonner en travaillant. Seule et libérée du regard des gens, elle pouvait rêver et tout oublier. C’était dans l’un de ces jours doux, où les heures se confondent toutes dans le rouge de la chambre, qu’une voix grave avait interrompu sa chanson et demandé à ce qu’on vienne prendre sa commande. Jeanne-Marie avait déglutit, et acquiescé. Les poings serrés, elle était montée accueillir le client les yeux baissés. Une fois le fixateur attrapé, la jeune femme sortit de la réserve en souriant. Ça lui en avait bouché un coin à Monsieur Armand, qu’elle soit capable de prendre seule la commande d’un client, aller prendre des photos chez lui, lui faire un devis, et commencer à développer le film avant qu’il ait eu le temps de revenir. Ça lui en avait tellement bouché un coin qu’il s’était sentit obligé de l’engueuler, Jeanne-Marie avait écouté en silence, avant de s’excuser en silence. Quand elle changea le liquide du bac, la jeune femme se fit la réflexion que ce fixateur avait une drôle d’odeur. Observant la bouteille avec plus d’attention, elle remarqua que si la forme était la même que celle de chacun des fixateur, l’étiquette portait une inscription différente. On pouvait y lire en italique : Pour que tes photos n’aient plus aucun secret. À mon grand ami et on frère. J. Chollet. Fronçant les sourcils, Jeanne-Marie se demanda pourquoi ce produit n’avait jamais été utilisé et pourrissait dans la réserve. Haussant les épaules en se disant que ce n’était pas ses affaires et que de toute façon elle l’avait déjà vidé dans le bac, elle jeta l’emballage, et reprit son travail. Non, non elle ne regrettait pas d’avoir accepté la commande de ce client. L’homme avait été jovial, rapide, et efficace. Peu importait le sexe de la personne en face, il avait besoin d’un travail vite et bien. Emmenant la photographe dans le local qu’il occupait avec ses amis peintres, il la fit prendre en photo leur association d’artistes et leurs muses. Droite et rigide parmi ces corps beaux et ces pots de peintures, Jeanne-Marie n’avait été à son aise que lorsque qu’elle avait sortit son appareil. Ainsi cachée, elle avait pu renchérir à leur blague, et observer le monde avec curiosité. Les jeunes hommes avaient écouté sa voix chantante, et l’avait fixé. Alors Jeanne-Marie avait raclé sa gorge, ravalé son bonheur, et travaillé. Non, Jeanne-Marie ne regrettait pas d’être sortie de cette chambre noire et d’avoir fait son travail. Même si son patron opérait une retenu sur son salaire, même si elle avait dû affronter les regards. À présent elle faisait apparaitre dans le bac le résultat de son travail. Les ombres ondulaient lentement alors que les visages se dessinaient. Un à un, la photographe vis les gens de cet après-midi lui sourire, de la même manière qu’ils avaient souris à l’objectif. Un à un, Jeanne-Marie détailla chacun de ces beaux visages. Elle était satisfaite ! Guider les gens lors d’une photo était la partie qu’elle redoutait le plus. Certains n’hésitaient pas à se moquer d’elle ou l’ignorer, récalcitrant à l’idée d’obéir à une femme. Cet après-midi, les artistes et leurs amies avaient été dociles. Se remémorant chacun de leurs sourires, Jeanne-Marie fronça les sourcils en croisant le regard sévère de l’une des femmes. La muse ne souriait pas. Les yeux plongés dans ceux de la photographe, chacun de ses traits transpirait la rage. Jeanne-Marie sursauta de tout son corps quand une voix puissante s’éleva depuis le bac : — Aveugle ! Photographe imbécile et aveugle ! Nous n’avons pas cessé de t’appeler à l’aide cet après-midi, et tu t’es caché derrière ton appareille, imbécile et aveugle. |