Allons-y !
(par Downforyears)(Thème : Défi de Sourne et Awoken)
L’eau me recouvre brusquement, après une chute d’une dizaine de mètres. Le choc m’étourdit et je dois mobiliser toute ma volonté pour ne pas m’évanouir. Je sens mon bras gauche bien trop lourd pour que je puisse le remuer. Mes bottes sont des poids morts à mes pieds, mon long manteau de desperado tente de m’entrainer au fond de l’eau comme un immense anaconda qui voudrait me noyer, mais hors de question que je les abandonne. J’utilise mes dernières forces, et enfin, je perce la surface. J’engloutis une énorme bouffée d’oxygène et je me laisse porter par le courant de la rivière.
Les minutes passent, et j’arrive enfin sur une plage de galets. Je m’écroule sur le sol et je tente de reprendre mon souffle.
‘‘Tic Tac Tic Tac Tic Tac’’
Le son, bien mécanique, me rassure. Je ferme les yeux, juste pour l’entendre encore quelques secondes. Je me relève doucement. Après une telle chute et un tel bain, il est temps que je vérifie que j’ai tout le reste.
Ma tête, mon torse, mes jambes, mes bras, mes mains… Tous semblent être là . Mon bras gauche, mécanique, semble grippé. Il faudra que je trouve de l’huile dès que possible. Je récupère ma sacoche de cuir qui flotte sur l’eau de la rivière, à peine retenue par la lanière par un gros rocher. Je fouille les poches, et j’en tire mes lunettes de protection. Leurs verres sépia semblent être en bon état. Je récupère mon écharpe bleue et grise. Trempée. Je trouverai bien de quoi la sécher. Enfin, je sors une enveloppe dorée comme un biscuit. Malgré son séjour dans l’eau, elle est parfaitement sèche. Je l’ouvre de nouveau pour y lire la lettre envoyée par la mystérieuse Lu.
‘‘Bienvenue à l’Académie ! Mais qu’est-ce que l’Académie me demandez-vous ? L’Académie, c’est le lieu où se réunissent les plus intrépides des membres de tous les univers, les guerrières, les têtes brûlées, les écrivains en mal d’aventure… Ici, point de cours magistraux. Nous vous proposons chaque semaine un défi à relever !
Chaque lundi, il vous sera proposé un challenge différent à réaliser durant la semaine. Le but ? Écrire un court texte (une ou deux pages, plus si vous êtes vraiment inspiré(e)) en fonction d’une contrainte donnée.
Pourquoi participer à ce genre de défi ? Pour faire une pause dans votre projet principal, vous amuser seul(e) ou entre amis, oxygéner votre machine à imaginer, vous entraîner à écrire ou encore vous essayer à un exercice d’écriture que vous n’auriez même pas imaginé auparavant, et ce sans prise de tête !
Vous vous sentez prêt(e)s à relever le défi ? Alors vous êtes bienvenue chez nous.
Lu, directrice de l’Académie.’’ |
L’écriture est fine, assez belle, l’encre est couleur framboise. Cette Académie m’intrigue. Comment la directrice a réussi à m’envoyer cette lettre alors que j’étais perdu au fin fond de l’un de mes univers ? J’essayais d’échapper à une orbitèle aussi grande que moi lorsque l’enveloppe était apparue devant moi, portée par le vent. Je n’avais eu que quelques secondes pour l’attraper avant de me retourner pour éliminer mon prédateur d’un carreau d’arbalète.
Etrange. Intriguant. Excitant.
Je frotte ma barbe, j’essore mes cheveux longs bruns et les coiffe en une longue queue de cheval. Je passe la sangle en cuir de mes lunettes de protection autour de mon cou, celle de ma sacoche sur mon épaule droite, et je scrute les alentours.
Je suis visiblement au fond d’une vallée. D’immenses montagnes anthracites m’écrasent de leurs centaines de millions d’années d’existence, leur vénérable barbe de neige cachant les rides de leurs crânes. Les nuages dans les cieux forment une couronne blanche et vaporeuse sacrant les vénérables sommets, comme elles sacreraient un empereur.
Les arbres autour de moi chantent alors que les doigts du vent font vibrer leurs branches comme des harpes. Les mélèzes, les pins, les amentifères, les chênes, les sapins, les frênes… Chaque arbre est différent de celui qui le précède et de celui qui le suit, comme si chaque espèce existant dans l’univers avait envoyé un représentant dans cette assemblée sylvestre. Je…
Est-ce l’atmosphère des lieux qui m’inspire autant ? J’essaie de graver dans ma mémoire les mots qui me viennent à l’esprit afin de les coucher dès que je trouverai un peu de papier. J’ai eu un carnet, autrefois, je crois.
Je suis un petit sentier de graviers, et au détour d’un virage, la voilà qui se révèle à moi.
L’Académie.
Elle est… Elle est un rêve. L’école où j’aimerais aller si j’avais de nouveau quinze ans. L’école où j’aimerais étudier, me faire des amis, apprendre des autres, apprendre aux autres. L’école où je rêverais de progresser, où je rêverais de m’investir.
Elle ressemble à deux manoirs que l’on aurait mis face à face, supportant une majestueuse galerie aux arcades gothiques. Les toits de cuivre sont parsemés de flèches enflammées par les rayons du soleil, comme les mille lances de la Cité des Anges. Les fenêtres me semblent être autant de portes d’entrées sur des aventures incroyables. Les vieilles pierres grises des murs me rassurent, comme de vieilles grands-mères qui voudraient conter près de l’âtre des histoires de princesses et de chevaliers. J’ai l’impression de découvrir un nouvel endroit que je connais déjà . Alors même que je n’y ai jamais mis les pieds.
Alors que je m’avance entre deux haies taillées comme dans un jardin à la française, une voix me parvient.
— Tu es un nouvel élève ? En dessous, précise-t-elle alors que je cherche d’où elle peut venir.
Je baisse les yeux, et me retrouve face à un rongeur étrange. Est-ce une gerbille ? Ou un loir ? Un pika peut-être ?
— Je suis une chuchoteuse. Et oui, tu viens de penser tout haut.
— Pardon, je n’ai pas l’habitude des animaux qui parlent. Et je crois que je suis un nouvel élève. J’ai reçu cette lettre.
— Tu es trempé, me fit remarquer la chuchoteuse.
— J’ai atterri dans une rivière. Alors c’est l’Académie ?
— Oui. Je te fais visiter ?
— Avec plaisir, réponds-je intrigué.
— Moi, c’est Gaïa. Et toi ?
— Tu peux m’appeler Down.
Cette histoire fait partie de plusieurs cycles !