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Faucheuse
Spectacles
  Le renard et la vieille dame(par Ellumyne)Il faisait sombre en ce soir-là , et les branches des chênes à l’orée de la forêt étaient secouées par un vent menaçant, annonciateur d’un orage à venir. Un éclair déchira le ciel et une petite fille en pleurs se précipita en direction de sa grand-mère. La robe de l’enfant virevoltait au gré des rafales de plus en plus violentes. Derrière elle, la silhouette d’un canidé se dessina distinctement dans la clairière. Ses oreilles pointues et sa truffe dirigées vers l’avant, humant l’air saturé d’humidité, il semblait la fixer de ses yeux scintillants. Non loin de là , le village tout entier était silencieux. Chacun avait trouvé refuge dans une chaumière faite de paille et de torchis. Et seule la petite aventurière, inconsciente du danger, avait tardé à rentrer malgré les appels répétés de la vieille dame. C’était maintenant chose faite, au grand soulagement des habitants. Les deux eurent à peine le temps de rentrer à l’abri qu’une bourrasque frappa de plein fouet la porte en bois de leur maisonnette et c’est de sa profonde voix grave que l’ancêtre tenta d’apaiser l’enfant. — Chuuut ma petite Elisabeth, calme-toi, nous sommes en sécurité. — J’ai peur mamie ! — Je sais ma belle, je sais. Mais il n’y a rien à craindre, je peux te l’assurer. — Mais dehors, il y avait une ombre. Elle me suivait ! Je l’ai senti. Tu l’as vue toi aussi ? La vieille dame lui fit un large sourire dont quelques dents en moins n’auraient pu gâcher la douceur. Les esprits de la forêt existaient, bien évidemment, mais tous les adultes savaient que les rôdeurs de la nuit étaient pure invention pour que les marmots rentrent au bercail avant la tombée de la nuit. Les loups quant à eux ne s’approchaient jamais du village. La petit Lily ne risquait rien et elle se mit à la bercer gentiment en lui tamponnant ses larmes sur ses petites joues rosies par l’inquiétude. Au gré du balancement régulier, l’enfant cligna des yeux, luttant contre un sommeil pourtant inéluctable. De sa main parcheminée, Isabeau repoussa une mèche de cheveux blancs derrière son oreille et soupira de lassitude. Elle se sentait de plus en plus fatiguée ces dernières semaines et cette petiote lui en faisait voir de toutes les couleurs en s’aventurant de plus en plus loin de la chaumière. Lily avait beau être obéissante, chaque fois qu’elle en avait l’occasion, elle s’échappait afin de goûter à pleine dents une liberté enivrante. Et chaque fois, le cœur de la vieille dame s’emplissait tout autant d’inquiétude que de fierté. Posant la petite fille dans son lit, elle se remémora la scène à laquelle elle venait d’assister. Un renard se trouvait bien au milieu de la clairière. Pourtant… Pourtant cet animal ne semblait pas avoir peur de l’homme. Ce n’était pas la première fois qu’elle le voyait. Et il se rapprochait de plus en plus du village. Elle n’y avait pas spécialement prêté attention jusque-là , mais ce soir, c’était différent… Comme si une connexion s’était établie entre eux. Se pourrait-il que…? Non, pas encore… Isabeau ressentit un frisson courir le long de son échine et elle resserra son châle autour de ses épaules. Si, cela ne pouvait être que ça… La vieille dame se pencha sur Lily et lui déposa un baiser sur le front avant de sortir de la chaumière. D’un pas d’abord hésitant, elle se dirigea vers le renard qui semblait l’attendre, assis dans la clairière et nullement dérangé par la pluie battante. — Il est l’heure murmura-t-il en s’illuminant d’une lumière bleutée qui s’étendit sur plusieurs mètres aux alentours jusqu’à englober Isabeau d’une chaleur bienveillante. — Je te suis, répondit-elle, le cœur léger. |
