Le cours
(par Cottange)(Thème : MĂ©lilĂ©mots 5)
— Un œuf, voici ma réponse.
Je regarde l’élève qui me fait face. Cet ignare joue avec sa plume devant les autres élèves sans chercher à développer sa réponse. Je connais ce genre d’hurluberlus, j’en ai déjà croisé plusieurs à l’Académie depuis le temps.
Je sens le regard du professeur titulaire sur ma nuque. Sans le regarder, alors que je toise le clown impertinent, je devine l’impatience de mon maître de stage. Je m’approche alors du trublion, alors que sur mon visage se dessine une confiance que je ne ressens absolument pas.
— Nous t’écoutons, Romero. Maintenant que tu as annoncé ta réponse, donne nous donc les raisons de ton choix.
Je retient aisément un sourire satisfait, presque narquois, alors que la plume échappe à mon élève pour tomber, pointe la première, sur le parchemin de sa jeune camarade. Avant que quiconque ne puisse réagir, cette belle plume de corbeau finit au sol, la penne éclatée par la série de chocs qu’elle a subi.
Alors que le petit malin cherche quelque chose à répondre, un mouvement m’interpelle. Marthial, qui somnolait sur son bureau tant que mon attention se portait sur son camarade, vient de sursauter après que son menton ait fini de glisser de sa main. C’est avec nostalgie que j’approche de ce dernier, au grand soulagement du clown de service qui gagne un temps précieux pour trouver une idée un tant soit peu crédible qui lui permettra d’expliquer sa réponse audacieuse.
Alors que je tend la main vers l’endormi, qui me rappelle moi à son âge, la cloche sonne et annonce la fin du cours.
— D’ici le prochain cours, vous devez chacun me faire trois paragraphes sur votre réponse personnelle, la manière dont vous êtes arrivés à cette conclusion. Maintenant ouste, votre professeur de botanique ne saurait attendre.
Les élèves dehors, je me tourne vers l’enseignant. Mes épaules s’affaissent alors que je reprends cette attitude de soumission qui me rassure quant au fait que je ne suis pas donneur d’ordres, mais simple exécutant.
— Mieux. Bien mieux. Si tu continues comme ça pour le semestre, je te donne l’accréditation qu’il te manque pour devenir enseignant.
Suite à ces paroles, ma respiration se fait plus profonde, le creux de mes reins cesse de me tirailler. Je suis sur la bonne voie, j’arriverai à devenir prof. Je tiendrais ma promesse.
Cette histoire fait partie d'un tout plus grand !